FRANCE
Une première : un membre du gouvernement de l'Artsakh interviewé par
une chaîne de TV en France
France 24
13 juin 2013
L'Entrevue de Karen Mirzoyan Ministre des Affaires Étrangères du
Haut-Karabagh sur France 24
Le conflit non résolu entre l'Azerbaïdjan et les Arméniens
sécessionnistes vivant dans le territoire enclavé du Haut-Karabagh est
souvent qualifié de ` conflit gelé `. Mais tandis que dans la région,
les tensions deviennent de plus en plus fortes, certains craignent
qu'elle ne serve de poudrière pour une guerre plus large à plus grande
échelle. Douglas Herbert demande au Ministre des Affaires étrangères
du Haut-Karabagh s'il craint que nous soyons à la veille d'autres
combats.
Par Douglas Herbert
DH Bonjour et bienvenue sur l'entrevue de France 24. Bien, c'est une
guerre obscure dans une région que vous connaissez peu ou peut-être
même pas du tout, et cependant, le conflit non résolu entre
l'Azerbaïdjan et des Arméniens d'origine sécessionnistes vivant dans
le territoire enclavé nommé Haut-Karabagh, dans le Caucase du sud,
pourrait servir de détonateur à l'éclatement d'un conflit régional
plus étendu. Alors qu'à la suite de la chute de l'Union Soviétique il
y a plus de vingt ans, se soit allumée dans la région cette guerre
sanglante, que beaucoup, hors du Haut-Karabagh, qualifient de `
conflit gelé `, alors que malgré le cessez-le-feu, fragile, des
dizaines de morts et les blessés continuent, chaque année, et il y a
aussi les centaines de milliers de personnes déplacées au moment de la
guerre initiale, la guerre pourrait passer de l'état larvé à celui de
guerre ouverte. Et si cela se produit, certains craignent que cela
puisse attirer dans le conflit quelques poids lourds régionaux, que
sont la Russie, l'Iran, la Turquie, avec des conséquences
imprévisibles. Mon invité d'aujourd'hui est un homme qui se trouve au
c`ur de cette affaire, essayant de trouver une solution pour ce
conflit. Karen Mirzoyan, merci beaucoup d'être ici. Vous êtes le chef
de la politique étrangère pour le Haut-Karabagh. Vous êtes venu ici en
Europe, vous venez d'arriver à Bruxelles, et vous vous efforcez au
fond de maintenir l'attention des officiels européens sur ce conflit.
Mais je voudrai reprendre quelques détails pour ceux qui savent peu de
choses sur ce conflit. Lorsque cette guerre se déroulait, au début des
années 1990, de 1990 à 1994, c'était vraiment un mouvement tendant à
s'unir à l'Arménie, votre allié proche. Il s'est depuis développé en
un mouvement pour un état souverain indépendant. A ce jour, vous
n'êtes reconnu par aucun des pays des Nations Unies...Pourquoi cela ?
KM D'abord merci pour cette occasion d'être ici avec vous. Oui, notre
mouvement a commencé il y a vingt-cinq ans en 1988 comme un mouvement
exprimant au nom des Arméniens du Karabagh d'être intégrés à la patrie
arménienne, car en Arménie comme au Haut-Karabagh vivent des Arméniens
de la même nation, et il nous apparaissait que vivre ensemble était un
objectif logique. Mais c'était en même temps un mouvement vers le
développement social et humain, le droit de vivre dans la sécurité, le
droit de vivre libre. Au cours de la guerre qui a suivi ce mouvement,
et à la suite de la tournure des événements, nous avons décidé de nous
déclarer indépendants, voyant dans cette indépendance, dans cette
forme d'état, une façon plus à même d'assurer notre sécurité pour
vivre dans la région.
DH Mais lorsque cette décision a été prise, clairement, beaucoup
pensaient dans le mouvement que l'Azerbaïdjan, parce que vous vous
trouvez sur et à l'intérieur du territoire de l'Azerbaïdjan, que
l'Azerbaïdjan s'y opposerait, tout à fait farouchement.
KM Oui. Tout le monde savait que l'Azerbaïdjan s'y opposerait. Mais la
réaction de l'Azerbaïdjan a été excessive. En réponse aux
manifestations, parce que le mouvement a commencé par des
manifestations de jeunes, étudiants, travailleurs, la réponse à ces
manifestations ont été les massacres de citoyens arméniens de
l'Azerbaïdjan et au Haut-Karabagh, à Soumgaït, Bakou, Kirovabad, la
réponse a été une totale agression contre le Haut-Karabagh.
