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Genocide Armenien : Une Exposition Qui Delie Les Langues En Turquie

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    GENOCIDE ARMENIEN : UNE EXPOSITION QUI DELIE LES LANGUES EN TURQUIE

    REVUE DE PRESSE

    Christian Varoujan Artin, animateur de l'association marseillaise
    Aram sur la mémoire arménienne, organise pour la première fois en
    Turquie, avec l'ONG franco-arménienne Yerkir Europe, une exposition
    sur les rescapés du génocide

    C'est la générosité du hasard. Christian Varoujan Artin,
    animateur de l'association marseillaise Aram sur la mémoire
    arménienne, organise pour la première fois en Turquie, avec l'ONG
    franco-arménienne Yerkir Europe, "99, portraits de l'exil", une
    exposition sur les rescapés du génocide.

    Il s'agit de reproductions de photos d'identité de rescapés
    du Génocide arménien qui accompagnaient entre 1923 et 1926 les
    certificats de baptême du patriarcat arménien du sud de la France
    et dont ARAM possède une grande partie des archives. Avant même
    les excuses d'Erdogan, un représentant du maire de la ville kurde
    de Diyarbakir, qui l'accueille au sud-est de la Turquie a évoqué
    "la tragédie vécue il y a 99 ans sur ces terres". "Les Kurdes ont
    subi le même sort. Des pillages, des génocides, de grands massacres
    ont été vécus."

    Et Muharrem Cebe, directeur des affaires culturelles de la
    municipalité de Diyarbakir, a ajouté : "Parmi les victimes, il
    y avait aussi des gens originaires de Diyarbakir. Ils ont été
    obligés de quitter leurs terres. Nous sommes très heureux de voir
    nos compatriotes revenir, même de manière symbolique, sur les
    terres où leurs grands-parents sont nés et ont vécu." Varoujan
    Artin raconte comment il a vécu l'annonce d'Erdogan et comment est
    accueillie l'exposition.

    Vous présentez cette exposition sur des portraits de rescapés du
    génocide arménien en Turquie alors qu'Erdogan a présenté des
    excuses aux descendants de ce génocide. Quelles sont les réactions
    des Turcs que vous avez vus ?

    Christian Varoujan Artin : Les Turcs et les Kurdes qui étaient avec
    moi au moment de la sortie de cette annonce ont d'abord cru a un
    canular sur internet. Puis, nous avons tous vérifié de nos côtés,
    sur nos médias respectifs en Turquie et en France. Nous avons analysé
    cette annonce ensemble après avoir été traduite. Les réactions
    ont été mitigées. Certains penchent pour un stratagème politique
    de plus pour relever l'image d'Erdogan au niveau international,
    d'autres pensent que la Turquie commence a "éduquer" ses masses de
    cette manière, d'autres encore que c'est l'Occident qui a forcé la
    main a Erdogan.

    Enfin, j'entends des réactions strictement politiques sur le plan
    intérieur de la Turquie, qui inscrivent cette déclaration dans la
    concurrence entre les conservateurs de l'AKP (le parti d'Erdogan) et
    les Kémalistes laïques qui ont jusqu'alors nié toute référence
    aux arméniens et favorisé le négationnisme d'Ã~Itat d'Ankara. C'est
    aussi une facon pour Erdogan de renvoyer la faute sur les Ottomans
    et les Jeunes Turcs en excluant les années de dénis officiels
    d'Ankara...

    Quelle est votre propre réaction ?

    C.-V.A. : Je pense personnellement que c'est une avancée, mais qui
    n'est pas aussi considérable qu'elle en a l'air car Erdogan reste
    sur le registre de la souffrance partagée au cours de la première
    guerre mondiale, et donc des torts partagés. Il n'a pas communiqué
    une seule fois avec le mot "génocide". Néanmoins, c'est un pas au
    niveau du gouvernement de la Turquie et une manière peut-être de
    préparer son peuple a une reconnaissance du génocide en 2015. Je
    pense qu'il faut d'abord rendre justice aux Arméniens, et qu'Erdogan
    ne désigne pas les coupables de l'assassinat collectif du million et
    demi d'Arméniens il y a 99 ans, en 1915. Même s'il faut un début a
    tout, un assassin ne présente pas ses condoléances aux descendants
    des victimes, il ne peut que demander d'abord pardon puis essayer de
    réparer a tout prix cette faute monstrueuse au regard de l'histoire
    de l'humanité.

    Cette déclaration est-t-elle largement commentée ? Cela annonce-t-il
    d'autres initiatives ?

    C.-V.A. : La société turque avance a plusieurs vitesses sur
    la question du génocide arménien, les initiatives sont le plus
    souvent le fait des Kurdes et des Turcs progressistes. La déclaration
    d'Erdogan est peut être une manière de préparer le centenaire du
    génocide de 1915, en commencant par employer des mots jusqu'alors
    jamais utilisés par un représentant de l'Ã~Itat turc. Cependant,
    nous attendons toujours le Willy Brandt turc qui s'agenouillera devant
    le monument des victimes du génocide a Erevan.

    Comment est accueillie votre exposition ? Lance-t-elle le débat ?

    C.-V.A. : On peut dire qu'elle réveille les consciences, et aide
    a délier les langues et libérer les esprits. Mais la situation a
    Diyarbakir est spécifique a la région et n'a pas la même valeur pour
    l'instant dans d'autres régions, fortement nationalistes et racistes.

    La mairie de Diyarbakir est en ce sens exemplaire, avec la restauration
    de la cathédrale arménienne de la ville, Sourp Guiragos, et de
    nombreuses initiatives de dialogues, telle cette exposition. Je suis
    très heureux qu'elle puisse avoir lieu en Turquie, je pensais que
    c'était impossible et bien la, c'est concret et réel. Espérons
    que nous puissions produire l'exposition dans d'autres régions et
    qu'elle soit accueillie avec le même enthousiasme.

    Y a-t-il aujourd'hui une volonté des Turcs de se pencher sur cette
    histoire ? De la comprendre ?

    C.-V.A. : Ici a Diyarbakir, capitale du Kurdistan turc, les Kurdes
    sont, eux, a 90% convaincus que le génocide arménien est une
    réalité, et je dois dire que depuis trois jours je recois des
    demandes de pardon des Kurdes avec lesquels je discute. Ils me disent
    tous que c'est une faute qu'ils ne savent pas comment expier, et se
    confondent en excuses... Les Turcs progressistes sont également sur
    le même ton.

    Tous ont la volonté d'avancer avec nous, Arméniens des 3e et 4e
    générations, ici sur les terres de l'Arménie historique où a
    eu lieu la scène de crime, et pour que nous élaborions ensemble
    un dialogue constructif et concret, afin de rétablir la justice
    spoliée. C'est une question universelle et non pas seulement un
    différent entre Turcs et Arméniens.

    Philippe Larue

    LA PROVENCE

    vendredi 25 avril 2014, Stéphane ©armenews.com
    http://www.armenews.com/article.php3?id_article=99288

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