TURQUIE : L'ARGENT BLOQUE LA QUESTION ARMéNIENNE
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=75769
Publié le : 25-09-2013
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le journaliste turc,
Engin Ardıc, expose l'idée, de plus en plus répandue en Turquie,
que les compensations financières que devrait verser l'Etat turc
aux descendants des victimes du génocide arménien (terme qu'il se
garde bien d'employer d'ailleurs) sont a l'origine de l'absence de
résolution de la question arménienne. Il conclut : Â" J'avais posé
la question suivante a certains amis journalistes qui appuient le
gouvernement : Â" Pourquoi soutenez-vous les absurdités commises
par les Unionistes ? Etes-vous fous ? Â". Je n'avais pas eu de
réponse convaincante. Je vais répondre a leur place : Â" Parce que,
actuellement, nous ne voulons pas verser une indemnité de plusieurs
milliards de dollars sans aucune raison, alors que l'économie marche
bien. Â" Le Collectif VAN vous propose la traduction d'un article en
turc paru dans le journal turc, Sabah, le 7 septembre 2013.
Légende photo: Le quartier arménien d'Adana en ruines (source de
la photo : Musée du Génocide Arménien)
Sabah
L'argent est a l'origine de la question arménienne
07 Septembre 2013 Engin Ardıc
Je l'ai déja dit plusieurs fois, le professeur Suleyman YaÅ~_ar l'a
écrit aussi : l'argent est a l'origine de la question arménienne.
Le problème ne vient pas du fait que l'Arménie nous demanderait
les terres, mais du risque que les Arméniens demanderaient une
compensation. Ce n'est même pas Â" le prix du sang Â", c'est le prix
des biens arméniens confisqués...
En Turquie, en 1914, il y avait 1 million 200 mille Arméniens. En
1927, il n'en est restait que 77 mille. Ceci est définitif.
Nous ne nous demandons pas où ces personnes sont allées, les endroits
où elles sont allées sont évidents. Certaines sont allées Â"
vers l'autre monde Â", certaines en Syrie et au Liban, et d'autres
sont parties de la vers la France, les Etats-Unis et le Canada...
Ces personnes étaient a la fois les agriculteurs et les artisans
de l'Anatolie. Il n'existe pas de recherche/information correcte
concernant leur richesse, leur argent dans les banques, leurs terrains,
leurs jardins répandus dans toute l'Anatolie.
C'est pour cette raison que l'histoire de l'économie ottomane
est écrite sans l'évocation de l'économie arménienne, ou plus
généralement de Â" l'économie non-musulmane Â", comme indiqué
par le professeur Suleyman... Ni le grand Niyazi Berkes, ni Korkut
Boratay, ni mon doyen décédé Oktay Yenal, ni Yahya Tezel, ni
Å~^evket Pamuk... Nous ne croyons pas qu'ils l'ignoraient. Ils ont
dÃ" avoir peur, ils n'ont pas voulu s'attirer des ennuis en évoquant
ce sujet. C'est pourquoi, on nous avait appris que Â" dans l'Empire
ottoman, il n'y avait pas de classe bourgeoise Â". On traitait les
minorités comme Â" collaborateurs compradores Â" [Nota CVAN : par
extension, ce terme signifie "tirant sa fortune du commerce avec
l'étranger"]. Comme personne ne voulait se souvenir des minorités
qui formaient la classe bourgeoise de l'Empire ottoman, on allait
attendre le tour de leur Â"rendre justice Â".
La vérité est celle-ci : après la déportation, les biens arméniens
ont été pillés par les notables d'Anatolie.
Cela a été partagé.
Les maisons et les terrains ont changé de mains.
Certains ont confisqué gratuitement les biens de ceux qui sont partis,
et d'autres les ont capturés en tuant directement.
Cette élaboration correspondait évidemment a la politique de Â"former
sa propre bourgeoisie en transférant le capital des minorités aux
Turcs musulmans Â" du Comité Union et Progrès, et plus tard de
son héritier direct, le Parti Républicain du Peuple [Nota CVAN :
le CUP et le CHP].
