L'INFLUENCE DE L'ARGENT ROI, PAR ARA TORANIAN
" Mon seul adversaire, celui de la France, n'a jamais cesse d'etre
l'argent ", a dit le general De Gaulle 42 ans avant que Francois
Hollande ne lui emboîte le pas en declarant " mon adversaire c'est le
monde de la finance ". Mais que valent aujourd'hui ces proclamations
de foi ? Dans un monde qui s'enfonce dans la crise, les valeurs
materielles tendent irresistiblement a l'emporter sur celles des grands
ideaux. Et a mesure qu'avance cet " adversaire " designe, une certaine
France s'affaiblit. Ce renforcement du poids de l'economie sur la
decision politique dont on constate les ravages dans bien des domaines
pèse evidemment sur l'Armenie rongee par la corruption. Mais il n'est
pas sans consequence non plus sur la cause armenienne. Les Etats
turcs et azerbaïdjanais, dont les revenus sont en hausse constante,
ont bien compris le benefice politique qu'ils pouvaient tirer de cette
conjoncture. On en a mesure en France les dommages l'an dernier avec
l'action de l'Institut du Bosphore, dont les renes sont tenus par le
president d'AXA, l'un des decideurs du CAC quarante. Ce lobby mis en
place par Ankara a en effet reussi a mobiliser suffisamment d'elus
pour faire invalider la loi Boyer, laissant ainsi les Armeniens sans
protection legale face au negationnisme et fragilisant les defenses
de la societe vis-a-vis de ce fleau.
Mais ce n'est pas tout. La croisade antiarmenienne de ce lobbying
deja fort puissant en terme de moyens est en train de recevoir
l'appui du regime Aliev qui se pique d'interferer lui aussi dans la
politique francaise. Dans un article paru fin fevrier sur Eurasianet,
le journaliste Regis Gente, fait un parallèle evocateur entre les
subventions culturelles octroyees par Bakou a un certain nombre
de localites francaises et le positionnement pro-regime Aliev de
leurs elus. Il relève ainsi avec ironie la coïncidence entre les
investissements de Bakou dans l'eglise de la charmante commune
de Bellou-sur-Huisne dans l'Orne, dans la cathedrale Notre-Dame
de Strasbourg, ou dans le centre culturel azerbaïdjanais du VIIe
arrondissement de Paris (60 millions d'Euros), et les prises de
position pro-azeries de Nathalie Goulet, Jean-Marie Bockel et Rachida
Dati, les elus respectifs de ces circonscriptions choyees par l'argent
du petrole. Cette logique on la retrouve egalement dans le recent
rapprochement entre Paris et Ankara. Il n'aura echappe en effet a
personne que l'accord francais sur l'ouverture d'un nouveau chapitre
de negociations entre l'Europe et la Turquie est intervenue dans la
foulee du voyage dans ce pays de Nicole Bricq, ministre du Commerce
exterieur. Et qu'un certain nombre d'annonces politico-commerciales
ont ete faites, a la faveur de ce voyage.
La France n'est naturellement pas la seule concernee par les deals de
nature politico-economiques dans lesquels se compromettent les Etat
deficitaires et que promeuvent ceux qui pataugeant dans la corruption.
Le Mexique a fait les frais il y a quelques mois de ce type
d'experience, avec l'erection commanditee par Bakou d'une statue
a la gloire d'Heydar Aliev, le dictateur azerbaïdjanais, a côte de
celles de Gandhi ou d'Abraham Lincoln, sur une des places les plus
prestigieuses de sa capitale. Il aura fallu la mobilisation des ONG
et des intellectuels locaux pour obtenir son deboulonnage.
Ces situations ne sont pas sans poser des problèmes en terme d'ethique
et de democratie. En France, elles pèsent incontestablement sur la "
part armenienne " du pays. Par les effets pervers d'une mondialisation
non maîtrisee, notre communaute se voit confrontee, la meme où elle a
trouve refuge, a ces memes haines qui l'avaient contrainte autrefois a
fuir sa terre, celle de ses ancetres. Mais ce n'est pas tout, ce retour
des fantômes du passe exacerbe une autre crainte, plus generale. Celle
de voir les mecanismes de la democratie finir par ceder a l'emprise de
l'argent roi. Ainsi, dans ce rapport d'influence inherent au processus
europeen, ce ne serait pas les Etats occidentaux qui feraient venir
a leurs principes communs un Etat structurellement negationniste,
mais celui-ci qui, de marchandages en passe-droits imposes, finirait
par deteindre sur ceux qu'elle embrasse pour mieux les etouffer. Et
il ne s'agit pas d'un cauchemar armenien. Les authentiques democrates
turcs et les amoureux de ce pays denoncent ces encouragements donnes
au regime Erdogan, alors que tous les voyants relatifs aux droits de
l'homme virent au rouge. Alors, comment expliquer ce non-sens ? Un
miracle de la democratie ou de la corruption ?
