SYRIE
La guerre civile syrienne donne un nouvel élan à la cause kurde
La guerre civile syrienne donne un nouvel élan à la cause kurde, dont
les miliciens multiplient les succès militaires dans le Nord-Est et
gagnent également du terrain sur le plan politique.
Victimes depuis des décennies d'une discrimination imputable aussi
bien à Bachar al Assad qu'à son père Hafez, qui l'a précédé à la tête
de l'Etat, les membres de cette minorité voient dans le conflit un bon
moyen d'accéder à l'autonomie de fait arrachée par leurs frères
irakiens à l'issue de la première guerre du Golfe.
L'offensive des mouvements armés inspire toutefois des sentiments
mitigés, tant sur le plan local que régional ou international. Parmi
les Kurdes eux-mêmes, certains considèrent que l'axe transfrontalier
qui se dessine fait le jeu de Damas.
Pour Assad et ses alliés, les territoires occupés par les Kurdes sont
autant de zones qui échappent aux insurgés. Du côté des puissances
étrangères favorables à l'opposition, on les voit comme un
contre-poids à l'hégémonie des islamistes dans le nord de la Syrie.
La progression des milices kurdes `est globalement acceptée par tout
le monde`, affirme Piroz Perik, un militant kurde de Kamichli. Elle
suscite toutefois des inquiétudes, autant pour l'intégrité
territoriale de la Syrie que pour la stabilité de ses voisins qui
présentent la même mixité ethnique et religieuse.
Forte de 25 millions d'mes, la communauté kurde présente en Turquie,
en Iran, en Irak et en Syrie est souvent présentée comme le plus
important groupe ethnique ne disposant pas de son propre Etat.
ANKARA BTIT UN MUR À LA FRONTIÈRE
La situation en Syrie inquiète particulièrement la Turquie, qui a
entamé des négociations de paix avec les séparatistes du Parti des
travailleurs du Kurdistan (PKK) après trente ans de conflit.
Ankara a d'ailleurs commencé le mois dernier la construction d'un mur
à la frontière syrienne, officiellement destiné à assurer la sécurité
nationale, mais les Kurdes de Turquie affirment qu'il a pour but de
les couper de leurs frères syriens.
Les autorités turques craignent que les succès des milices syriennes
associées au Parti de l'union démocratique (Partiya Yekîtiya Demokrat,
PYD) ne relance les ambitions du PKK, dont il est très proche, mais
elles redoutent aussi la présence à sa porte de djihadistes liés à Al
Qaïda qui combattent le PYD.
`On va assister à une division plus claire du nord de la Syrie entre
PYD et rebelles islamistes`, prédit Piroz Perik.
Les deux tiers des territoires majoritairement kurdes de Syrie sont
aux mains des milices liées au PYD, selon leur porte-parole Redur
Xelil. C'est notamment le cas de la province d'Hassaka, dont la
population est kurde à 70%, précise-t-il.
Forts de ces succès, les combattants kurdes pourraient désormais être
tentés de prendre des villes frontalières stratégiques telles
Jarablous ou Azaz, majoritairement arabes, par lesquelles passent les
voies logistiques des rebelles syriens. Ces derniers réagiraient sans
doute très violemment.
`Je ne dis pas que nous allons le faire. Prenons les choses comme
elles viennent. Attendons d'abord de savoir si les groupes armés (les
rebelles) laisseront les Kurdes se déplacer librement dans cette
région`, poursuit Redur Xelil.
L'une des voies d'approvisionnement les plus importantes des insurgés
passe par Tel Abiad, qui se trouve désormais dans le rayon d'action
des milices kurdes. Une autre traverse Ras al Aïn qui est tombée entre
leurs mains la semaine passée.
UN AXE RÉGIONAL PRO-ASSAD
Ces victoires jettent le doute sur l'efficacité militaire des rebelles
du Front al Nosra et de l'Etat islamique d'Irak et du Levant, tous
deux liés à Al Qaïda.
Les deux mouvements ont mené plusieurs offensives contre les positions
kurdes du Nord-Est mais dans leurs propres rangs, on juge qu'ils ne
chercheront plus à inverser un rapport de forces désormais bien établi
et qu'ils se focaliseront maintenant sur le Nord-Ouest et la région
d'Alep.
Pour les rebelles sunnites, c'est l'aide des forces fidèles à Assad et
de l'Irak chiite qui est à l'origine des succès kurdes, ce à quoi font
écho des témoignages d'habitants sur la capture par le PYD de
Yaaroubiya, à la frontière avec l'Irak. La bataille a fait rage
pendant quatre jours le mois dernier avant l'intervention de forces
irakiennes, qui a fait basculer les combats en faveur des Kurdes,
disent-ils.
Les Kurdes du PYD se disent hostiles à Bachar al Assad et ne cherchent
pas à btir un Etat séparé, mais sont également méfiants vis-à-vis du
soulèvement mené par les sunnites. Pragmatique, le parti kurde serait
prêt à coopérer avec quiconque l'aidera à atteindre son objectif
d'autonomie.
Ses opposants, qu'ils soient kurdes ou arabes, estiment que ses
récents succès sur le terrain démontrent qu'il s'est aligné sur un axe
régional pro-Assad. Un responsable politique kurde en Syrie affirme
que la récente offensive du PYD a été planifiée pour coïncider avec
une poussée des forces loyalistes dans le Nord-Ouest, près d'Alep.
Un haut responsable irakien ajoute que l'Iran chiite, principal allié
régional de Damas, soutient activement le PYD. Téhéran tisserait ainsi
un réseau d'alliés au sein des minorités à travers le pays afin de
renforcer ses intérêts et de s'appuyer sur des partenaires en cas de
chute d'Assad.
samedi 16 novembre 2013,
Stéphane ©armenews.com
La guerre civile syrienne donne un nouvel élan à la cause kurde
La guerre civile syrienne donne un nouvel élan à la cause kurde, dont
les miliciens multiplient les succès militaires dans le Nord-Est et
gagnent également du terrain sur le plan politique.
