76 JOURNALISTES EN PRISON : IL FAUT SOUTENIR LA LIBERTE D'EXPRESSION
Les affrontements qui se deroulent en ce moment en Turquie s'enracinent
contre le gouvernement de l'AKP, le parti au pouvoir accuse de museler
l'opinion publique et les libertes individuelles.
Pour le collectif Vigilance Armenienne contre le Negationnisme,
il faut faire bouger la Turquie et soutenir les prisonniers politiques.
Tribune collective d'intellectuels turcs et armeniens soutenue
egalement par de nombreuses associations.
Publie le 05-06-2013 dans Le Nouvel Observateur - Le Plus
Les evènements en cours en Turquie traduisent l'exasperation d'une
jeunesse qui ne supporte plus les derives et l'autoritarisme du
gouvernement AKP de Recep Tayyip Erdogan. L'usage disproportionne de la
force par la police turque est symptomatique de la violence exercee a
tous les niveaux de l'appareil d'Etat. Depuis 2009, le pouvoir mène
en effet une veritable repression a l'encontre de ses opposants,
emprisonnant des milliers d'etudiants, enseignants, universitaires,
avocats, journalistes et elus.
Sevan Nichanian, emprisonne pour insulte a l'islam
Le collectif Vigilance Armenienne contre le Negationnisme (VAN)
ainsi que les personnalites et associations signataires s'elèvent
contre la decision de la 14e chambre du Tribunal de police d'Istanbul
qui a condamne le 22 mai 2013, l'intellectuel armenien de Turquie,
Sevan Nichanian, a 13 mois et demi de prison pour avoir, dans l'un
de ses articles, "ouvertement insulte les valeurs religieuses d'une
certaine partie de la societe".
Ce libre-penseur, bien connu pour ses prises de position estimees
iconoclastes, ne peut beneficier de sursis pour cause d'une
condamnation anterieure : ayant interjete appel, il devrait neanmoins
rester en liberte jusqu'a son nouveau procès pour "blasphème".
Condamner Sevan Nichanian, c'est une atteinte a la liberte
d'expression, mais c'est aussi le designer officiellement a la vindicte
des islamo-nationalistes et intimer le silence aux Armeniens de
Turquie, deja en proie a des discriminations, des menaces recurrentes
et des assassinats cibles, suivis de procès biaises.
Le cas Ragip et Deniz Zarakolu
Ainsi, les veritables commanditaires de l'assassinat, le 19 janvier
2007 a Istanbul, du journaliste armenien de Turquie, Hrant Dink,
n'ont pas ete inquietes jusqu'a present ; l'execution par un appele
ultra-nationaliste le 24 avril 2011, date commemorative du genocide
armenien, du jeune Sevag Balikci, qui accomplissait son service
militaire, a ete jugee "accidentelle". Le meurtre raciste de Maritsa
Kucuk, une Armenienne âgee, egorgee a Istanbul le 28 decembre 2012,
a ete fort opportunement impute a un Armenien qui ne jouit pas de
toutes ses facultes mentales.
À l'occasion du verdict qui frappe Nichanian, le "Don Quichotte
armenien", il est bon aussi de se souvenir du sort que l'Etat turc
reserve a ses opposants turcs et kurdes.
Le procès de Ragip et Deniz Zarakolu se tient du 27 mai au 7 juin
2013 a Silivri, a 60 km d'Istanbul.
Si l'emblematique editeur et defenseur des droits de l'homme, Ragip
Zarakolu, incarcere pour "terrorisme" le 28 octobre 2011, comparaît en
prevenu libre après avoir effectue 5 mois et demi de preventive, il
n'en est pas de meme de son fils Deniz Zarakolu, toujours emprisonne
depuis le 4 octobre 2011 pour avoir donne une conference sur "La
Politique" d'Aristote, dans le cadre de l'Academie du BPD, parti
legal pro-kurde ayant 36 deputes au parlement turc. Doctorant en
sciences sociales, Deniz Zarakolu travaille pour la maison d'edition
familiale "Belge" (prononcer "Belgue" qui veut dire "documents"). Son
incarceration - tout comme celle de son père Ragip - vise a museler
"Belge", renommee pour ses publications sur le genocide armenien et
les droits des minorites de Turquie.