DH Permettez moi de passer à un autre argument. Les critiques diraient
que dans cette guerre, le Haut-Karabagh ne s'est pas arrêté à la prise
de son propre territoire. Il a poussé jusqu'à créer une zone tampon et
chassé des Azerbaïdjanais hors de cette zone tampon. Ces personnes
restent aujourd'hui déplacées et cette zone tampon, aujourd'hui, est
un lieu ou on a encore chaque années des dizaines de morts et de
blessés. Ce n'est pas cela, un conflit gelé.
KM Écoutez, ces territoires pris par l'armée de défense du Karabagh,
n'étaient pas libérés simplement pour prendre un quelconque
territoire, le seul but était de créer une zone tampon, afin d'assurer
aux habitants du Karabagh la possibilité de vivre dans la sécurité.
DH Qui vit aujourd'hui dans cette zone tampon ?
KM Aujourd'hui, évidemment la zone tampon n'est pas habitée comme elle
l'était... mais quelques familles de réfugiées y sont venues, parce
qu'elles n'ont d'autres endroit où aller. Écoutez, c'est une situation
étrange. Aujourd'hui tout le monde parle des réfugiés azerbaïdjanais
de l'Arménie, mais personne ne vous parlera des réfugiés arméniens de
Bakou et de nombreux autres endroits d'Azerbaïdjan, et de personnes
qui ont été chassées de certaines zones du Karabagh à cause de la
guerre.
DH Je dois vous demander...je comprends ce que vous dites à propos du
Haut-Karabagh en tant qu'état souverain, peuplé d'Arméniens si ce
n'est exclusivement d'Arméniens. Y a-t-il une possibilité que des
Azerbaïdjanais reviennent ? Des mesures sont-elles prises pour créer
afin qu'ils aient la possibilité de vivre, en harmonie, avec des
Arméniens sur ce territoire ?
KM Écoutez ! Tout le monde comprend que tôt ou tard, nous parviendrons
à un accord quel qu'il soit, et deux états indépendants, le
Haut-Karabagh et l'Azerbaïdjan coexisteront librement et paisiblement
l'un à côté de l'autre...
DH Mais il y avait un processus de paix constitué au sein du groupe de
Minsk dirigé par l'OCDE [l'OSCE, NdT] qui se trouve dans une voire de
garage. Il semble que les deux camps soient campés sur leurs positions
et refusent d'autres concessions.
KM Écoutez, le processus de paix du groupe de Minsk, dirigé par un
ensemble de coprésidents, la Russie, les États-Unis et la France,
avait commencé sur des tentatives de rapprocher trois parties au
conflit. Les deux partie les plus concernées dans ce conflit étaient
le Haut-Karabagh et l'Azerbaïdjan...
DH ce sont les deux protagonistes comme ils disent...
KM c'est cela. Et plus tard, l'Arménie a été concernée.
Malheureusement, à la fin des années 90, la situation a été changée,
et le Haut-Karabagh a été retiré hors du processus des négociations.
Nous y avons toujours notre place, mais nous ne sommes pas un membre,
pas un membre actif au processus de négociations, nous ne sommes pas à
la table des négociations. Nous pensons que c'est la cause de la
situation présente, de l'impasse actuelle.
DH Vous dites donc que sans que vous y soyez, il n'est pas possible de
résoudre ce problème, sans que vous soyez à la table des négociations,
aucune solution ne peu être trouvée.
KM Je dis que si nous nous y trouvions, nous serions prêts à
travailler pour trouver une solution.
DH Comme je l'ai mentionné au début, dans la région où se trouve le
Haut-Karabagh, vous êtes entourés de la Russie, la Turquie, l'Iran,
l'Arménie, l'Azer..., et c'est une région de convergence. Et dans le
cas d'une guerre plus étendue, chacun semble avoir ses alliés ; la
Russie semble soutenir l'Arménie, la Turquie et l'Azerbaïdjan sont
alliés, on ne voit pas très bien qui l'Iran pourrait soutenir. En
êtes-vous préoccupé ?
