TURQUIE : ANALYSE SUR LE PAQUET DE DEMOCRATISATION
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=76201
Publié le : 15-10-2013
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le 30 septembre dernier,
le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a dévoilé le paquet de
démocratisation tant attendu. A l'instar de Rober KoptaÅ~_, rédacteur
en chef du journal arménien de Turquie, AGOS, de nombreux journalistes
ont critiqué et analysé les articles de ce dispositif de réformes.
D'après KoptaÅ~_ : Â" Les principales lacunes concernant le paquet
pourraient être rassemblées dans quelques chapitres. Nous pouvons
ainsi les définir en tant que problèmes concernant les Alévis, les
Kurdes, les non-musulmans et la structure de la gestion de la Turquie.
Â" Le Collectif VAN vous propose la traduction d'un article en turc,
paru dans le journal AGOS, le 3 octobre 2013.
AGOS
Le paquet, les Alévis, les Kurdes, les minorités, Gezi
Rober KoptaÅ~_
03 octobre 2013
Rober KoptaÅ~_, rédacteur en chef du journal AGOS, a écrit sur les
éventuelles améliorations apportées, dans le cadre du paquet de
démocratisation, aux problèmes fondamentaux de la Turquie. KoptaÅ~_
dit que le pouvoir et l'opposition politiques sont coincés dans un
champ étroit et que la solution sera la nouvelle opposition parue
avec Gezi.
Les jours ont passé, tout est dit sur le paquet de démocratisation
et tous ceux qui n'étaient pas coincés par un genre de fanatisme
ont abouti au même point. Les règlementations de ce paquet sont
évidemment positives mais il faut faire encore plus pour passer
le cap.
Si l'on regarde article par article, ce qui est dans le paquet
concerne des étapes qui doivent être soutenues d'une manière ou
d'une autre. Nous savons combien la transformation démocratique en
Turquie est difficile. C'est pourquoi, il faut prendre soin de tout ce
qui peut briser la cruauté, la rigidité, l'uniformité de l'Etat. Le
paquet est d'ailleurs surtout critiqué par ce qu'il ne contient
pas et ceci est vrai. Les principales lacunes concernant le paquet
pourraient être rassemblées dans quelques chapitres. Nous pouvons
ainsi les définir en tant que problèmes concernant les Alévis, les
Kurdes, les non-musulmans et la structure de la gestion de la Turquie.
La définition des Alévis par l'AKP : la violence
Le problème alévi est l'une des questions les plus tendues en Turquie
puisque l'AKP, le parti au pouvoir, représente les sunnites. Le
problème est devenu encore plus critique car après avoir établi un
environnement sans conflit pour le problème kurde, les effets sur
la Turquie de la guerre en Syrie les a rendus furieux. Les Alévis
se méfient énormément des actes et des intentions de l'AKP. Le
pouvoir fait en sorte de relier cette méfiance a sa politique suivie
en Syrie, sa défense des violences policières lors des évènements
de Gezi et son comportement aggravant la polarisation.
Les Alévis ont subi de grandes injustices depuis des décennies. A
ce stade, le sommet de ces problèmes, au moins dans leur perception
[Nota CVAN : la perception émanant des Alévis], a coïncidé avec
l'époque où le parti qui représente la politique de l'islam sunnite
est tout seul au pouvoir. Et l'AKP, au lieu de mettre fin a la tension
en éliminant les injustices existantes, a poursuivi une nouvelle
norme suspecte (sous le nom Â"d'initiatives Â") qui interprétait
l'alévisme d'après la foi sunnite. Ceci a été, envers les Alévis,
une approche hiérarchique, hégémonique et Â" violente Â" comme
l'a souligné l'écrivain Yıldız Ramazanoglu. Ce qui aurait dÃ"
être fait, était de respecter la manière dont les Alévis se
définissent entre eux, de donner toute sorte de constitutionnalisme
a ce pluralisme et de reconnaître leur statut. Si demain également,
le paquet concernant les Alévis ne porte pas sur ce point de vue
et si on va tenter de choisir un Alévisme parmi les Alévismes, ou
bien si on va s'efforcer d'en créer un nouveau, le problème alévi
s'enfoncera davantage vers sa non-résolution.
