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L'expulsion des Allemands après la IIe Guerre mondiale

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  • L'expulsion des Allemands après la IIe Guerre mondiale

    L'expulsion des Allemands après la IIe Guerre mondiale

    http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=71806
    Publié le : 04-03-2013


    Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - « En décembre 1944,
    Winston Churchill annonça devant une Chambre des Communes abasourdie
    que les Alliés avaient résolu d'entreprendre le plus vaste transfert
    forcé de population ` Ã savoir, ce qui, de nos jours, est qualifié de
    « purification ethnique » - dans l'histoire humaine. Des millions de
    civils vivant dans les provinces allemandes orientales, destinées Ã
    être restituées à la Pologne après la guerre, devaient être expulsés
    et déposés parmi les ruines de l'ancien Reich. Au milieu de l'année
    1945, non seulement la migration forcée la plus vaste, mais
    probablement le mouvement de population le plus grand dans l'histoire
    humaine était en cours, une opération qui se poursuivit durant les
    cinq années suivantes. Entre 12 et 14 millions de civils, dans leur
    écrasante majorité des femmes, des enfants et des personnes gées,
    furent chassés de leurs foyers ou, dans le cas où ils avaient déjà fui
    l'avancée de l'Armée Rouge durant les derniers jours de la guerre,
    empêchés par la force d'y revenir. Il importe de garder à l'esprit
    qu'aucune comparaison valable ne saurait être établie entre
    l'expulsion des Allemands et les atrocités bien plus grandes dont se
    rendit responsable l'Allemagne nazie. Toutes propositions contraires `
    y compris celles avancées par les expulsés eux-mêmes ` sont à la fois
    choquantes et historiquement fausses. » Le Collectif VAN vous présente
    un article traduit le 2 mars 2013 par Georges Festa pour le site
    "Armenian Trends - Mes Arménies", d'après un article en anglais de R.
    M. Douglas publié sur le site The Huffington Post.

    Photo: © Yale University Press, 2012


    Armenian Trends - Mes Arménies

    samedi 2 mars 2013

    R. M. Douglas - Orderly and Humane : The Expulsion of the Germans
    after the Second World War / Ordonnée et humaine : l'expulsion des
    Allemands après la Seconde Guerre mondiale

    L'expulsion des Allemands : la migration forcée la plus vaste dans l'Histoire

    par R. M. Douglas

    The Huffington Post, 25.08.2012

    En décembre 1944, Winston Churchill annonça devant une Chambre des
    Communes abasourdie que les Alliés avaient résolu d'entreprendre le
    plus vaste transfert forcé de population ` Ã savoir, ce qui, de nos
    jours, est qualifié de « purification ethnique » - dans l'histoire
    humaine.

    Des millions de civils vivant dans les provinces allemandes
    orientales, destinées à être restituées à la Pologne après la guerre,
    devaient être expulsés et déposés parmi les ruines de l'ancien Reich,
    Ã charge pour eux de se débrouiller comme ils le pourraient. Le
    Premier ministre ne mcha pas ses mots. Ce qui est prévu, déclara-t-il
    tout de go, c'est « l'expulsion totale des Allemands [¦] Car
    l'expulsion est la méthode qui, autant qu'il nous a semblé, sera la
    plus satisfaisante et durable. »

    Cette révélation du Premier ministre alarma certains commentateurs,
    qui rappelèrent que dix-huit mois plus tôt seulement, son gouvernement
    avait fait cette promesse : « Qu'il soit bien clair dans le monde
    entier que jamais les Anglais ne chercheront vengeance au moyen de
    représailles en masse contre le peuple allemand dans son ensemble ! »

    Aux Etats-Unis, des sénateurs demandèrent à savoir quand la Charte
    Atlantique, une déclaration des objectifs de guerre anglo-américains
    qui affirmait l'opposition des deux pays à « des changements
    territoriaux qui ne s'accordent pas avec les souhaits librement
    exprimés de la population concernée », fut abandonnée. Dénonçant la
    proposition de Churchill comme un « crime énorme », George Orwell se
    rassura à la pensée qu'une politique aussi extrême « ne peut dans les
    faits être mise en Å`uvre, quand bien même elle débuterait, vu le
    chaos, les souffrances et le germe de haines irréconciliables qui en
    résulteraient. »