KM Pour nous la guerre n'est pas une solution pour ce conflit. Cela
serait une catastrophe pour tous le monde. Pour les petits pays et
pour les grands. Ce serait pour nous une catastrophe car nous sommes
attachés à construire un état sur et prospère.
DH Que vous ne pouvez pas construire pour l'instant n'est-ce pas ? Le
développement économique de la région est en réalité proche de zéro.
KM Non, non, je crains que non. L'an passé, nous avons franchi
quelques étapes dans la croissance de notre économie. Les indicateurs
macro-économiques indiquent que dans les trois années écoulées, la
croissance a atteint neuf à dix pourcent, et s'est déroulée de façon
satisfaisante...
DH Vous n'avez pas de pétrole, comme l'Azerbaïdjan...
KM Nous n'avons pas de pétrole, mais nous avons une industrie minière,
une industrie de l'énergie, une agriculture, et nous efforçons de nous
diversifier dans des nouvelles hautes technologies...
DH Certains diront qu'il y a du chemin à parcourir. Comme responsable
de la politique étrangère du Karabagh, voyez-vous quelquefois la
situation comme la partie importante jouée naguère. Les États-Unis
pouvant dire, dans cette région, notre allié naturel est peut-être
l'Azerbaïdjan : il y a la mer Caspienne, il y a les champs
pétrolifères, il se rangeront du côté de l'Azerbaïdjan, pensez vous
quelquefois que c'est une guerre perdue ?
KM Écoutez. Nous nous efforçons d'avoir des bonnes relations avec tous
les pays. Nous avons de très bonnes relations avec la Russie ce qui
est pour nous fondamental parce que nous avons des liens historiques
depuis très longtemps avec la Russie et qu'elle est très présente dans
la région. Nous avons de très bonnes relations avec la France comme le
démontre ma présence ici, et nous nous efforçons d'avoir de bonnes
relations avec les USA. Notre objectif n'est pas d'organiser la
confrontation entre les pays. Notre but est de favoriser la recherche
de solutions communes.
DH Il ya actuellement de nouvelles générations au Karabagh. Quelques
unes n'ont connu dans leur vie entière que la situation créée par ce
conflit. Que leur dites-vous. Voyez-vous les possibilités d'une paix
prochaine ?
KM C'est cela que je souhaite. Et c'est à cela que nous travaillons
tous les jours très consciencieusement. Aujourd'hui, les frontières du
Haut-Karabagh sont gardées par des jeunes qui n'ont jamais vu d'Azéris
de toute leur vie, et pour eux les Azéris sont des gens qui vivent de
l'autre côté de la frontière. Notre but, c'est de faire rencontrer ces
personnes, c'est d'organiser leur coexistence.
DH Et vous ne pouvez envisager aucune perspective, il faut que je vous
pose cette question, d'être peut-être une partie de l'Azerbaïdjan à
nouveau ?
KM Nous avons des perspectives et des espoirs mais, sans faire de
propagande, mais je crois qu'avant toute chose, l'Azerbaïdjan doit
changer sa posture, sa position...
DH Le président de l'Azerbaïdjan...
KM ... l'Azerbaïdjan fait partie de ces pays qui cultivent la
xénophobie et la haine de tout ce qui est arménien. Aujourd'hui dire
en Azerbaïdjan quoique ce soit de positif envers l'Arménie est
interdit, strictement. L'Azerbaïdjan est un pays qui fait un héros
national d'un tueur à la hache.
DH Je pense qu'on pourrait ouvrir sur ce point la boîte qu'on appelle
ici boîte de Pandore, pour d'autres questions, probablement pendant
toute une journée mais je pense que votre contradicteur azerbaïdjanais
aimerait répondre à ce dernier commentaire... Mais il faut que je
mette un terme à cette séquence. C'est une région très compliquée je
pense que vous avez participé à mieux comprendre. C'était Karen
Mirzoyan, le responsable des Affaires étrangères du Haut-Karabagh, une
région de conflit encore non résolu avec l'Azerbaïdjan, et... la paix
est peut-être trompeuse. Une solution sera-t-elle trouvée ? Nous
verrons. Merci.
