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Le << zéro problème avec les voisins >> de la diplomatie turque a fa

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  • Le << zéro problème avec les voisins >> de la diplomatie turque a fa

    REVUE DE PRESSE
    Le > de la diplomatie turque a fait long feu


    La gare de Gaziantep aurait dû devenir la nouvelle plaque tournante de
    la diplomatie turque. Cette ville industrieuse située non loin de la
    frontière syrienne, où se mêlent les langues turque, arabe et kurde,
    était, pour l'ambitieuse politique étrangère du ministre des affaires
    étrangères de Recep Tayyip Erdogan, Ahmet Davutoglu, la porte d'entrée
    naturelle vers le Proche-Orient. Le 18 février 2010, c'est dans une
    ambiance de liesse que la gare a accueilli l'express
    Mossoul-Gaziantep. Ce jour-là, le train effectuait son tout premier
    voyage, en coupant à travers la Syrie, sur une ligne construite sous
    l'Empire ottoman et longtemps laissée à l'abandon. Les discours
    étaient plein de promesses de dollars, de prospérité et de paix entre
    >. Un train à grande vitesse entre Gaziantep et Alep
    devait aussi être lancé dans les plus brefs délais.

    La résurrection de cet ancien axe ferroviaire et commercial devait
    permettre à la Turquie de reprendre pied dans la région. Longtemps en
    froid avec ses voisins syrien et irakien, elle a opéré, sous la
    houlette de M. Davutoglu, un revirement spectaculaire à partir de
    2007. Ankara a renoué des liens solides avec le régime de Bachar
    Al-Assad, transportant même à Alep la totalité de son gouvernement
    pour sceller ce partenariat prometteur. A l'époque, le ministre turc
    des affaires étrangères se rendait quasiment chaque semaine à Damas,
    où il rencontrait également les dirigeants du Hamas palestinien. C'est
    en Syrie que sa diplomatie qualifiée de >, et son mot
    d'ordre >, a pris tout son sens. M.
    Davutoglu ambitionnait de sortir le régime syrien de son isolement et
    de l'amener à négocier avec Israël, alors un allié stratégique turc,
    en vue d'un accord sur le plateau du Golan.

    En Irak, partenaire économique de premier plan, Ankara a appliqué une
    autre stratégie. La Turquie a ouvert des consulats et des liaisons
    aériennes à Erbil, capitale de la province autonome kurde, à Nadjaf et
    à Bassora, en pays chiite. Et à Mossoul, ville mixte du nord, où elle
    était le seul pays à disposer d'une représentation diplomatique,
    inaugurée en 2009 par M. Davutoglu.

    RÊVES DE GRANDEUR RÉGIONALE EFFONDRÉS

    Quatre ans plus tard, l'effervescence est retombée à la gare de
    Gaziantep. La ligne pour Alep n'a jamais vu le jour. La ville du nord
    de la Syrie est ravagée par la guerre. Quant à l'express de Mossoul,
    il a cessé de fonctionner après trois mois d'activité et à peine une
    dizaine de voyages, dont certains à vide. Mossoul est tombée, en juin,
    aux mains des djihadistes de l'Etat islamique (EI). Et les rêves de
    grandeur régionale se sont effondrés pour Ankara. Le consulat sert
    désormais de quartier général au > Abou Bakr Al-Baghdadi et à
    ses hommes. Ces derniers retiennent en otage 49 personnes, dont le
    consul général turc et sa famille.

    Malgré les mises en garde, Ankara a refusé d'évacuer son personnel. Un
    ordre qui, selon des sources au sein du ministère, serait venu
    directement de M. Davutogu. Le ministre était persuadé que les
    djihadistes ne toucheraient pas aux intérêts turcs. >, critique pour sa part
    Ekmeleddin Ihsanoglu, ancien diplomate et principal adversaire de
    Recep Tayyip Erdogan à l'élection présidentielle, dimanche 10 août.

    En 2010, la stratégie de la Turquie, membre de l'OTAN et candidate à
    l'adhésion à l'Union européenne (UE), était saluée par ses alliés
    occidentaux. Ankara faisait figure de modèle de coexistence entre
    islam et démocratie, d'exemple à exporter dans les pays arabes aux
    dictatures chancelantes. M. Davutoglu, ancien professeur de relations
    internationales, était considéré comme un visionnaire pour sa thèse
    écrite dans les années 1990, >, qui
    replaçait la Turquie au centre de son hinterland et à la tête du monde
    musulman. Un pavé non traduit, que peu d'observateurs ont lu.

    Behlul Ozkan, un de ses anciens élèves à l'université de Marmara, est
    l'un des rares à avoir effectué une analyse critique et scientifique
    de la prose du professeur Davutoglu. Pour lui, le diplomate incarne
    l'expansionnisme turc et une vision panislamiste du Moyen-Orient.
    L'alliance avec les mouvements islamistes sunnites, et notamment avec
    les Frères musulmans, en est l'illustration. Inspiré par les
    théoriciens allemands du XIXe siècle, M. Davutoglu reprend le concept
    de Lebensraum (>), proposant de recréer une sphère
    d'influence turque dans les ex-provinces ottomanes - Balkans,
    Proche-Orient et Maghreb. Dénonçant une occidentalisation de l'Orient,
    >, estime M. Ozkan.

    CHAMPION DE LA CAUSE PALESTINIENNE

    Mais aujourd'hui, la politique étrangère de M. Davutoglu ne fait plus
    illusion tant ses échecs sont patents. Le dossier d'adhésion à l'UE
    est au point mort et même les relations avec les Etats-Unis se sont
    dégradées. >, souligne M. Ihsanoglu. L'un des tournants est survenu en mai
    2010, avec l'envoi d'une flottille pour briser le blocus de Gaza. Avec
    cette manoeuvre imaginée par le gouvernement et utilisant l'ONG
    islamiste radicale IHH, Ankara espérait faire plier Israël et devenir
    le champion de la cause palestinienne. Au lieu de cela, dix militants
    turcs ont été tués, la Turquie a perdu la confiance de son ex-allié
    israélien, le Hamas en est sorti renforcé.

    Ankara a ensuite manqué le virage des > et se
    retrouve aujourd'hui empêtré dans les crises syrienne et irakienne,
    qui débordent sur son territoire et menacent sa sécurité. Après avoir
    pactisé avec le régime Assad, la Turquie a soutenu la rébellion,
    fermant les yeux sur ses éléments les plus extrémistes et lui ouvrant
    son territoire. Des milliers de combattants djihadistes de l'Etat
    islamique et du Front Al-Nosra ont ainsi transité par la Turquie. En
    Egypte, où M. Erdogan a pris fait et cause pour les Frères musulmans
    de Mohamed Morsi, et en Palestine, où il reste très lié au Hamas, la
    politique de MM. Davutoglu et Erdogan a entraîné d'autres déconvenues.
    Pas de quoi, pourtant, entamer leur assurance.

    Guillaume Perrier (Istanbul, correspondance)

    Journaliste au Monde

    dimanche 10 août 2014,
    Stéphane (c)armenews.com



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