TURQUIE
Les jeunes, fer de lance de la contestation en Turquie
Leurs parents les croyaient totalement hermétiques à la politique, ils
se sont trompés. Même s'ils rejettent les partis traditionnels, les
jeunes de la génération `capitaliste` constituent le fer de lance des
manifestations contre le gouvernement turc.
Ali vient tout juste de fêter ses 18 ans. Un masque de fortune pour se
protéger du gaz lacrymogène autour du cou, il campe depuis trois jours
avec ses camarades de lycée sur la place Kizilay, le coeur de la
contestation dans la capitale Ankara.
`Nous sommes ici pour protéger nos droits, notre façon de vivre et
pour dire +ça suffit+ au gouvernement fasciste`, proclame fièrement le
jeune homme, qui préfère ne pas donner son nom par peur d'être
inquiété par la police.
Ses parents lui ont catégoriquement interdit d'assister aux
manifestations, raconte en souriant Ali, mais ils ont dû capituler
devant sa détermination.
`Ils ont bien compris que nous ne manifestons pas pour nous amuser
mais pour notre avenir`, dit-il.
`J'appelle quand même ma mère après les charges des flics`, pour
éviter qu'elle vienne `me chercher`....
L'empressement des jeunes à se mobiliser, via les réseaux sociaux,
pour rejoindre un mouvement parti de quelques militants écologistes
stambouliotes opposés à la destruction d'un jardin public a surpris
les sociologues, qui croyaient la génération née dans les années 1990
définitivement vaccinée de la politique.
`Bravo les enfants ! Nous pensions que vous étiez les fruits du
capitalisme, vous avez détruit toutes les idées reçues`, s'est
félicité cette semaine un éditorial du journal libéral à grand tirage
Hürriyet.
Les sondages réalisés auprès des jeunes manifestants qui occupent la
place Taksim d'Istanbul depuis une semaine ont confirmé que, s'ils se
tiennent à distance de la `cuisine` politique turque, ils restent très
intéressés par la `chose publique`.
Espace privé
Une enquête de l'université Bilgi d'Istanbul a montré que 53% des
contestataires n'avaient ainsi jamais participé à un rassemblement
politique de leur vie, 70% n'étant membres d'aucune formation
politique.
Mais 92% d'entre eux affirment que la répression policière et les
restrictions dans leur vie quotidienne imposées par le gouvernement
islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002, souvent dénoncées comme
une islamisation rampante de la Turquie laïque, sont les principales
motivations de leur mobilisation.
`Leur principale revendication, c'est que l'on n'intervienne pas dans
leur espace privé et qu'on les écoute`, explique la sociologue Nilufer
Narli, professeur à l'université de Bahçesehir d'Istanbul, citée par
le quotidien Milliyet. `Tout en s'amusant sur les réseaux sociaux,
cette génération exprime aussi ses opinions politiques`,
ajoute-t-elle.
`Nous nous battons pour nos droits fondamentaux, contre un
gouvernement qui veut contrôler notre vie`, résume Can Dogan, un
étudiant de 23 ans qui participe aux manifestations dans la capitale
turque.
`Nous ne sommes pas une génération d'alcooliques ou de vandales, nous
sommes des citoyens responsables`, renchérit sa compagne, Merve.
Une allusion à de récents propos du Premier ministre Recep Tayyip
Erdogan, qui a qualifié les manifestants d'`extrémistes` et de
`vandales` et tenté de justifier une récente loi limitant la
consommation de boissons alcoolisées par sa volonté de ne pas avoir
`une génération qui titube jour et nuit sous l'emprise de l'alcool`.
`M. Erdogan a misé sur l'économie pour un peu amadouer les masses. Et
il n'a pas mal réussi, la société de consommation bat son plein en
Turquie`, juge Cengiz Aktar, politologue à l'université Bahçesehir.
`Mais il faut croire que la formule qui consiste à dire +consomme et
tais-toi+ a des limites`, ajoute-t-il. `Les gens disent +ça suffit, on
veut aussi des libertés+`.
Une revendication confirmée par Elif Capli, 19 ans, qui bat le pavé à
Ankara. `Même mon père n'intervient pas dans ma vie privée comme le
fait Tayyip (Erdogan)`, lance le jeune homme, issu d'une famille
conservatrice. `De quoi se mêle-t-il ?`
AFP
samedi 8 juin 2013,
Stéphane ©armenews.com
Les jeunes, fer de lance de la contestation en Turquie
Leurs parents les croyaient totalement hermétiques à la politique, ils
se sont trompés. Même s'ils rejettent les partis traditionnels, les
jeunes de la génération `capitaliste` constituent le fer de lance des
manifestations contre le gouvernement turc.