http://www.france24.com/en/20130612-interview-karen-mirzoyan-armenia-azerbaijan-nagorno-karabakh-war-sarkissian-sahakian-aliyev
samedi 15 juin 2013,
Stéphane ©armenews.com
Une première : un membre du gouvernement de l'Artsakh interviewé par
une chaîne de TV en France
France 24
13 juin 2013
L'Entrevue de Karen Mirzoyan Ministre des Affaires Étrangères du
Haut-Karabagh sur France 24
Le conflit non résolu entre l'Azerbaïdjan et les Arméniens
sécessionnistes vivant dans le territoire enclavé du Haut-Karabagh est
souvent qualifié de ` conflit gelé `. Mais tandis que dans la région,
les tensions deviennent de plus en plus fortes, certains craignent
qu'elle ne serve de poudrière pour une guerre plus large à plus grande
échelle. Douglas Herbert demande au Ministre des Affaires étrangères
du Haut-Karabagh s'il craint que nous soyons à la veille d'autres
combats.
Par Douglas Herbert
DH Bonjour et bienvenue sur l'entrevue de France 24. Bien, c'est une
guerre obscure dans une région que vous connaissez peu ou peut-être
même pas du tout, et cependant, le conflit non résolu entre
l'Azerbaïdjan et des Arméniens d'origine sécessionnistes vivant dans
le territoire enclavé nommé Haut-Karabagh, dans le Caucase du sud,
pourrait servir de détonateur à l'éclatement d'un conflit régional
plus étendu. Alors qu'à la suite de la chute de l'Union Soviétique il
y a plus de vingt ans, se soit allumée dans la région cette guerre
sanglante, que beaucoup, hors du Haut-Karabagh, qualifient de `
conflit gelé `, alors que malgré le cessez-le-feu, fragile, des
dizaines de morts et les blessés continuent, chaque année, et il y a
aussi les centaines de milliers de personnes déplacées au moment de la
guerre initiale, la guerre pourrait passer de l'état larvé à celui de
guerre ouverte. Et si cela se produit, certains craignent que cela
puisse attirer dans le conflit quelques poids lourds régionaux, que
sont la Russie, l'Iran, la Turquie, avec des conséquences
imprévisibles. Mon invité d'aujourd'hui est un homme qui se trouve au
c`ur de cette affaire, essayant de trouver une solution pour ce
conflit. Karen Mirzoyan, merci beaucoup d'être ici. Vous êtes le chef
de la politique étrangère pour le Haut-Karabagh. Vous êtes venu ici en
Europe, vous venez d'arriver à Bruxelles, et vous vous efforcez au
fond de maintenir l'attention des officiels européens sur ce conflit.
Mais je voudrai reprendre quelques détails pour ceux qui savent peu de
choses sur ce conflit. Lorsque cette guerre se déroulait, au début des
années 1990, de 1990 à 1994, c'était vraiment un mouvement tendant à
s'unir à l'Arménie, votre allié proche. Il s'est depuis développé en
un mouvement pour un état souverain indépendant. A ce jour, vous
n'êtes reconnu par aucun des pays des Nations Unies...Pourquoi cela ?
KM D'abord merci pour cette occasion d'être ici avec vous. Oui, notre
mouvement a commencé il y a vingt-cinq ans en 1988 comme un mouvement
exprimant au nom des Arméniens du Karabagh d'être intégrés à la patrie
arménienne, car en Arménie comme au Haut-Karabagh vivent des Arméniens
de la même nation, et il nous apparaissait que vivre ensemble était un
objectif logique. Mais c'était en même temps un mouvement vers le
développement social et humain, le droit de vivre dans la sécurité, le
droit de vivre libre. Au cours de la guerre qui a suivi ce mouvement,
et à la suite de la tournure des événements, nous avons décidé de nous
déclarer indépendants, voyant dans cette indépendance, dans cette
forme d'état, une façon plus à même d'assurer notre sécurité pour
vivre dans la région.
DH Mais lorsque cette décision a été prise, clairement, beaucoup
pensaient dans le mouvement que l'Azerbaïdjan, parce que vous vous
trouvez sur et à l'intérieur du territoire de l'Azerbaïdjan, que
l'Azerbaïdjan s'y opposerait, tout à fait farouchement.
KM Oui. Tout le monde savait que l'Azerbaïdjan s'y opposerait. Mais la
réaction de l'Azerbaïdjan a été excessive. En réponse aux
manifestations, parce que le mouvement a commencé par des
manifestations de jeunes, étudiants, travailleurs, la réponse à ces
manifestations ont été les massacres de citoyens arméniens de
l'Azerbaïdjan et au Haut-Karabagh, à Soumgaït, Bakou, Kirovabad, la
réponse a été une totale agression contre le Haut-Karabagh.