    Orwell sous-estimait grandement la détermination et la portée des
    plans des dirigeants alliés. Ni lui ni personne ne savait qu'outre le
    déplacement de 7 Ã 8 millions d'Allemands d'Europe Orientale,
    Churchill, le président des Etats-Unis Franklin D. Roosevelt et le
    dirigeant soviétique Joseph Staline avaient déjà convenu d'une
    déportation pareillement « ordonnée et humaine » de plus de 3 millions
    de germanophones ` les « Allemands des Sudètes » - de leurs foyers en
    Tchécoslovaquie. Ils ajouteraient bientôt à cette liste le demi
    million d'habitants d'origine allemande en Hongrie.

    Bien que les gouvernements de Yougoslavie et de Roumanie ne furent
    jamais autorisés par les Trois Grands à déporter leurs minorités
    allemandes, tous deux profitèrent de la situation pour les expulser
    aussi.

    Au milieu de l'année 1945, non seulement la migration forcée la plus
    vaste, mais probablement le mouvement de population le plus grand dans
    l'histoire humaine était en cours, une opération qui se poursuivit
    durant les cinq années suivantes. Entre 12 et 14 millions de civils,
    dans leur écrasante majorité des femmes, des enfants et des personnes
    gées, furent chassés de leurs foyers ou, dans le cas où ils avaient
    déjà fui l'avancée de l'Armée Rouge durant les derniers jours de la
    guerre, empêchés par la force d'y revenir.

    Dès le début, ce déplacement en masse fut mis en Å`uvre essentiellement
    au moyen de la violence et de la terreur, avec le soutien des Etats.
    En Pologne et en Tchécoslovaquie, des centaines de milliers de
    réfugiés furent rassemblés dans des camps ` souvent, comme Auschwitz I
    ou Theresienstadt, d'anciens camps de concentration nazis maintenus
    opérationnels durant plusieurs années après la guerre et mis au
    service d'un nouvel objectif.

    Les conditions d'existence des prisonniers dans plusieurs de ces
    installations étaient atroces, comme en témoignent les autorités de la
    Croix Rouge, s'accompagnant de mauvais traitements, du viol des femmes
    internées, de travaux forcés épuisants et d'un régime de
    sous-alimentation allant de 500 Ã 800 calories par jour. En violation
    des règlements, rarement appliqués, exemptant les jeunes de la
    détention, les enfants étaient couramment incarcérés, soit avec leurs
    parents, soit dans des camps réservés aux enfants. Comme l'ambassade
    de Grande-Bretagne à Belgrade le signale en 1946, les conditions
    réservées aux Allemands « semblent bien en dessous des normes en
    vigueur à Dachau. »

    Alors que le taux de mortalité dans ces camps était souvent
    terriblement élevé ` 2 227 internés dans le camp de MysÅ?owice, au sud
    de la Pologne, périrent durant les dix derniers mois de 1945 -,
    l'essentiel de la mortalité liée aux expulsions se produisit en dehors
    d'eux.

    Les marches forcées, dans lesquelles les habitants de villages entiers
    furent expulsés en l'espace d'un quart d'heure et conduits sous la
    menace de fusils vers la frontière la plus proche, firent de
    nombreuses pertes. De même, les transports en train, qui prenaient
    parfois des semaines à rejoindre leur destination, avec jusqu'à 80
    personnes expulsées, entassées dans chaque wagon, privées (parfois
    totalement) de nourriture, d'eau et de chauffage suffisants.

    Les décès continuaient à l'arrivée en Allemagne même. Déclarés
    inéligibles par les autorités alliées à recevoir quelque forme que ce
    soit d'aide internationale et dépourvus de logements dans un pays
    dévasté par les bombardements, les expulsés passaient dans de nombreux
    cas leurs premiers mois ou années vivant à la dure dans des champs,
    des wagons de marchandises ou sur des quais de gare.

