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Lettre Ouverte A Seda Mavian

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    LETTRE OUVERTE A SEDA MAVIAN

    http://www.armenews.com/article.php3?id_article=87760

    Suite a la prise de position de Seda Mavian dans le conflit qui oppose
    actuellement Raffi Hovhannissian au president Sarkissian, nous ne
    pouvons rester indifferents. Notre mouvement ne soutient en aucun
    cas un camp ou l'autre. Qu'il y ait eu des fraudes est " possible ",
    mais nous n'avons ni les preuves ni les moyens de les confirmer.

    L'abstention de nombreux partis a presenter un candidat a
    cette election, a savoir notamment le CNA (Ter Petrossian), la
    FRA-Dachnaktsoutioun et le parti communiste avait reduit le choix
    des electeurs. Les observateurs etrangers en ont d'ailleurs fait la
    remarque. Il faut noter que la participation electorale n'a pas fait
    le plein (60% environ).

    Cela semble bien reveler une desaffection des Armeniens pour ce
    scrutin.

    Aujourd'hui, profitant de la contestation, les opposants restes dans
    l'abstention lors du scrutin viennent opportunement soutenir Raffi
    Hovhannissian. Si celui-ci incarnait a ce point la renaissance, on ne
    comprend pas pourquoi ces dits partis (CNA, FRA et autres...) n'ont
    pas officiellement pris position pour le candidat le mieux place
    contre le president sortant, a savoir Raffi Hovhannissian.

    Sans rentrer dans la politique fiction, il semble probable que le
    resultat aurait ete different. Cela rappelle un peu les generaux
    planques a l'arrière qui envoient le soldat Hovhannissianen première
    ligne.

    Et pour se refaire une virginite, ces opportunistes accourent soutenir
    le candidat malheureux. Comme courage politique on fait mieux. Le tout
    se joue sur le dos du peuple armenien que Seda Mavian cite a plusieurs
    reprises. S'abriter derrière un peuple, encercle de toutes parts par
    des ennemis prets a l'abattre, ne pouvant beneficier que du soutien
    reel de la Russie, c'est une imposture. Et pretendre transformer,
    dans les circonstances actuelles, l'Armenie en un Danemark ou une
    Confederation helvetique est irrealiste, car demuni de tout fondement.

    Patrie des droits de l'Homme, la France, a mis presque 100 ans pour
    instaurer une democratie digne de ce nom.

    Il faut savoir tirer les lecons de son passe, faire sa propre
    autocritique et etre realiste avant de se laisser emballer par ses
    sentiments. On s'etonne que l'on trouve a redire sur les fameux
    protocoles signes sans prealable entre la Turquie et l'Armenie. On
    aurait pu se feliciter de la finesse et l'intelligence de la diplomatie
    armenienne qui a su pieger celle de la Turquie. En France, seul le
    MAFP a eu cette clairvoyance.

    Si Raffi Hovhannissian avait, et nous l'esperons, une veritable
    maturite politique et un amour sans faille pour son peuple et son
    pays, il aurait ete plus intelligent et responsable de negocier sa
    participation a un gouvernement d'union nationale comprenant toutes
    les composantes politiques armeniennes. Cela l'aurait grandi, et par
    la-meme tous les partis d'opposition. La critique est toujours plus
    aisee quand on n'exerce aucune responsabilite a quelque niveau que
    ce soit.

    Raffi Hovhannissian aurait pu egalement profiter de son assise pour
    developper dans le pays une action positive dirigee au profit des
    plus faibles, cette masse silencieuse qui vit au-dessous du seuil de
    la pauvrete. N'est pas Waleza qui veut. Aimer son pays, ce n'est pas
    uniquement pretendre a le diriger ou a y exercer des responsabilites
    electives.

    La critique par une certaine intelligentsia armenienne des
    personnalites telles que Charles Aznavour devient une habitude et
    tient de l'ingratitude quand on sait ce que l'homme comme l'artiste
    a donne a l'Armenie. Face aux defis que doit relever l'Armenie quel
    que soient ses dirigeants, il est plus que necessaire de se fondre
    dans l'union et non la division. Et si la diaspora a un rôle est-ce
    celui de s'immiscer dans les affaires internes de l'Armenie, alors
    qu'elle est confortablement assise dans son fauteuil et regarde les
    evenements de loin ?

    Nous ne nions pas l'importance de la diaspora pour l'Armenie, mais
    il faut que chacun sache rester a sa place.