Victimes depuis des décennies d'une discrimination imputable aussi
bien à Bachar al Assad qu'à son père Hafez, qui l'a précédé à la tête
de l'Etat, les membres de cette minorité voient dans le conflit un bon
moyen d'accéder à l'autonomie de fait arrachée par leurs frères
irakiens à l'issue de la première guerre du Golfe.
L'offensive des mouvements armés inspire toutefois des sentiments
mitigés, tant sur le plan local que régional ou international. Parmi
les Kurdes eux-mêmes, certains considèrent que l'axe transfrontalier
qui se dessine fait le jeu de Damas.
Pour Assad et ses alliés, les territoires occupés par les Kurdes sont
autant de zones qui échappent aux insurgés. Du côté des puissances
étrangères favorables à l'opposition, on les voit comme un
contre-poids à l'hégémonie des islamistes dans le nord de la Syrie.
La progression des milices kurdes `est globalement acceptée par tout
le monde`, affirme Piroz Perik, un militant kurde de Kamichli. Elle
suscite toutefois des inquiétudes, autant pour l'intégrité
territoriale de la Syrie que pour la stabilité de ses voisins qui
présentent la même mixité ethnique et religieuse.
Forte de 25 millions d'mes, la communauté kurde présente en Turquie,
en Iran, en Irak et en Syrie est souvent présentée comme le plus
important groupe ethnique ne disposant pas de son propre Etat.
ANKARA BTIT UN MUR À LA FRONTIÈRE
La situation en Syrie inquiète particulièrement la Turquie, qui a
entamé des négociations de paix avec les séparatistes du Parti des
travailleurs du Kurdistan (PKK) après trente ans de conflit.
Ankara a d'ailleurs commencé le mois dernier la construction d'un mur
à la frontière syrienne, officiellement destiné à assurer la sécurité
nationale, mais les Kurdes de Turquie affirment qu'il a pour but de
les couper de leurs frères syriens.
Les autorités turques craignent que les succès des milices syriennes
associées au Parti de l'union démocratique (Partiya Yekîtiya Demokrat,
PYD) ne relance les ambitions du PKK, dont il est très proche, mais
elles redoutent aussi la présence à sa porte de djihadistes liés à Al
Qaïda qui combattent le PYD.
`On va assister à une division plus claire du nord de la Syrie entre
PYD et rebelles islamistes`, prédit Piroz Perik.
Les deux tiers des territoires majoritairement kurdes de Syrie sont
aux mains des milices liées au PYD, selon leur porte-parole Redur
Xelil. C'est notamment le cas de la province d'Hassaka, dont la
population est kurde à 70%, précise-t-il.
Forts de ces succès, les combattants kurdes pourraient désormais être
tentés de prendre des villes frontalières stratégiques telles
Jarablous ou Azaz, majoritairement arabes, par lesquelles passent les
voies logistiques des rebelles syriens. Ces derniers réagiraient sans
doute très violemment.
`Je ne dis pas que nous allons le faire. Prenons les choses comme
elles viennent. Attendons d'abord de savoir si les groupes armés (les
rebelles) laisseront les Kurdes se déplacer librement dans cette
région`, poursuit Redur Xelil.
L'une des voies d'approvisionnement les plus importantes des insurgés
passe par Tel Abiad, qui se trouve désormais dans le rayon d'action
des milices kurdes. Une autre traverse Ras al Aïn qui est tombée entre
leurs mains la semaine passée.
UN AXE RÉGIONAL PRO-ASSAD
Ces victoires jettent le doute sur l'efficacité militaire des rebelles
du Front al Nosra et de l'Etat islamique d'Irak et du Levant, tous
deux liés à Al Qaïda.
Les deux mouvements ont mené plusieurs offensives contre les positions
kurdes du Nord-Est mais dans leurs propres rangs, on juge qu'ils ne
chercheront plus à inverser un rapport de forces désormais bien établi
et qu'ils se focaliseront maintenant sur le Nord-Ouest et la région
d'Alep.
Pour les rebelles sunnites, c'est l'aide des forces fidèles à Assad et
de l'Irak chiite qui est à l'origine des succès kurdes, ce à quoi font
écho des témoignages d'habitants sur la capture par le PYD de
Yaaroubiya, à la frontière avec l'Irak. La bataille a fait rage
pendant quatre jours le mois dernier avant l'intervention de forces
irakiennes, qui a fait basculer les combats en faveur des Kurdes,
disent-ils.
Les Kurdes du PYD se disent hostiles à Bachar al Assad et ne cherchent
pas à btir un Etat séparé, mais sont également méfiants vis-à-vis du
soulèvement mené par les sunnites. Pragmatique, le parti kurde serait
prêt à coopérer avec quiconque l'aidera à atteindre son objectif
d'autonomie.
Ses opposants, qu'ils soient kurdes ou arabes, estiment que ses
récents succès sur le terrain démontrent qu'il s'est aligné sur un axe
régional pro-Assad. Un responsable politique kurde en Syrie affirme
que la récente offensive du PYD a été planifiée pour coïncider avec
une poussée des forces loyalistes dans le Nord-Ouest, près d'Alep.
Un haut responsable irakien ajoute que l'Iran chiite, principal allié
régional de Damas, soutient activement le PYD. Téhéran tisserait ainsi
un réseau d'alliés au sein des minorités à travers le pays afin de
renforcer ses intérêts et de s'appuyer sur des partenaires en cas de
chute d'Assad.
samedi 16 novembre 2013,
Stéphane ©armenews.com