    La malnutrition, l'hypothermie et la maladie firent de nombreuses
    victimes, en particulier parmi les plus gés et les plus jeunes. Bien
    que des recherches supplémentaires soient nécessaires, afin d'établir
    le nombre total de morts, des estimations laissent penser qu'au bas
    mot, 500 000 personnes perdirent la vie, suite à cette opération.

    Non seulement le traitement des expulsés contrevenait aux principes au
    nom desquels la Seconde Guerre mondiale était censée avoir été
    entreprise, mais il suscita de nombreuses et durables complications
    juridiques. Lors des procès de Nuremberg, par exemple, les Alliés
    passaient en jugement les dirigeants nazis survivants, accusés d'avoir
    perpétré des « déportations et autres actes inhumains » contre les
    populations civiles, au même moment où, Ã moins de quelques centaines
    de kilomètres de lÃ, ils se lançaient d'eux-mêmes dans des
    déplacements forcés à grande échelle.

    Des problèmes similaires surgirent avec la Convention des Nations
    Unies pour la prévention et la répression du crime de génocide en
    1948, dont la première mouture déclarait illégal « l'exil forcé et
    systématique d'individus représentant la culture d'un groupe. » Cette
    disposition fut supprimée de la version finale, sur l'insistance de la
    délégation des Etats-Unis, laquelle soulignait le fait que cela «
    pourrait être interprété comme incluant les transferts forcés de
    groupes minoritaires, tels que ceux déjà mis en Å`uvre par les membres
    des Nations Unies. »

    Jusqu'Ã aujourd'hui, des Etats responsables d'expulsions continuent
    dans une large mesure à exclure les déportations et leurs effets
    permanents de la portée du droit international. En octobre 2009, par
    exemple, l'actuel président de la République Tchèque, Václav Klaus,
    refusa de signer le traité de Lisbonne de l'Union Européenne, Ã moins
    que son pays ne se vît accorder une « exemption », lui assurant que
    les expulsés survivants ne puissent recourir à ce traité pour demander
    auprès des tribunaux européens réparation au nom des mauvais
    traitements subis. Face à l'échec d'un accord dans l'éventualité d'une
    non-ratification tchèque, l'Union Européenne accepta à contrecÅ`ur.

    A ce jour, les expulsions de l'après-guerre ` dont l'échelle et le
    caractère meurtrier ont dépassé de loin l'épuration ethnique qui
    accompagna l'effondrement de l'ancienne Yougoslavie dans les années
    1990 ` restent peu connues en dehors de l'Allemagne. (Et même lÃ, une
    enquête de 2002 révéla que les Allemands gés de moins de trente ans
    avaient une connaissance plus précise de l'Ethiopie que celle des
    régions d'Europe d'où leurs grands-parents furent déportés.)

    Les manuels scolaires sur l'histoire de l'Allemagne moderne ou de
    l'Europe moderne, que j'utilise en général avec mes étudiants, soit
    omettent totalement de mentionner ces expulsions, soit les relèguent Ã
    quelques lignes qui n'apprennent rien, et fréquemment inexactes, les
    présentant comme la conséquence inévitable des atrocités de
    l'Allemagne durant la guerre. Dans le discours populaire, les rares
    fois où les expulsions sont citées tout au plus, il n'est pas rare de
    les éluder au motif que les expulsés ont « eu ce qu'ils méritaient »
    ou bien que l'intérêt des Etats, qui les expulsaient afin de se
    débarrasser d'une population minoritaire potentiellement déloyale,
    devait avoir le pas sur le droit des déportés à rester sur leurs
    terres d'origine.

    Pour convaincants, en apparence, que ces arguments puissent sembler,
    ils ne résistent pas à l'examen. Les expulsés ne furent pas déportés
    suite à un procès et une condamnation individuelle pour des actes de
    collaboration en temps de guerre ` ce dont des enfants ne sauraient
    être coupables, où que ce soit -, mais bien parce que leur déplacement
    sans discrimination servait les intérêts des grandes puissances, comme
    ceux des Etats procédant à ces expulsions.