Ara Toranian
jeudi 28 fevrier 2013, Ara ©armenews.com
From: Baghdasarian
" Mon seul adversaire, celui de la France, n'a jamais cesse d'etre
l'argent ", a dit le general De Gaulle 42 ans avant que Francois
Hollande ne lui emboîte le pas en declarant " mon adversaire c'est le
monde de la finance ". Mais que valent aujourd'hui ces proclamations
de foi ? Dans un monde qui s'enfonce dans la crise, les valeurs
materielles tendent irresistiblement a l'emporter sur celles des grands
ideaux. Et a mesure qu'avance cet " adversaire " designe, une certaine
France s'affaiblit. Ce renforcement du poids de l'economie sur la
decision politique dont on constate les ravages dans bien des domaines
pèse evidemment sur l'Armenie rongee par la corruption. Mais il n'est
pas sans consequence non plus sur la cause armenienne. Les Etats
turcs et azerbaïdjanais, dont les revenus sont en hausse constante,
ont bien compris le benefice politique qu'ils pouvaient tirer de cette
conjoncture. On en a mesure en France les dommages l'an dernier avec
l'action de l'Institut du Bosphore, dont les renes sont tenus par le
president d'AXA, l'un des decideurs du CAC quarante. Ce lobby mis en
place par Ankara a en effet reussi a mobiliser suffisamment d'elus
pour faire invalider la loi Boyer, laissant ainsi les Armeniens sans
protection legale face au negationnisme et fragilisant les defenses
de la societe vis-a-vis de ce fleau.
Mais ce n'est pas tout. La croisade antiarmenienne de ce lobbying
deja fort puissant en terme de moyens est en train de recevoir
l'appui du regime Aliev qui se pique d'interferer lui aussi dans la
politique francaise. Dans un article paru fin fevrier sur Eurasianet,
le journaliste Regis Gente, fait un parallèle evocateur entre les
subventions culturelles octroyees par Bakou a un certain nombre
de localites francaises et le positionnement pro-regime Aliev de
leurs elus. Il relève ainsi avec ironie la coïncidence entre les
investissements de Bakou dans l'eglise de la charmante commune
de Bellou-sur-Huisne dans l'Orne, dans la cathedrale Notre-Dame
de Strasbourg, ou dans le centre culturel azerbaïdjanais du VIIe
arrondissement de Paris (60 millions d'Euros), et les prises de
position pro-azeries de Nathalie Goulet, Jean-Marie Bockel et Rachida
Dati, les elus respectifs de ces circonscriptions choyees par l'argent
du petrole. Cette logique on la retrouve egalement dans le recent
rapprochement entre Paris et Ankara. Il n'aura echappe en effet a
personne que l'accord francais sur l'ouverture d'un nouveau chapitre
de negociations entre l'Europe et la Turquie est intervenue dans la
foulee du voyage dans ce pays de Nicole Bricq, ministre du Commerce
exterieur. Et qu'un certain nombre d'annonces politico-commerciales
ont ete faites, a la faveur de ce voyage.
La France n'est naturellement pas la seule concernee par les deals de
nature politico-economiques dans lesquels se compromettent les Etat
deficitaires et que promeuvent ceux qui pataugeant dans la corruption.
Le Mexique a fait les frais il y a quelques mois de ce type
d'experience, avec l'erection commanditee par Bakou d'une statue
a la gloire d'Heydar Aliev, le dictateur azerbaïdjanais, a côte de
celles de Gandhi ou d'Abraham Lincoln, sur une des places les plus
prestigieuses de sa capitale. Il aura fallu la mobilisation des ONG
et des intellectuels locaux pour obtenir son deboulonnage.
Ces situations ne sont pas sans poser des problèmes en terme d'ethique
et de democratie. En France, elles pèsent incontestablement sur la "
part armenienne " du pays. Par les effets pervers d'une mondialisation
non maîtrisee, notre communaute se voit confrontee, la meme où elle a
trouve refuge, a ces memes haines qui l'avaient contrainte autrefois a
fuir sa terre, celle de ses ancetres. Mais ce n'est pas tout, ce retour
des fantômes du passe exacerbe une autre crainte, plus generale. Celle
de voir les mecanismes de la democratie finir par ceder a l'emprise de
l'argent roi. Ainsi, dans ce rapport d'influence inherent au processus
europeen, ce ne serait pas les Etats occidentaux qui feraient venir
a leurs principes communs un Etat structurellement negationniste,
mais celui-ci qui, de marchandages en passe-droits imposes, finirait
par deteindre sur ceux qu'elle embrasse pour mieux les etouffer. Et
il ne s'agit pas d'un cauchemar armenien. Les authentiques democrates
turcs et les amoureux de ce pays denoncent ces encouragements donnes
au regime Erdogan, alors que tous les voyants relatifs aux droits de
l'homme virent au rouge. Alors, comment expliquer ce non-sens ? Un
miracle de la democratie ou de la corruption ?
Ara Toranian
jeudi 28 fevrier 2013, Ara ©armenews.com
From: Baghdasarian