Les bureaucrates qui n'ont pu obtenir de capital et qui n'ont pas pu
commencer l'étape d'industrialisation, n'ont malheureusement eu que
cette idée de Â" confiscation Â".
L'ignominie de l'impôt foncier est l'une de ces élaborations.
Les notables qui sont devenus soudainement riches en 1915 ont été
terrifiés lorsqu'ils ont perdu la guerre mondiale car les alliés
allaient demander des comptes lors de l'Armistice. Ils ont ainsi
soutenu Mustafa Kemal Pacha, la seule personne qui pourrait les sauver.
La préoccupation de Mustafa Kemal (qui ne s'était pas du tout
impliqué dans l'affaire arménienne) n'était pas de sauver ces hommes
contestables mais, bien entendu, de sauver tout le pays. Par contre,
le soutien des notables d'Anatolie avait une importance vitale. (Par
la suite, les notables ont corrompu cette alliance lorsqu'ils se sont
apercus que les bureaucrates d'Ankara ont commencé a les contrer au
lieu de les soutenir. Ils ont créé leur parti en se mettant dans
l'opposition ; voici la naissance du Parti Démocrate.) J'avais posé
la question suivante a certains amis journalistes qui appuient le
gouvernement : Â" Pourquoi soutenez-vous les absurdités commises par
les Unionistes ? Etes-vous fous ? Â". Je n'avais pas eu de réponse
convaincante.
Je vais répondre a leur place : Â" Parce que, actuellement, nous ne
voulons pas verser une indemnité de plusieurs milliards de dollars
sans aucune raison, alors que l'économie marche bien. Â"
©Traduction du turc : NA.T. pour le Collectif VAN - 25 septembre
2013 - www.collectifvan.org
Source originale:
http://www.sabah.com.tr/Yazarlar/ardic/2013/09/07/ermeni-meselesinin-koku-paradir
Titre original: "Ermeni meselesinin köku paradır "
Lire aussi notre dossier :
Dossier du Collectif VAN : les spoliations des biens des minorités
en Turquie
Et, en particulier :
Génocide arménien : l'argent du crime finance sa négation
Retour a la rubrique
Source/Lien : Sabah
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=75769
Publié le : 25-09-2013
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le journaliste turc,
Engin Ardıc, expose l'idée, de plus en plus répandue en Turquie,
que les compensations financières que devrait verser l'Etat turc
aux descendants des victimes du génocide arménien (terme qu'il se
garde bien d'employer d'ailleurs) sont a l'origine de l'absence de
résolution de la question arménienne. Il conclut : Â" J'avais posé
la question suivante a certains amis journalistes qui appuient le
gouvernement : Â" Pourquoi soutenez-vous les absurdités commises
par les Unionistes ? Etes-vous fous ? Â". Je n'avais pas eu de
réponse convaincante. Je vais répondre a leur place : Â" Parce que,
actuellement, nous ne voulons pas verser une indemnité de plusieurs
milliards de dollars sans aucune raison, alors que l'économie marche
bien. Â" Le Collectif VAN vous propose la traduction d'un article en
turc paru dans le journal turc, Sabah, le 7 septembre 2013.
Légende photo: Le quartier arménien d'Adana en ruines (source de
la photo : Musée du Génocide Arménien)
Sabah
L'argent est a l'origine de la question arménienne
07 Septembre 2013 Engin Ardıc
Je l'ai déja dit plusieurs fois, le professeur Suleyman YaÅ~_ar l'a
écrit aussi : l'argent est a l'origine de la question arménienne.
Le problème ne vient pas du fait que l'Arménie nous demanderait
les terres, mais du risque que les Arméniens demanderaient une
compensation. Ce n'est même pas Â" le prix du sang Â", c'est le prix
des biens arméniens confisqués...
En Turquie, en 1914, il y avait 1 million 200 mille Arméniens. En
1927, il n'en est restait que 77 mille. Ceci est définitif.
Nous ne nous demandons pas où ces personnes sont allées, les endroits
où elles sont allées sont évidents. Certaines sont allées Â"
vers l'autre monde Â", certaines en Syrie et au Liban, et d'autres
sont parties de la vers la France, les Etats-Unis et le Canada...