    Les mesures visant à exempter des « antifascistes » reconnus de la
    détention ou du transfert étaient couramment ignorées par ces mêmes
    gouvernements qui les adoptaient ; Oskar Schindler, le plus célèbre «
    antifasciste », né dans la ville tchèque de Svitawy, fut dépossédé par
    les autorités de Prague de sa nationalité et de ses biens, comme les
    autres.

    Par ailleurs, l'argument selon lequel il est légitime, dans certaines
    circonstances, de déclarer, au regard de populations entières, que la
    prise en considération des droits de l'homme ne s'appliquent tout
    simplement pas, est des plus dangereux. Dès que le principe, selon
    lequel certains groupes précis, tombés en disgrce, peuvent être
    traités de cette manière, est admis, il est difficile de voir pourquoi
    il ne s'appliquerait pas à d'autres. Des chercheurs, parmi lesquels
    Andrew Bell-Fialkoff, John Mearsheimer et Michael Mann, ont déjÃ
    souligné le fait que l'expulsion des Allemands constitua un précédent
    encourageant pour la mise en Å`uvre de migrations forcées similaires
    dans l'ancienne Yougoslavie, au Moyen-Orient et ailleurs.

    L'histoire des expulsions d'après-guerre montre pourtant qu'il ne
    s'agit aucunement d'un transfert « ordonné et humain » de populations
    : violence, cruauté et injustice font intrinsèquement partie de ce
    processus. Comme l'a remarqué Ã juste titre Madeleine Albright,
    ancienne Secrétaire d'Etat américaine, qui avait fui, petite fille, la
    Tchécoslovaquie occupée par les nazis : « Les punitions collectives,
    telles que les expulsions forcées, sont habituellement justifiées par
    des motifs de sécurité, mais frappent presque toujours le plus
    lourdement ceux qui sont sans défense et faibles. »

    Il importe de garder à l'esprit qu'aucune comparaison valable ne
    saurait être établie entre l'expulsion des Allemands et les atrocités
    bien plus grandes dont se rendit responsable l'Allemagne nazie. Toutes
    propositions contraires ` y compris celles avancées par les expulsés
    eux-mêmes ` sont à la fois choquantes et historiquement fausses.

    Quoi qu'il en soit, comme l'historien B.B. Sullivan l'a observé dans
    un autre contexte, « un mal plus grand n'absout pas un mal moindre. »
    Les expulsions d'après-guerre furent à tous égards une des
    manifestations les plus significatives de la violation en masse des
    droits de l'homme dans l'histoire récente. Leurs effets
    démographiques, économiques, culturels et politiques continuent de
    jeter une ombre conséquente et sinistre sur le continent européen. Or
    leur importance reste méconnue, tandis que nombre d'aspects centraux
    de leur histoire n'ont pas été suffisamment étudiés.

    Près de 70 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, alors que
    les expulsés survivants quittent la scène, le temps est venu pour cet
    épisode tragique et destructeur de recevoir l'attention qu'il mérite,
    afin que ses enseignements ne puissent se perdre et que les
    souffrances inutiles qu'il provoqua ne se répètent pas.

    [R. M. Douglas est professeur associé d'histoire à l'Université de
    Colgate (Hamilton, N.Y.). Il est l'auteur de quatre ouvrages
    précédents, dont le plus récent est Architects of the Resurrection:
    Ailtiri na hAiséirghe and the Fascist "New Order" in Ireland [Les
    Architectes de la résurrection : Ailtiri na hAiséirghe et le « Nouvel
    ordre » fasciste en Irlande] (Manchester University Press, 2009). Il
    vit à Hamilton, dans l'Etat de New York.]

    ___________

    Source : http://www.huffingtonpost.com/rm-douglas/expulsion-germans-forced-migration_b_1625437.html
    Traduction : © Georges Festa ` 03.2013.





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    Source/Lien : Armenian Trends - Mes Arménies

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