Sans fâcher les nationalistes, sans mettre l'arrêt au processus
LorsquÂ'on regarde le paquet, on voit qu'il y a des types de
règlementations concernant le problème kurde. Mais, ici aussi, ce
sont des étapes qui concernent plus la surface que le fond. Dans le
paquet, il n'y a pas d'étapes qui pourraient faire avancer l'état de
non-conflit actuel, ni des modifications concernant les arrestations du
KCK, le code pénal turc et le code civil turc, ni des renforcements
a propos de la décentralisation. Ce cas montre que le gouvernement a
adopté comme tactique d'initier la solution du problème kurde tout
en ne touchant pas la sensibilité des nationalistes. Dans ce cas-la,
le résultat du processus de résolution va continuer a progresser dans
le chemin indiqué par le dialogue entre Ocalan et l'Etat. Si c'est
le cas, nous espérons que de bonnes choses se tiendront sur l'île se
trouvant au milieu de la mer de Marmara [Nota CVAN : L'île de İmrali
où Ocalan est emprisonné], hormis le fait de se réjouir des buts
de Drogba, et que les lendemains seront remplis de bonnes nouvelles.
Les minorités sont peu nombreuses mais elles ne sont pas négligeables
Le paquet a propos des minorités a été discuté autour de la
non-évocation de l'Institut de théologie [Nota CVAN : Etablissement
d'enseignement supérieur de la théologie grecque orthodoxe qui
se trouve sur l'île de Heybeli, proche d'Istanbul] et la joie de
la restitution du terrain du monastère de Mor Gabriel [Nota CVAN :
le monastère syriaque orthodoxe situé dans la province de Mardin].
Cependant, il faut dire que traiter les droits des minorités sous la
forme de gestes singuliers et de grâces accordées est problématique.
Le principal problème des non-musulmans de Turquie est de se faire
accepter en tant que citoyens égaux. Par conséquence, il existe de
nombreux sujets qui attendent une résolution : les biens extorqués,
le statut du patriarcat, la manière de faire vivre la culture et la
langue d'une minorité, la perte de sa population, le fait de ne pas
pouvoir devenir un fonctionnaire d'Etat, les libertés de la religion
et encore d'autres pressions. Sans évoquer tout cela, insérer
dans le paquet une quelconque décision sans faire de modifications
administratives et juridiques, c'est au plus traiter les minorités
comme une Â" marge Â". Tandis que même si les non-musulmans sont
numériquement peu nombreux, leur cas est une indication importante
en termes de démonstration de la démocratie en Turquie. Et nous ne
pouvons pas monter la barre de la démocratie avec Â" la marge Â".
Le soin de la faiblesse de l'opposition
Lorsqu'on regarde dans l'optique de ces trois sujets, il n'est pas
difficile de remarquer que le paquet est la suite de la stratégie
habituelle de l'AKP. Cette attitude ressemble a celle d'un commercant
qui voudrait donner le minimum pour en recevoir le maximum. L'AKP
s'approche des domaines problématiques comme un patron qui travaille
avec une dépense minimum pour réaliser un bénéfice maximum. Ceci
perturbe évidemment le développement de la démocratie. Alors
que le manque de pouvoir de l'opposition démocrate laisse en fin de
compte la transformation a l'initiative de l'AKP. Le style d'opposition
libertaire, paru lors de la résistance de Gezi , prend de l'importance
exactement a ce stade-la. Si la politique institutionnelle est coincée
dans un champ étroit entre son pouvoir et son opposition, ce sont de
nouveaux souffles qui doivent ouvrir ce champ avec un nouvel esprit,
même si ce n'est pas organisé, mais s'ils sont capables de réclamer
des choses si nécessaire. Pour que les étapes a prendre vers la
démocratisation soient plus démocratiques, la démocratie d'une
telle opposition doit pouvoir monter la barre.
Ce paquet, contrairement aux anciens, a vu le jour grâce a la
pression de la dynamique interne de la Turquie et non grâce a
l'UE. Nous pouvons ainsi remarquer que ce succès est dÃ" aux efforts
du mouvement kurde, mais aussi, au fait que la société turque,
avec ses différentes composantes, est de plus en plus ouverte au
changement et qu'elle est de plus en plus proche d'une vision du
monde plus pluraliste. Nous pouvons aussi dire que ceci indique que
la société a dépassé la politique.
Véritablement, mis a part quelques fanatiques, la société
avait résolu d'elle-même le problème du voile ; il n'y a pas de
différence importante pour l'alcool ; le fait que le kurde soit
étudié comme langue maternelle ne crée plus d'aussi grandes
réactions du côté turc.
Alors, c'est le moment pour que la politique soutienne mieux
l'impulsion de la société. Dans ce sens, Gezi a donné des astuces
importantes tant au pouvoir qu'a l'opposition. Bien sÃ"r, elles sont
destinées a ceux qui voudraient les comprendre.