DH Permettez moi de passer à un autre argument. Les critiques diraient
que dans cette guerre, le Haut-Karabagh ne s'est pas arrêté à la prise
de son propre territoire. Il a poussé jusqu'à créer une zone tampon et
chassé des Azerbaïdjanais hors de cette zone tampon. Ces personnes
restent aujourd'hui déplacées et cette zone tampon, aujourd'hui, est
un lieu ou on a encore chaque années des dizaines de morts et de
blessés. Ce n'est pas cela, un conflit gelé.
KM Écoutez, ces territoires pris par l'armée de défense du Karabagh,
n'étaient pas libérés simplement pour prendre un quelconque
territoire, le seul but était de créer une zone tampon, afin d'assurer
aux habitants du Karabagh la possibilité de vivre dans la sécurité.
DH Qui vit aujourd'hui dans cette zone tampon ?
KM Aujourd'hui, évidemment la zone tampon n'est pas habitée comme elle
l'était... mais quelques familles de réfugiées y sont venues, parce
qu'elles n'ont d'autres endroit où aller. Écoutez, c'est une situation
étrange. Aujourd'hui tout le monde parle des réfugiés azerbaïdjanais
de l'Arménie, mais personne ne vous parlera des réfugiés arméniens de
Bakou et de nombreux autres endroits d'Azerbaïdjan, et de personnes
qui ont été chassées de certaines zones du Karabagh à cause de la
guerre.
DH Je dois vous demander...je comprends ce que vous dites à propos du
Haut-Karabagh en tant qu'état souverain, peuplé d'Arméniens si ce
n'est exclusivement d'Arméniens. Y a-t-il une possibilité que des
Azerbaïdjanais reviennent ? Des mesures sont-elles prises pour créer
afin qu'ils aient la possibilité de vivre, en harmonie, avec des
Arméniens sur ce territoire ?
KM Écoutez ! Tout le monde comprend que tôt ou tard, nous parviendrons
à un accord quel qu'il soit, et deux états indépendants, le
Haut-Karabagh et l'Azerbaïdjan coexisteront librement et paisiblement
l'un à côté de l'autre...
DH Mais il y avait un processus de paix constitué au sein du groupe de
Minsk dirigé par l'OCDE [l'OSCE, NdT] qui se trouve dans une voire de
garage. Il semble que les deux camps soient campés sur leurs positions
et refusent d'autres concessions.
KM Écoutez, le processus de paix du groupe de Minsk, dirigé par un
ensemble de coprésidents, la Russie, les États-Unis et la France,
avait commencé sur des tentatives de rapprocher trois parties au
conflit. Les deux partie les plus concernées dans ce conflit étaient
le Haut-Karabagh et l'Azerbaïdjan...
DH ce sont les deux protagonistes comme ils disent...
KM c'est cela. Et plus tard, l'Arménie a été concernée.
Malheureusement, à la fin des années 90, la situation a été changée,
et le Haut-Karabagh a été retiré hors du processus des négociations.
Nous y avons toujours notre place, mais nous ne sommes pas un membre,
pas un membre actif au processus de négociations, nous ne sommes pas à
la table des négociations. Nous pensons que c'est la cause de la
situation présente, de l'impasse actuelle.
DH Vous dites donc que sans que vous y soyez, il n'est pas possible de
résoudre ce problème, sans que vous soyez à la table des négociations,
aucune solution ne peu être trouvée.
KM Je dis que si nous nous y trouvions, nous serions prêts à
travailler pour trouver une solution.
DH Comme je l'ai mentionné au début, dans la région où se trouve le
Haut-Karabagh, vous êtes entourés de la Russie, la Turquie, l'Iran,
l'Arménie, l'Azer..., et c'est une région de convergence. Et dans le
cas d'une guerre plus étendue, chacun semble avoir ses alliés ; la
Russie semble soutenir l'Arménie, la Turquie et l'Azerbaïdjan sont
alliés, on ne voit pas très bien qui l'Iran pourrait soutenir. En
êtes-vous préoccupé ?