D'autres collaborateurs de "Belge", tels Aziz Tunc, le poète kurde
Mulazim Ozcan, la traductrice Ayse Berktay, attendent dans leur cellule
l'issue de procès-fleuves regroupant des centaines de prevenus et
risquent de lourdes peines de prison a l'instar de l'universitaire
Busra Ersanli, en liberation conditionnelle. Enfin, n'oublions pas
la sociologue feministe Pinar Selek, en exil a Strasbourg du fait
de son invraisemblable condamnation a perpetuite au terme de moult
procès kafkaïens.
76 journalistes incarceres en Turquie
On s'interroge sur l'indifference generale de l'Europe. Avec 76
journalistes incarceres, la Turquie, candidate a l'adhesion a l'Union
europeenne, a pourtant ete designee en 2012 "plus grande prison du
monde pour les journalistes devant l'Iran, l'Erythree et la Chine"
par le Comite pour la protection des journalistes (CPJ). Les lois
anti-terroristes en vigueur renforcent la tendance du pouvoir turc a
"assimiler journalisme critique et terrorisme".
Une petition intitulee "Sevan Nichanian n'est pas seul" a ete lancee
par des intellectuels de Turquie, publiee en solidarite avec lui
mais egalement avec les journalistes Ibrahim Guvenc et Necati Abay
qui viennent de se voir infliger respectivement 10 et 11 ans et de
3 mois de prison pour "terrorisme".
Le Collectif VAN ainsi que les personnalites et associations
signataires s'associent a cette demarche : tous les militants
des droits de l'homme doivent voir la fin des procedures indues
engagees a leur encontre, qu'ils soient en liberation conditionnelle
a l'instar de Ragip Zarakolu et Busra Ersanli, en exil comme Pinar
Selek, en prison tels Deniz Zarakolu, Aziz Tunc, Mulazim Ozcan et
Ayse Berktay, en attente d'un second jugement comme Sevan Nichanian,
ou sous le coup de poursuites au titre du liberticide article 301,
"pour insulte a l'identite turque", comme Rober Koptas, redacteur en
chef du journal armenien de Turquie Agos, l'ecrivain Umit Kivanc et
le journaliste Temel Demirer.
Il est temps que la France, qui semble avoir abdique sur le terrain
de la defense des droits de l'homme en Turquie, trouve le courage
d'affronter ceux qui pietinent l'idee meme de democratie. Elle se
doit d'apporter son soutien a ces femmes et ces hommes d'exception :
ils representent le seul avenir possible pour un pays qui n'arrive
toujours pas a se defaire de ses tentations totalitaires.
Signataires :
Seta Papazian, Presidente du Collectif VAN [Vigilance Armenienne
contre le Negationnisme], Benjamin Abtan, President du Mouvement
Antiraciste Europeen EGAM (European Grassroots Antiracist Movement),
Catherine Coquio [Professeur de litterature a Paris 7], Aircrige-Paris
[Association internationale de recherche sur les crimes contre
l'humanite et les genocides], Serge Klarsfeld, Memorial 98,
Meïr Waintrater, Yves Ternon [Historien], Seve Izouli-Aydin
[Avocate], Frederic Encel [Politologue], Etienne Copeaux [Historien
de la Turquie], Claire Mauss-Copeaux [Historienne], Erol Ozkoray
[Ecrivain-journaliste - Istanbul/Turquie], Dogan Ozguden [Journaliste -
Bruxelles/Belgique], Inci Tugsavul [Journaliste - Bruxelles/Belgique],
Jacques Berès [President de France Syrie Democratie], Bernard Schalscha
[Secretaire general de France Syrie Democratie], MPCT [Mouvement
Pour la Paix et Contre le Terrorisme], Andre Metayer [President
d'Amities kurdes de Bretagne], LICRA [Ligue internationale contre
le racisme et l'antisemitisme], Alain David [Bureau executif de la
LICRA, philosophe], Roger W. Smith [Professor of government emeritus,
College of William and Mary, Virginia, USA], Jacky Mamou [President
du CUD - Collectif Urgence Darfour], Alain Gauthier [President du
CPCR - Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda], Appui Rwanda,
Serge Avedikian [Acteur et realisateur], Anne Laine [Cineaste],
Taner Akcam [Historien, Center for Holocaust and Genocide Studies,
Clark University, USA], Marcel Kabanda [President d'Ibuka-France],
Cindy Leoni [Presidente de SOS Racisme], Jonathan Hayoun [President de
l'UEJF - Union des Etudiants Juifs de France], Aline Le Bail-Kremer
[Directrice de la Communication de l'EGAM - European Grassroots
Antiracist Movement].
jeudi 6 juin 2013, Ara ©armenews.com
Les affrontements qui se deroulent en ce moment en Turquie s'enracinent
contre le gouvernement de l'AKP, le parti au pouvoir accuse de museler
l'opinion publique et les libertes individuelles.