    S'engager pour l'Armenie, c'est la soutenir financièrement,
    humanitairement, economiquement. Politiquement parlant, mieux vaut
    aller vivre en Armenie et s'y impliquer avec courage et integrite.

    La renaissance armenienne est a ce prix.

    MAFP - 9 mars 2013 www.armen-progres.com

    Seda Mavian, correspondante de NAM a Erevan, a adresse le 8 mars
    une lettre au CCAF, qu'elle a mise en copie a un certain nombre
    d'organisations armeniennes et de personnalites. C'est a cet appel
    publie ci-dessous que le MAFP a repondu. Il est egalement a noter que
    cette initiative "personnelle" de Seda Mavian ne saurait en aucune
    manière ni en quoi que ce soit impliquer la redaction NAM qui est
    plurielle, ni engager sa ligne editoriale fondee sur la liberte et
    l'independance envers tous les acteurs politiques, y compris Monsieur
    Raffi Hovannisian.A.T.

    Cher amis,

    Mon initiative vous etonnera peut-etre et croyez bien qu'elle est
    totalement personnelle, provoquee par l'obligation morale que je
    ressens a vous faire part de mes sentiments sur les evènements
    capitaux qui se deroulent en ce moment en Armenie, et a susciter
    votre reaction et votre engagement a leur egard. Car enfin, la
    diaspora ne doit-elle s'exprimer que lorsqu'il s'agit de la Turquie,
    de la Georgie, de l'Azerbaïdjan, et rester muette dès qu'il s'agit de
    l'Armenie ? En refusant d'operer la distinction entre regime et Etat,
    doit-elle absoudre le premier de miner le second ?

    Si je me permets aujourd'hui de sortir de ma reserve de journaliste
    vivant dans le pays depuis vingt et un ans (depuis le printemps
    1992) et travaillant comme correspondante pour les NAMs depuis onze
    ans (depuis 2002), c'est que je pense que la diaspora a le devoir
    d'aider le peuple armenien dans ses efforts desesperes pour acceder
    a la democratie. Or comme beaucoup en Armenie, je considère que le
    mouvement democratique issu de l'election truquee du 18 fevrier dernier
    est une chance inesperee (la dernière, dit-on ici) de se liberer d'un
    pouvoir unanimement considere comme feodal et clanique, nepotique,
    corrompu, et criminel, dont la reconduction pour cinq ans aurait des
    consequences desastreuses pour le pays et le devenir de la nation.

    Comme vous le savez, officiellement Serge Sarkissian a ete elu avec
    58% des voix. Mais personne en Armenie n'accorde le moindre credit
    a ce chiffre, non seulement parce que tout chiffre officiel y est
    par principe sujet a caution, mais parce qu'il est desormais etabli
    que les elections ont ete truquees. Les denegations du pouvoir qui
    s'appuie sur le premier rapport preleminaire des observateurs de
    l'OSCE-ODIHR (le 19 fevrier) et sur les telegrammes de felicitations
    qui ont commence a tomber avant meme l'enonce des resultats officiels
    du scrutin par la Commission centrale electorale, ne change rien a
    cette verite que les elections ont ete truquees.

    Dans quelle proportion ? Nous l'ignorons. Mais la fraude semble avoir
    ete significative au point d'avoir transforme un vote de sanction
    envers Serge Sarkissian en un vote de confiance, chose qui est apparue
    petit a petit au lendemain du scrutin et dont le 3ème rapport officiel
    des observateurs de l'OSCE-ODIHR publie debut mars fait foi. Aussi,
    s'il est impossible de savoir si Serge Sarkissian a vraiment gagne dès
    le premier tour ou si c'est au contraire Raffi Hovhannisian qui l'a
    emporte (ce dont ses partisans sont persuades), ou bien encore s'il
    aurait dû y avoir un second tour du fait que Serge Sarkissian n'aurait
    en realite obtenu qu'une majorite relative, une chose est certaine :
    Serge Sarkissian s'etant hautement prevalu de son engagement a ce que
    l'election soit d'une parfaite legalite au point d'avoir publiquement
    repete durant la campagne electorale que la tenue de " bonnes elections
    " etait son principal souci, on aurait ete en droit d'attendre qu'il
    ne puisse tolerer l'existence du moindre doute sur la legitimite de
    sa reelection en remettant sa demission, d'esperer que la Commission
    centrale electorale prononce l'invalidite de l'election, et de prevoir
    que la Cour Constitutionnelle fasse de meme en decidant l'organisation
    de nouvelles elections presidentielles. Or loin de demissionner,
    Serge Sarkissian a fait etat de sa " fierte " dès le 18 fevrier au
    soir, tandis que la Commission centrale electorale a confirme les
    resultats officiels le 25 fevrier, et que la Cour constitutionnelle
    fera sans doute de meme le 11 mars, l'une et l'autre etant totalement
    infeodees au pouvoir.