KM Pour nous la guerre n'est pas une solution pour ce conflit. Cela
serait une catastrophe pour tous le monde. Pour les petits pays et
pour les grands. Ce serait pour nous une catastrophe car nous sommes
attachés à construire un état sur et prospère.
DH Que vous ne pouvez pas construire pour l'instant n'est-ce pas ? Le
développement économique de la région est en réalité proche de zéro.
KM Non, non, je crains que non. L'an passé, nous avons franchi
quelques étapes dans la croissance de notre économie. Les indicateurs
macro-économiques indiquent que dans les trois années écoulées, la
croissance a atteint neuf à dix pourcent, et s'est déroulée de façon
satisfaisante...
DH Vous n'avez pas de pétrole, comme l'Azerbaïdjan...
KM Nous n'avons pas de pétrole, mais nous avons une industrie minière,
une industrie de l'énergie, une agriculture, et nous efforçons de nous
diversifier dans des nouvelles hautes technologies...
DH Certains diront qu'il y a du chemin à parcourir. Comme responsable
de la politique étrangère du Karabagh, voyez-vous quelquefois la
situation comme la partie importante jouée naguère. Les États-Unis
pouvant dire, dans cette région, notre allié naturel est peut-être
l'Azerbaïdjan : il y a la mer Caspienne, il y a les champs
pétrolifères, il se rangeront du côté de l'Azerbaïdjan, pensez vous
quelquefois que c'est une guerre perdue ?
KM Écoutez. Nous nous efforçons d'avoir des bonnes relations avec tous
les pays. Nous avons de très bonnes relations avec la Russie ce qui
est pour nous fondamental parce que nous avons des liens historiques
depuis très longtemps avec la Russie et qu'elle est très présente dans
la région. Nous avons de très bonnes relations avec la France comme le
démontre ma présence ici, et nous nous efforçons d'avoir de bonnes
relations avec les USA. Notre objectif n'est pas d'organiser la
confrontation entre les pays. Notre but est de favoriser la recherche
de solutions communes.
DH Il ya actuellement de nouvelles générations au Karabagh. Quelques
unes n'ont connu dans leur vie entière que la situation créée par ce
conflit. Que leur dites-vous. Voyez-vous les possibilités d'une paix
prochaine ?
KM C'est cela que je souhaite. Et c'est à cela que nous travaillons
tous les jours très consciencieusement. Aujourd'hui, les frontières du
Haut-Karabagh sont gardées par des jeunes qui n'ont jamais vu d'Azéris
de toute leur vie, et pour eux les Azéris sont des gens qui vivent de
l'autre côté de la frontière. Notre but, c'est de faire rencontrer ces
personnes, c'est d'organiser leur coexistence.
DH Et vous ne pouvez envisager aucune perspective, il faut que je vous
pose cette question, d'être peut-être une partie de l'Azerbaïdjan à
nouveau ?
KM Nous avons des perspectives et des espoirs mais, sans faire de
propagande, mais je crois qu'avant toute chose, l'Azerbaïdjan doit
changer sa posture, sa position...
DH Le président de l'Azerbaïdjan...
KM ... l'Azerbaïdjan fait partie de ces pays qui cultivent la
xénophobie et la haine de tout ce qui est arménien. Aujourd'hui dire
en Azerbaïdjan quoique ce soit de positif envers l'Arménie est
interdit, strictement. L'Azerbaïdjan est un pays qui fait un héros
national d'un tueur à la hache.
DH Je pense qu'on pourrait ouvrir sur ce point la boîte qu'on appelle
ici boîte de Pandore, pour d'autres questions, probablement pendant
toute une journée mais je pense que votre contradicteur azerbaïdjanais
aimerait répondre à ce dernier commentaire... Mais il faut que je
mette un terme à cette séquence. C'est une région très compliquée je
pense que vous avez participé à mieux comprendre. C'était Karen
Mirzoyan, le responsable des Affaires étrangères du Haut-Karabagh, une
région de conflit encore non résolu avec l'Azerbaïdjan, et... la paix
est peut-être trompeuse. Une solution sera-t-elle trouvée ? Nous
verrons. Merci.
http://www.france24.com/en/20130612-interview-karen-mirzoyan-armenia-azerbaijan-nagorno-karabakh-war-sarkissian-sahakian-aliyev
samedi 15 juin 2013,
Stéphane ©armenews.com