Ces personnes étaient a la fois les agriculteurs et les artisans
de l'Anatolie. Il n'existe pas de recherche/information correcte
concernant leur richesse, leur argent dans les banques, leurs terrains,
leurs jardins répandus dans toute l'Anatolie.
C'est pour cette raison que l'histoire de l'économie ottomane
est écrite sans l'évocation de l'économie arménienne, ou plus
généralement de Â" l'économie non-musulmane Â", comme indiqué
par le professeur Suleyman... Ni le grand Niyazi Berkes, ni Korkut
Boratay, ni mon doyen décédé Oktay Yenal, ni Yahya Tezel, ni
Å~^evket Pamuk... Nous ne croyons pas qu'ils l'ignoraient. Ils ont
dÃ" avoir peur, ils n'ont pas voulu s'attirer des ennuis en évoquant
ce sujet. C'est pourquoi, on nous avait appris que Â" dans l'Empire
ottoman, il n'y avait pas de classe bourgeoise Â". On traitait les
minorités comme Â" collaborateurs compradores Â" [Nota CVAN : par
extension, ce terme signifie "tirant sa fortune du commerce avec
l'étranger"]. Comme personne ne voulait se souvenir des minorités
qui formaient la classe bourgeoise de l'Empire ottoman, on allait
attendre le tour de leur Â"rendre justice Â".
La vérité est celle-ci : après la déportation, les biens arméniens
ont été pillés par les notables d'Anatolie.
Cela a été partagé.
Les maisons et les terrains ont changé de mains.
Certains ont confisqué gratuitement les biens de ceux qui sont partis,
et d'autres les ont capturés en tuant directement.
Cette élaboration correspondait évidemment a la politique de Â"former
sa propre bourgeoisie en transférant le capital des minorités aux
Turcs musulmans Â" du Comité Union et Progrès, et plus tard de
son héritier direct, le Parti Républicain du Peuple [Nota CVAN :
le CUP et le CHP].
Les bureaucrates qui n'ont pu obtenir de capital et qui n'ont pas pu
commencer l'étape d'industrialisation, n'ont malheureusement eu que
cette idée de Â" confiscation Â".
L'ignominie de l'impôt foncier est l'une de ces élaborations.
Les notables qui sont devenus soudainement riches en 1915 ont été
terrifiés lorsqu'ils ont perdu la guerre mondiale car les alliés
allaient demander des comptes lors de l'Armistice. Ils ont ainsi
soutenu Mustafa Kemal Pacha, la seule personne qui pourrait les sauver.
La préoccupation de Mustafa Kemal (qui ne s'était pas du tout
impliqué dans l'affaire arménienne) n'était pas de sauver ces hommes
contestables mais, bien entendu, de sauver tout le pays. Par contre,
le soutien des notables d'Anatolie avait une importance vitale. (Par
la suite, les notables ont corrompu cette alliance lorsqu'ils se sont
apercus que les bureaucrates d'Ankara ont commencé a les contrer au
lieu de les soutenir. Ils ont créé leur parti en se mettant dans
l'opposition ; voici la naissance du Parti Démocrate.) J'avais posé
la question suivante a certains amis journalistes qui appuient le
gouvernement : Â" Pourquoi soutenez-vous les absurdités commises par
les Unionistes ? Etes-vous fous ? Â". Je n'avais pas eu de réponse
convaincante.
Je vais répondre a leur place : Â" Parce que, actuellement, nous ne
voulons pas verser une indemnité de plusieurs milliards de dollars
sans aucune raison, alors que l'économie marche bien. Â"
©Traduction du turc : NA.T. pour le Collectif VAN - 25 septembre
2013 - www.collectifvan.org
Source originale:
http://www.sabah.com.tr/Yazarlar/ardic/2013/09/07/ermeni-meselesinin-koku-paradir
Titre original: "Ermeni meselesinin köku paradır "
Lire aussi notre dossier :
Dossier du Collectif VAN : les spoliations des biens des minorités
en Turquie
Et, en particulier :
Génocide arménien : l'argent du crime finance sa négation
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Source/Lien : Sabah