Traduction du turc : NA.T. pour le Collectif VAN
Titre original: Â" Paket, Aleviler, Kurtler, Azınlıklar, Gezi Â"
Source originale:
http://www.agos.com.tr/haber.php?seo=paket-aleviler-kurtler-azinliklar-gezi&haberid=5857
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Source/Lien : AGOS
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=76201
Publié le : 15-10-2013
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le 30 septembre dernier,
le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a dévoilé le paquet de
démocratisation tant attendu. A l'instar de Rober KoptaÅ~_, rédacteur
en chef du journal arménien de Turquie, AGOS, de nombreux journalistes
ont critiqué et analysé les articles de ce dispositif de réformes.
D'après KoptaÅ~_ : Â" Les principales lacunes concernant le paquet
pourraient être rassemblées dans quelques chapitres. Nous pouvons
ainsi les définir en tant que problèmes concernant les Alévis, les
Kurdes, les non-musulmans et la structure de la gestion de la Turquie.
Â" Le Collectif VAN vous propose la traduction d'un article en turc,
paru dans le journal AGOS, le 3 octobre 2013.
AGOS
Le paquet, les Alévis, les Kurdes, les minorités, Gezi
Rober KoptaÅ~_
03 octobre 2013
Rober KoptaÅ~_, rédacteur en chef du journal AGOS, a écrit sur les
éventuelles améliorations apportées, dans le cadre du paquet de
démocratisation, aux problèmes fondamentaux de la Turquie. KoptaÅ~_
dit que le pouvoir et l'opposition politiques sont coincés dans un
champ étroit et que la solution sera la nouvelle opposition parue
avec Gezi.
Les jours ont passé, tout est dit sur le paquet de démocratisation
et tous ceux qui n'étaient pas coincés par un genre de fanatisme
ont abouti au même point. Les règlementations de ce paquet sont
évidemment positives mais il faut faire encore plus pour passer
le cap.
Si l'on regarde article par article, ce qui est dans le paquet
concerne des étapes qui doivent être soutenues d'une manière ou
d'une autre. Nous savons combien la transformation démocratique en
Turquie est difficile. C'est pourquoi, il faut prendre soin de tout ce
qui peut briser la cruauté, la rigidité, l'uniformité de l'Etat. Le
paquet est d'ailleurs surtout critiqué par ce qu'il ne contient
pas et ceci est vrai. Les principales lacunes concernant le paquet
pourraient être rassemblées dans quelques chapitres. Nous pouvons
ainsi les définir en tant que problèmes concernant les Alévis, les
Kurdes, les non-musulmans et la structure de la gestion de la Turquie.
La définition des Alévis par l'AKP : la violence
Le problème alévi est l'une des questions les plus tendues en Turquie
puisque l'AKP, le parti au pouvoir, représente les sunnites. Le
problème est devenu encore plus critique car après avoir établi un
environnement sans conflit pour le problème kurde, les effets sur
la Turquie de la guerre en Syrie les a rendus furieux. Les Alévis
se méfient énormément des actes et des intentions de l'AKP. Le
pouvoir fait en sorte de relier cette méfiance a sa politique suivie
en Syrie, sa défense des violences policières lors des évènements
de Gezi et son comportement aggravant la polarisation.
Les Alévis ont subi de grandes injustices depuis des décennies. A
ce stade, le sommet de ces problèmes, au moins dans leur perception
[Nota CVAN : la perception émanant des Alévis], a coïncidé avec
l'époque où le parti qui représente la politique de l'islam sunnite
est tout seul au pouvoir. Et l'AKP, au lieu de mettre fin a la tension
en éliminant les injustices existantes, a poursuivi une nouvelle
norme suspecte (sous le nom Â"d'initiatives Â") qui interprétait
l'alévisme d'après la foi sunnite. Ceci a été, envers les Alévis,
une approche hiérarchique, hégémonique et Â" violente Â" comme
l'a souligné l'écrivain Yıldız Ramazanoglu. Ce qui aurait dÃ"
être fait, était de respecter la manière dont les Alévis se
définissent entre eux, de donner toute sorte de constitutionnalisme
a ce pluralisme et de reconnaître leur statut. Si demain également,
le paquet concernant les Alévis ne porte pas sur ce point de vue
et si on va tenter de choisir un Alévisme parmi les Alévismes, ou
bien si on va s'efforcer d'en créer un nouveau, le problème alévi
s'enfoncera davantage vers sa non-résolution.