Pour le collectif Vigilance Armenienne contre le Negationnisme,
il faut faire bouger la Turquie et soutenir les prisonniers politiques.
Tribune collective d'intellectuels turcs et armeniens soutenue
egalement par de nombreuses associations.
Publie le 05-06-2013 dans Le Nouvel Observateur - Le Plus
Les evènements en cours en Turquie traduisent l'exasperation d'une
jeunesse qui ne supporte plus les derives et l'autoritarisme du
gouvernement AKP de Recep Tayyip Erdogan. L'usage disproportionne de la
force par la police turque est symptomatique de la violence exercee a
tous les niveaux de l'appareil d'Etat. Depuis 2009, le pouvoir mène
en effet une veritable repression a l'encontre de ses opposants,
emprisonnant des milliers d'etudiants, enseignants, universitaires,
avocats, journalistes et elus.
Sevan Nichanian, emprisonne pour insulte a l'islam
Le collectif Vigilance Armenienne contre le Negationnisme (VAN)
ainsi que les personnalites et associations signataires s'elèvent
contre la decision de la 14e chambre du Tribunal de police d'Istanbul
qui a condamne le 22 mai 2013, l'intellectuel armenien de Turquie,
Sevan Nichanian, a 13 mois et demi de prison pour avoir, dans l'un
de ses articles, "ouvertement insulte les valeurs religieuses d'une
certaine partie de la societe".
Ce libre-penseur, bien connu pour ses prises de position estimees
iconoclastes, ne peut beneficier de sursis pour cause d'une
condamnation anterieure : ayant interjete appel, il devrait neanmoins
rester en liberte jusqu'a son nouveau procès pour "blasphème".
Condamner Sevan Nichanian, c'est une atteinte a la liberte
d'expression, mais c'est aussi le designer officiellement a la vindicte
des islamo-nationalistes et intimer le silence aux Armeniens de
Turquie, deja en proie a des discriminations, des menaces recurrentes
et des assassinats cibles, suivis de procès biaises.
Le cas Ragip et Deniz Zarakolu
Ainsi, les veritables commanditaires de l'assassinat, le 19 janvier
2007 a Istanbul, du journaliste armenien de Turquie, Hrant Dink,
n'ont pas ete inquietes jusqu'a present ; l'execution par un appele
ultra-nationaliste le 24 avril 2011, date commemorative du genocide
armenien, du jeune Sevag Balikci, qui accomplissait son service
militaire, a ete jugee "accidentelle". Le meurtre raciste de Maritsa
Kucuk, une Armenienne âgee, egorgee a Istanbul le 28 decembre 2012,
a ete fort opportunement impute a un Armenien qui ne jouit pas de
toutes ses facultes mentales.
À l'occasion du verdict qui frappe Nichanian, le "Don Quichotte
armenien", il est bon aussi de se souvenir du sort que l'Etat turc
reserve a ses opposants turcs et kurdes.
Le procès de Ragip et Deniz Zarakolu se tient du 27 mai au 7 juin
2013 a Silivri, a 60 km d'Istanbul.
Si l'emblematique editeur et defenseur des droits de l'homme, Ragip
Zarakolu, incarcere pour "terrorisme" le 28 octobre 2011, comparaît en
prevenu libre après avoir effectue 5 mois et demi de preventive, il
n'en est pas de meme de son fils Deniz Zarakolu, toujours emprisonne
depuis le 4 octobre 2011 pour avoir donne une conference sur "La
Politique" d'Aristote, dans le cadre de l'Academie du BPD, parti
legal pro-kurde ayant 36 deputes au parlement turc. Doctorant en
sciences sociales, Deniz Zarakolu travaille pour la maison d'edition
familiale "Belge" (prononcer "Belgue" qui veut dire "documents"). Son
incarceration - tout comme celle de son père Ragip - vise a museler
"Belge", renommee pour ses publications sur le genocide armenien et
les droits des minorites de Turquie.
