TURQUIE : PHOTOGRAPHIER LE PATRIMOINE CULTUREL
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=78710
Publié le : 25-02-2014
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
invite a lire la traduction de Georges Festa d'un article en anglais
de Liana Aghajanian publié sur le site Ianyan Mag, mise en ligne
sur le site Armenian Trends - Mes Arménies le 21 février 2014.
Armenian Trends - Mes Arménies
samedi 22 février 2014
Aydın Cetinbostanoglu - Interview
© www.fotoalem.com
Photographier le patrimoine culturel de la Turquie : Aydın
Cetinbostanoglu
par Liana Aghajanian
Ianyan Mag, 01.02.2012
Né en 1954 a Izmir, en Turquie, le photographe Aydın Cetinbostanoglu
documente les communautés gitanes, alévies, juives, chrétiennes
arabes et arméniennes de Turquie depuis plusieurs années, nouant
des liens fondés sur la confiance, obtenant ainsi un accès exclusif
a une complexité culturelle demeurée, en majeure partie, peu connue
des étrangers.
Désireux de rompre les barrières culturelles, Cetinbostanoglu
s'efforce de faire connaître ces diverses cultures depuis près de
quarante ans, utilisant la photographie comme outil, afin d'éduquer
et de révéler a la Turquie ses trésors culturels.
"Je partage leur bonheur comme leur tristesse," écrit-il sur son
site internet. "Ils m'observent en riant, en souriant, inquiets et
en pleurs... Je me suis fait beaucoup d'amis. J'ai de la chance, non ?"
Auteur d'expositions a travers la Turquie et l'Italie, en Allemagne
et en ex-Yougoslavie, et lauréat de nombreux prix, Cetinbostanoglu
évoque pour nous l'art de la photographie, sa manière de nouer des
relations avec ses sujets, son souhait de voyager en Arménie et ses
impressions, lorsqu'il a photographié le dernier village chrétien
arménien en Turquie.
- Ianyan Mag : Qu'est-ce qui t'a incité a devenir photographe ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Quand j'étais jeune, pour des raisons
économiques, j'ai dÃ" apprendre un métier et gagner de l'argent. Dans
les années 1960, la seule facon d'apprendre un métier était
de travailler avec un patron. J'ai dÃ" choisir cette voie. Devenir
photographe était pour moi une nécessité. En 1966-1967, j'ai passé
mes vacances d'été a travailler dans un atelier de photographie. En
1970, j'ai pris ma première photographie avec un appareil emprunté
a un ami.
J'arrivais a gagner de l'argent en vendant des photos que j'avais
prises. A part ca, j'ai commencé a réaliser des photos personnelles
et je les ai montrées a mon professeur d'art. Il m'a demandé pourquoi
je n'organiserais pas ma propre exposition de photographie et m'a
adressé a un ami qui gérait une bibliothèque. Et j'ai inauguré
ma première exposition, alors que j'étais lycéen en 1973.
- Ianyan Mag : Tu as pris un grand nombre de photos en te concentrant
sur des cultures et des groupes ethniques minoritaires en Turquie,
comme les Alévis et les Gitans, qui ne sont en général pas
photographiés ou peu abordés dans la presse. Qu'est-ce qui
t'intéresse dans le fait de documenter ces sous-groupes et pourquoi
est-ce important de le faire, selon toi ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Après mes études secondaires en 1973, j'ai
voyagé en Anatolie avec l'argent que j'avais économisé. Ce fut ma
première rencontre avec la population d'Anatolie et sa culture. J'ai
ouvert une exposition avec mes premières photographies de voyage, a
mon retour. Entre 1974 et 1978, j'ai étudié les sciences politiques
a l'université d'Ankara. Ma formation antérieure et cette époque
troublée par des événements économiques et sociaux ont influencé
notre manière de voir les photos d'actualité.
J'ai été témoin de plusieurs événements historiques durant cette
période, que j'ai photographiés. Le 1er mai 1977, alors que je
prenais des photos, 37 personnes ont été tuées. J'ai vu et vécu
leurs souffrances.
J'ai continué a voyager et a photographier l'Anatolie. J'ai partagé
la vie des gens a de multiples reprises. J'acceptais les couleurs des
différentes traditions culturelles qui font la richesse de l'Anatolie.
Ces couleurs doivent être photographiées et documentées.
- Ianyan Mag : Une grande part de ton activité photographique consiste
aussi a documenter les Arméniens qui vivent en Turquie. Pourquoi
as-tu choisi de le faire et qu'en as-tu appris ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Les Alévis, les Gitans et les Arabes sont
présents dans mes photographies, ainsi que les Arméniens. En fait,
je photographie les Gitans depuis 1999, et ce projet continue. La
différence, quand je travaille avec des Arméniens, c'est qu'ils
possèdent une expérience culturelle plus riche. Nous suivons ces
"Maîtres du Grand Bazar," tout en assistant aux cérémonies et
aux rites religieux. J'ai commencé a travailler avec les Maîtres
du Grand Bazar en 2006, en nouant des amitiés au fil du temps,
qui existent toujours.