Sans fâcher les nationalistes, sans mettre l'arrêt au processus
LorsquÂ'on regarde le paquet, on voit qu'il y a des types de
règlementations concernant le problème kurde. Mais, ici aussi, ce
sont des étapes qui concernent plus la surface que le fond. Dans le
paquet, il n'y a pas d'étapes qui pourraient faire avancer l'état de
non-conflit actuel, ni des modifications concernant les arrestations du
KCK, le code pénal turc et le code civil turc, ni des renforcements
a propos de la décentralisation. Ce cas montre que le gouvernement a
adopté comme tactique d'initier la solution du problème kurde tout
en ne touchant pas la sensibilité des nationalistes. Dans ce cas-la,
le résultat du processus de résolution va continuer a progresser dans
le chemin indiqué par le dialogue entre Ocalan et l'Etat. Si c'est
le cas, nous espérons que de bonnes choses se tiendront sur l'île se
trouvant au milieu de la mer de Marmara [Nota CVAN : L'île de İmrali
où Ocalan est emprisonné], hormis le fait de se réjouir des buts
de Drogba, et que les lendemains seront remplis de bonnes nouvelles.
Les minorités sont peu nombreuses mais elles ne sont pas négligeables
Le paquet a propos des minorités a été discuté autour de la
non-évocation de l'Institut de théologie [Nota CVAN : Etablissement
d'enseignement supérieur de la théologie grecque orthodoxe qui
se trouve sur l'île de Heybeli, proche d'Istanbul] et la joie de
la restitution du terrain du monastère de Mor Gabriel [Nota CVAN :
le monastère syriaque orthodoxe situé dans la province de Mardin].
Cependant, il faut dire que traiter les droits des minorités sous la
forme de gestes singuliers et de grâces accordées est problématique.
Le principal problème des non-musulmans de Turquie est de se faire
accepter en tant que citoyens égaux. Par conséquence, il existe de
nombreux sujets qui attendent une résolution : les biens extorqués,
le statut du patriarcat, la manière de faire vivre la culture et la
langue d'une minorité, la perte de sa population, le fait de ne pas
pouvoir devenir un fonctionnaire d'Etat, les libertés de la religion
et encore d'autres pressions. Sans évoquer tout cela, insérer
dans le paquet une quelconque décision sans faire de modifications
administratives et juridiques, c'est au plus traiter les minorités
comme une Â" marge Â". Tandis que même si les non-musulmans sont
numériquement peu nombreux, leur cas est une indication importante
en termes de démonstration de la démocratie en Turquie. Et nous ne
pouvons pas monter la barre de la démocratie avec Â" la marge Â".
Le soin de la faiblesse de l'opposition
Lorsqu'on regarde dans l'optique de ces trois sujets, il n'est pas
difficile de remarquer que le paquet est la suite de la stratégie
habituelle de l'AKP. Cette attitude ressemble a celle d'un commercant
qui voudrait donner le minimum pour en recevoir le maximum. L'AKP
s'approche des domaines problématiques comme un patron qui travaille
avec une dépense minimum pour réaliser un bénéfice maximum. Ceci
perturbe évidemment le développement de la démocratie. Alors
que le manque de pouvoir de l'opposition démocrate laisse en fin de
compte la transformation a l'initiative de l'AKP. Le style d'opposition
libertaire, paru lors de la résistance de Gezi , prend de l'importance
exactement a ce stade-la. Si la politique institutionnelle est coincée
dans un champ étroit entre son pouvoir et son opposition, ce sont de
nouveaux souffles qui doivent ouvrir ce champ avec un nouvel esprit,
même si ce n'est pas organisé, mais s'ils sont capables de réclamer
des choses si nécessaire. Pour que les étapes a prendre vers la
démocratisation soient plus démocratiques, la démocratie d'une
telle opposition doit pouvoir monter la barre.
Ce paquet, contrairement aux anciens, a vu le jour grâce a la
pression de la dynamique interne de la Turquie et non grâce a
l'UE. Nous pouvons ainsi remarquer que ce succès est dÃ" aux efforts
du mouvement kurde, mais aussi, au fait que la société turque,
avec ses différentes composantes, est de plus en plus ouverte au
changement et qu'elle est de plus en plus proche d'une vision du
monde plus pluraliste. Nous pouvons aussi dire que ceci indique que
la société a dépassé la politique.
Véritablement, mis a part quelques fanatiques, la société
avait résolu d'elle-même le problème du voile ; il n'y a pas de
différence importante pour l'alcool ; le fait que le kurde soit
étudié comme langue maternelle ne crée plus d'aussi grandes
réactions du côté turc.
Alors, c'est le moment pour que la politique soutienne mieux
l'impulsion de la société. Dans ce sens, Gezi a donné des astuces
importantes tant au pouvoir qu'a l'opposition. Bien sÃ"r, elles sont
destinées a ceux qui voudraient les comprendre.
Traduction du turc : NA.T. pour le Collectif VAN
Titre original: Â" Paket, Aleviler, Kurtler, Azınlıklar, Gezi Â"
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