D'autres collaborateurs de "Belge", tels Aziz Tunc, le poète kurde
Mulazim Ozcan, la traductrice Ayse Berktay, attendent dans leur cellule
l'issue de procès-fleuves regroupant des centaines de prevenus et
risquent de lourdes peines de prison a l'instar de l'universitaire
Busra Ersanli, en liberation conditionnelle. Enfin, n'oublions pas
la sociologue feministe Pinar Selek, en exil a Strasbourg du fait
de son invraisemblable condamnation a perpetuite au terme de moult
procès kafkaïens.
76 journalistes incarceres en Turquie
On s'interroge sur l'indifference generale de l'Europe. Avec 76
journalistes incarceres, la Turquie, candidate a l'adhesion a l'Union
europeenne, a pourtant ete designee en 2012 "plus grande prison du
monde pour les journalistes devant l'Iran, l'Erythree et la Chine"
par le Comite pour la protection des journalistes (CPJ). Les lois
anti-terroristes en vigueur renforcent la tendance du pouvoir turc a
"assimiler journalisme critique et terrorisme".
Une petition intitulee "Sevan Nichanian n'est pas seul" a ete lancee
par des intellectuels de Turquie, publiee en solidarite avec lui
mais egalement avec les journalistes Ibrahim Guvenc et Necati Abay
qui viennent de se voir infliger respectivement 10 et 11 ans et de
3 mois de prison pour "terrorisme".
Le Collectif VAN ainsi que les personnalites et associations
signataires s'associent a cette demarche : tous les militants
des droits de l'homme doivent voir la fin des procedures indues
engagees a leur encontre, qu'ils soient en liberation conditionnelle
a l'instar de Ragip Zarakolu et Busra Ersanli, en exil comme Pinar
Selek, en prison tels Deniz Zarakolu, Aziz Tunc, Mulazim Ozcan et
Ayse Berktay, en attente d'un second jugement comme Sevan Nichanian,
ou sous le coup de poursuites au titre du liberticide article 301,
"pour insulte a l'identite turque", comme Rober Koptas, redacteur en
chef du journal armenien de Turquie Agos, l'ecrivain Umit Kivanc et
le journaliste Temel Demirer.
Il est temps que la France, qui semble avoir abdique sur le terrain
de la defense des droits de l'homme en Turquie, trouve le courage
d'affronter ceux qui pietinent l'idee meme de democratie. Elle se
doit d'apporter son soutien a ces femmes et ces hommes d'exception :
ils representent le seul avenir possible pour un pays qui n'arrive
toujours pas a se defaire de ses tentations totalitaires.
Signataires :
Seta Papazian, Presidente du Collectif VAN [Vigilance Armenienne
contre le Negationnisme], Benjamin Abtan, President du Mouvement
Antiraciste Europeen EGAM (European Grassroots Antiracist Movement),
Catherine Coquio [Professeur de litterature a Paris 7], Aircrige-Paris
[Association internationale de recherche sur les crimes contre
l'humanite et les genocides], Serge Klarsfeld, Memorial 98,
Meïr Waintrater, Yves Ternon [Historien], Seve Izouli-Aydin
[Avocate], Frederic Encel [Politologue], Etienne Copeaux [Historien
de la Turquie], Claire Mauss-Copeaux [Historienne], Erol Ozkoray
[Ecrivain-journaliste - Istanbul/Turquie], Dogan Ozguden [Journaliste -
Bruxelles/Belgique], Inci Tugsavul [Journaliste - Bruxelles/Belgique],
Jacques Berès [President de France Syrie Democratie], Bernard Schalscha
[Secretaire general de France Syrie Democratie], MPCT [Mouvement
Pour la Paix et Contre le Terrorisme], Andre Metayer [President
d'Amities kurdes de Bretagne], LICRA [Ligue internationale contre
le racisme et l'antisemitisme], Alain David [Bureau executif de la
LICRA, philosophe], Roger W. Smith [Professor of government emeritus,
College of William and Mary, Virginia, USA], Jacky Mamou [President
du CUD - Collectif Urgence Darfour], Alain Gauthier [President du
CPCR - Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda], Appui Rwanda,
Serge Avedikian [Acteur et realisateur], Anne Laine [Cineaste],
Taner Akcam [Historien, Center for Holocaust and Genocide Studies,
Clark University, USA], Marcel Kabanda [President d'Ibuka-France],
Cindy Leoni [Presidente de SOS Racisme], Jonathan Hayoun [President de
l'UEJF - Union des Etudiants Juifs de France], Aline Le Bail-Kremer
[Directrice de la Communication de l'EGAM - European Grassroots
Antiracist Movement].
jeudi 6 juin 2013, Ara ©armenews.com