En 2010, j'ai photographié un mariage religieux. J'avais oublié mon
flash après la cérémonie. En rentrant chez moi, je m'en suis apercu
et, le lendemain, je suis revenu dans l'église, où des religieux me
l'ont remis. J'ai été très touché par cette marque d'honnêteté.
Durant une cérémonie d'ordination d'un prêtre, que j'ai
photographiée, l'officiant demanda a l'assemblée si quelque obstacle
s'opposait au candidat. Si quelqu'un émet un avis négatif, la
cérémonie peut être annulée. Même si cette attitude relève,
elle aussi, d'un rituel de l'Eglise, elle m'intéresse car elle en
montre le fonctionnement.
Mes projets sur les Arméniens s'accompagnent d'observations
similaires.
- Ianyan Mag : Que penses-tu de la communauté arménienne de Turquie ?
- Aydın Cetinbostanoglu : J'ai beaucoup appris de cette culture au
cours de mon travail. L'amitié compte beaucoup pour les Arméniens. En
2011, j'ai participé aux cérémonies arméniennes de Pâques. Nous
avons apporté une bouteille d'alcool et des Å"ufs de Pâques
avec des motifs peints, accompagnés de pelures d'oignons. Après
la cérémonie, nous avons déposé nos Å"ufs et l'alcool sur la
table. Des membres de la communauté nous ont dit de ne pas casser
nos Å"ufs. Au lieu de cela, ils les emportent chez eux pour les
conserver. Cette attitude se fonde indubitablement sur un respect
du travail.
- Ianyan Mag : De nombreuses minorités que tu documentes luttent pour
l'égalité des droits en Turquie. Grâce a tes échanges avec eux,
qu'as-tu appris de leurs combats et quelle solution te paraît la
meilleure pour régler ce problème ?
- Aydın Cetinbostanoglu : La lutte pour la démocratie est
une nécessité pour tout le monde et devrait être accordée
a chacun. Auquel cas, il est alors possible de s'exprimer et de
protéger sa culture.
- Ianyan Mag : Au cours de tes voyages, tu as visité le dernier
village chrétien arménien de Turquie, Vakıflı. Tes impressions ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Avédis est le doyen du village de
Vakıflı.
C'est aussi un ami. Il est le père d'Artin. Lors des fêtes de
l'Ascension [Asdvadzadzin] en 2009, j'ai été l'hôte de cette
famille.
Avédis est une histoire vivante. Il m'a appris l'histoire du
village et m'a ramené au passé. Il compte des proches qui vivent
a l'étranger.
Nous formions une vaste communauté et nous avons participé aux
festivités.
Vakıflı est le seul village arménien, près de la ville d'Antakya,
située au sud de la Turquie. Chaque année, a la mi-aoÃ"t, des
milliers d'Arméniens s'y rassemblent et célèbrent leur fête
religieuse de l'Ascension. Le premier jour, le prêtre de l'église
bénit le sel, première étape des célébrations. Les femmes et les
hommes du village commencent alors a préparer le mets traditionnel,
le "harissa" (appelé "keskek" en Anatolie). Les aliments cuisent dans
sept grands chaudrons du soir au matin. Ces sept chaudrons symbolisent
les sept villages qui composaient autrefois le Mont Musa.
Durant la nuit, les gens dansent et se divertissent avec de la
musique et des chants arméniens traditionnels. Le deuxième jour,
le prêtre bénit les raisins et organise une cérémonie religieuse
dans le jardin de l'église. Après quoi, il bénit le "harissa,"
avant de le distribuer a la population. Puis les gens du village
partagent la nourriture.
L'oncle d'Avédis m'apprit qu'une grande partie des Arméniens qui
vivaient la, quittèrent leurs villages et gagnèrent le Liban, suite
au retrait des Francais. Une bien triste histoire. Si la population
de ces sept villages était en vie, la région serait plus prospère.
Aujourd'hui, ils s'occupent d'agriculture bio et alimentent le marché
avec des produits agricoles a forte plus-value. Lors des festivités,
la population atteint entre 2 500 et 3 000 personnes, invités compris,
pour redescendre ensuite a une centaine.
- Ianyan Mag : Comment crées-tu un lien avec les gens que tu
photographies ? Est-ce difficile ? Acceptent-ils que tu les
photographies ou bien dois-tu les convaincre ? Comment les
approches-tu ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Un des fondateurs de l'agence Magnum, Robert
Capa, avait une belle expression : "Ta photo n'est pas assez proche
de son sujet, si elle n'est pas belle," disait-il. Ce qui signifie :
"Fais partie du sujet." Une philosophie que je fais mienne. Je prends
des photographies de gens et de cultures de l'Anatolie depuis pas mal
de temps. C'est pourquoi je peux travailler avec eux plus facilement
et entretenir de bons rapports aujourd'hui. Je partage leur vie et,
avec le temps, les thèmes photographiques viennent a moi.