    Dans ces conditions, que restait-il a faire pour Raffi Hovhannisian
    et les milliers d'electeurs spolies de leur vote ? Accepter sans mot
    dire une election truquee et un president illegitime ? Encore une fois
    " passer outre " ? C'est ce a quoi on aurait pu s'attendre en effet,
    nous qui avons beau jeu de reprocher au peuple armenien sa passivite,
    son apathie et sa soumission. Mais avec une energie qui est l'energie
    du desespoir, ce peuple a choisi de reagir en remettant en cause
    les resultats officiels, en rejetant le verdict de la Commission
    centrale electorale, et en niant toute validite aux reconnaissances
    emanant des pays etrangers et autres organisations ou personnalites
    (notons que par egard pour Aznavour, les medias locaux ont prefere
    taire son deplorable telegramme de felicitations), bref a s'insurger
    contre l'injustice de l'ordre etabli. L'en blâmera-t-on ?

    Chers amis, comprenez qu'en disant " Non " a l'election truquee du18
    fevrier et en ayant decide de maintenir ce " Non " envers et contre
    tout au-dela du18 fevrier, le peuple armenien profère un ultime rejet
    de la vassalisation auquel il est si ferocement soumis depuis plus
    de quinze ans, et que ce rejet est largement majoritaire. J'en veux
    pour preuve indirecte que l'annonce du resultat de Serge Sarkissian
    n'a ete suivie d'aucune ceremonie officielle de celebration, d'aucun
    bain de foule, d'aucun meeting, d'aucun discours a la nation, ni
    d'aucune manifestation d'aucune sorte qui risquerait de tourner au
    fiasco pour lui et le parti Republicain qu'il dirige.

    Je pourrais m'en ternir la, mais pour prevenir quelques objections et
    vaincre quelques reticences a prendre l'engagement que je me permets
    de preconiser, je voudrais dire quelques mots -quelques mots seulement-
    sur Raffi Hovhannisian, ainsi que sur le danger que lui et la situation
    actuelle feraient soit-disant encourir au pays du point de vue de la
    securite nationale.

    Raffi Hovhannisian : quoi qu'on pense de lui, c'est lui qui, depuis
    le 18 fevrier 2013, porte l'espoir du peuple d'Armenie de se degager
    de la tutelle du regime actuel et de s'engager sur la voie de la
    democratie, du respect de la loi, du droit, et de la constitution. En
    depit d'un parcours politique qui a pu parfois derouter ou decevoir,
    sa reputation n'est pas entachee de turpitudes liees a l'exercice du
    pouvoir ou d'autres activites ; il a une experience ministerielle et
    de depute tout en etant un " homme nouveau ", non petri du sovietisme
    commun a l'ensemble du personnel politique d'Armenie de sa generation
    ; par ailleurs, il est entoure de cadres ayant deja fait la preuve
    de leurs competences ; son soutien par l'Armenie profonde, par la
    plupart des partis d'opposition (dont l'appui sans reserve de la
    FRA-Dachnaktsoutioun) et certaines individualites notables, ainsi que
    par de multiples groupements d'action citoyenne generalement animes
    par des jeunes d'une maturite etonnante, sont des atouts qu'il convient
    de prendre en compte. Enfin, il faut admettre que Raffi Hovhannisian,
    outre que c'est lui qui a ete choisi par le peuple d'Armenie pour
    incarner sa renaissance parmi tous les candidats d'opposition de
    l'election presidentielle, semble s'etre metamorphose en faisant
    preuve d'une envergure politique que l'on ne soupconnait pas.

    Defense et securite : le pouvoir a beau jeu de faire valoir les
    dangers inherents a la venue au pouvoir d'un homme nouveau, qui plus
    est d'origine americaine (notemment pour le devenir des relations
    armeno-russes), ainsi que les risques d'une agression militaire suite
    a l'instabilite interne issue du developpement du mouvement national.