Ali vient tout juste de fêter ses 18 ans. Un masque de fortune pour se
protéger du gaz lacrymogène autour du cou, il campe depuis trois jours
avec ses camarades de lycée sur la place Kizilay, le coeur de la
contestation dans la capitale Ankara.
`Nous sommes ici pour protéger nos droits, notre façon de vivre et
pour dire +ça suffit+ au gouvernement fasciste`, proclame fièrement le
jeune homme, qui préfère ne pas donner son nom par peur d'être
inquiété par la police.
Ses parents lui ont catégoriquement interdit d'assister aux
manifestations, raconte en souriant Ali, mais ils ont dû capituler
devant sa détermination.
`Ils ont bien compris que nous ne manifestons pas pour nous amuser
mais pour notre avenir`, dit-il.
`J'appelle quand même ma mère après les charges des flics`, pour
éviter qu'elle vienne `me chercher`....
L'empressement des jeunes à se mobiliser, via les réseaux sociaux,
pour rejoindre un mouvement parti de quelques militants écologistes
stambouliotes opposés à la destruction d'un jardin public a surpris
les sociologues, qui croyaient la génération née dans les années 1990
définitivement vaccinée de la politique.
`Bravo les enfants ! Nous pensions que vous étiez les fruits du
capitalisme, vous avez détruit toutes les idées reçues`, s'est
félicité cette semaine un éditorial du journal libéral à grand tirage
Hürriyet.
Les sondages réalisés auprès des jeunes manifestants qui occupent la
place Taksim d'Istanbul depuis une semaine ont confirmé que, s'ils se
tiennent à distance de la `cuisine` politique turque, ils restent très
intéressés par la `chose publique`.
Espace privé
Une enquête de l'université Bilgi d'Istanbul a montré que 53% des
contestataires n'avaient ainsi jamais participé à un rassemblement
politique de leur vie, 70% n'étant membres d'aucune formation
politique.
Mais 92% d'entre eux affirment que la répression policière et les
restrictions dans leur vie quotidienne imposées par le gouvernement
islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002, souvent dénoncées comme
une islamisation rampante de la Turquie laïque, sont les principales
motivations de leur mobilisation.
`Leur principale revendication, c'est que l'on n'intervienne pas dans
leur espace privé et qu'on les écoute`, explique la sociologue Nilufer
Narli, professeur à l'université de Bahçesehir d'Istanbul, citée par
le quotidien Milliyet. `Tout en s'amusant sur les réseaux sociaux,
cette génération exprime aussi ses opinions politiques`,
ajoute-t-elle.
`Nous nous battons pour nos droits fondamentaux, contre un
gouvernement qui veut contrôler notre vie`, résume Can Dogan, un
étudiant de 23 ans qui participe aux manifestations dans la capitale
turque.
`Nous ne sommes pas une génération d'alcooliques ou de vandales, nous
sommes des citoyens responsables`, renchérit sa compagne, Merve.
Une allusion à de récents propos du Premier ministre Recep Tayyip
Erdogan, qui a qualifié les manifestants d'`extrémistes` et de
`vandales` et tenté de justifier une récente loi limitant la
consommation de boissons alcoolisées par sa volonté de ne pas avoir
`une génération qui titube jour et nuit sous l'emprise de l'alcool`.
`M. Erdogan a misé sur l'économie pour un peu amadouer les masses. Et
il n'a pas mal réussi, la société de consommation bat son plein en
Turquie`, juge Cengiz Aktar, politologue à l'université Bahçesehir.
`Mais il faut croire que la formule qui consiste à dire +consomme et
tais-toi+ a des limites`, ajoute-t-il. `Les gens disent +ça suffit, on
veut aussi des libertés+`.
Une revendication confirmée par Elif Capli, 19 ans, qui bat le pavé à
Ankara. `Même mon père n'intervient pas dans ma vie privée comme le
fait Tayyip (Erdogan)`, lance le jeune homme, issu d'une famille
conservatrice. `De quoi se mêle-t-il ?`
AFP
samedi 8 juin 2013,
Stéphane ©armenews.com