    Car ses carences en politique etrangère et sur le front du Karabagh
    sont enormes, bien que mal connues. Par quel renversement Serge
    Sarkissian reussit-il a apparaître aux yeux d'un certain nombre,
    surtout en diaspora, comme comme le garant de la securite du pays
    face aux ennemis de l'Armenie, voila qui echappe au bon sens et
    a l'analyse objective des faits. Je pourrais le demontrer mais je
    m'abstiendrai de developper ici ce chapître sous peine de me lancer
    dans un veritable article sur le bilan globalement negatif de la
    politique etrangère et concernant l'Artsakh, de Serge Sarkissian, ce
    qui est hors propos. Je me contenterai ici d'affirmer que contrairement
    aux apparences, c'est le maintien de l'equipe en place et non son
    remplacement, qui met en danger la securite de l'Etat, et de poser la
    question suivante : ne croyez-vous pas que Raffi Hovhannisian et les
    manifestants de la place de la Liberte sont au moins aussi conscients
    de la responsabilite de leurs actes en tant que citoyens d'Armenie,
    que les citoyens francais d'origine armenienne habitant a Paris,
    Lyon, ou Marseille, qui tremblent sincèrement pour l'Amenie, certes,
    mais de loin ? Et ne pensez-vous pas que le soutien de la FRA et d'un
    mouvement tel que Sardarapat, dirige par un Jiraïr Sefilian, sont
    des assurances suffisantes que le nouveau mouvement democratique ne
    met pas en peril la securite de l'Armenie ? Ne nous faisons donc pas
    peur avec l'argument securitaire, cet epouvantail traditionnellement
    agite par le pouvoir pour justifier son maintien et sa reconduction
    par tous les moyens.

    Conclusion : cher amis, le peuple d'Armenie est engage depuis dix-huit
    jours dans une direction nouvelle "sans retour possible". Plus qu'une
    revolution politique, c'est une veritable revolution culturelle qu'il
    est en train de vivre. Si effectivement la diaspora est aux côtes
    de l'Armenie dans cet immense effort vers un changement salutaire de
    regime, l'occasion est propice de le montrer. On sait qu'elle sait se
    mobiliser pour elle au plan humanitaire et financier lorsqu'il s'agit
    de soulager des lendemains catastrophiques (cf seisme du 7 decembre
    1988) ou de soutenir financièrement les combats (guerre du Karabagh
    jusqu'en 1994), ainsi qu'au plan diplomatique lorsqu'il s'agit de
    denoncer des Protocoles douteux. Mais il lui reste a se prononcer
    sur le plan politique en faveur de la cause democratique.

    Osons prendre position. Accordons notre soutien a ceux qui se battent
    concrètement sur le terrain pour que l'Armenie dont nous revons ait
    enfin une chance de se bâtir et que la realisation de ce reve ne
    soit pas renvoyee aux calendes grecques. Vainquons nos resistances
    en veuillant bien comprendre que Raffi Hovhannisian represente la
    corde de ceux qui se trouvent au fond du puits et a laquelle ils
    s'accrochent actuellement de toutes leurs forces pour s'en tirer.

    C'etaient a eux d'agir. Ils l'ont fait le 18 fevrier. Ils continuent
    de le faire depuis. Et nous, qu'avons-nous a faire d'autre que les
    aider moralement ?

    S'il vous paraît qu'un soutien ouvert au mouvement democratique
    incarne par Raffi Hovhannisian est trop audacieux eu egard a telle ou
    telle consideration, peut-on du moins esperer un soutien indirect,
    sous la forme d'une nette denonciation de la fraude qui entache
    la legitimite de l'election du 18 fevrier, de la preconisation de
    nouvelles elections presidentielles, et contre l'eventualite de toute
    violence ou repression de ce mouvement par le pouvoir ?

    Si cela etait, il serait souhaitable qu'un tel communique soit
    emis avant la decision de la Cour Constitutionnelle du 11 mars
    qui a ete saisie, comme vous le savez, par deux des candidats
    a la presidentielle, Raffi Hovhannisian et Andreas Ghoukassian,
    c'est-a-dire si possible avant le 10 mars, afin que sa nouvelle puisse
    etre diffusee.

    Esperant que mon initiative ne sera pas percue autrement que comme
    le desir ardent d'aider autant que faire se peut ceux qui sont en
    première ligne dans le combat, devenu vital, pour que notre peuple
    accède a cette liberation nationale dont il reste prive vingt-deux
    ans après l'accès de l'Armenie a l'independance, je vous adresse,
    chers amis, l'expression de ma haute consideration,

    Sèda Mavian 8 mars, Erevan.

    mardi 12 mars 2013, Ara ©armenews.com

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