- Ianyan Mag : Quels sujets ou quelles personnes n'as-tu pas encore
photographiés, bien que tu aimerais, et pourquoi ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Tout d'abord, j'aimerais visiter l'Arménie
et prendre des photographies. Pour une raison essentielle : les
combiner avec mes Å"uvres et créer tout un corpus arménien. Autre
option, l'Inde, un grand pays, où de nombreuses cultures coexistent.
J'aimerais me balader sur des périodes plus longues et réaliser une
étude en couleurs. J'ai en projet les cultures anciennes du Mexique,
de l'Egypte et d'Extrême-Orient.
- Ianyan Mag : Qu'espères-tu que les gens retirent de ta photographie
?
- Aydın Cetinbostanoglu : J'aimerais que les gens qui suivent mon
travail pensent un peu plus a ces cultures et les apprécient.
____________
Source :
http://www.ianyanmag.com/2012/02/01/photographing-turkey-aydin-cetinbostanoglu/
Traduction : © Georges Festa - 02.2014
site d'Aydin Cetinbostanoglu : www.cetinbostanoglu.com
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Source/Lien : Armenian Trends - Mes Arménies
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=78710
Publié le : 25-02-2014
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
invite a lire la traduction de Georges Festa d'un article en anglais
de Liana Aghajanian publié sur le site Ianyan Mag, mise en ligne
sur le site Armenian Trends - Mes Arménies le 21 février 2014.
Armenian Trends - Mes Arménies
samedi 22 février 2014
Aydın Cetinbostanoglu - Interview
© www.fotoalem.com
Photographier le patrimoine culturel de la Turquie : Aydın
Cetinbostanoglu
par Liana Aghajanian
Ianyan Mag, 01.02.2012
Né en 1954 a Izmir, en Turquie, le photographe Aydın Cetinbostanoglu
documente les communautés gitanes, alévies, juives, chrétiennes
arabes et arméniennes de Turquie depuis plusieurs années, nouant
des liens fondés sur la confiance, obtenant ainsi un accès exclusif
a une complexité culturelle demeurée, en majeure partie, peu connue
des étrangers.
Désireux de rompre les barrières culturelles, Cetinbostanoglu
s'efforce de faire connaître ces diverses cultures depuis près de
quarante ans, utilisant la photographie comme outil, afin d'éduquer
et de révéler a la Turquie ses trésors culturels.
"Je partage leur bonheur comme leur tristesse," écrit-il sur son
site internet. "Ils m'observent en riant, en souriant, inquiets et
en pleurs... Je me suis fait beaucoup d'amis. J'ai de la chance, non ?"
Auteur d'expositions a travers la Turquie et l'Italie, en Allemagne
et en ex-Yougoslavie, et lauréat de nombreux prix, Cetinbostanoglu
évoque pour nous l'art de la photographie, sa manière de nouer des
relations avec ses sujets, son souhait de voyager en Arménie et ses
impressions, lorsqu'il a photographié le dernier village chrétien
arménien en Turquie.
- Ianyan Mag : Qu'est-ce qui t'a incité a devenir photographe ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Quand j'étais jeune, pour des raisons
économiques, j'ai dÃ" apprendre un métier et gagner de l'argent. Dans
les années 1960, la seule facon d'apprendre un métier était
de travailler avec un patron. J'ai dÃ" choisir cette voie. Devenir
photographe était pour moi une nécessité. En 1966-1967, j'ai passé
mes vacances d'été a travailler dans un atelier de photographie. En
1970, j'ai pris ma première photographie avec un appareil emprunté
a un ami.
J'arrivais a gagner de l'argent en vendant des photos que j'avais
prises. A part ca, j'ai commencé a réaliser des photos personnelles
et je les ai montrées a mon professeur d'art. Il m'a demandé pourquoi
je n'organiserais pas ma propre exposition de photographie et m'a
adressé a un ami qui gérait une bibliothèque. Et j'ai inauguré
ma première exposition, alors que j'étais lycéen en 1973.
- Ianyan Mag : Tu as pris un grand nombre de photos en te concentrant
sur des cultures et des groupes ethniques minoritaires en Turquie,
comme les Alévis et les Gitans, qui ne sont en général pas
photographiés ou peu abordés dans la presse. Qu'est-ce qui
t'intéresse dans le fait de documenter ces sous-groupes et pourquoi
est-ce important de le faire, selon toi ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Après mes études secondaires en 1973, j'ai
voyagé en Anatolie avec l'argent que j'avais économisé. Ce fut ma
première rencontre avec la population d'Anatolie et sa culture. J'ai
ouvert une exposition avec mes premières photographies de voyage, a
mon retour. Entre 1974 et 1978, j'ai étudié les sciences politiques
a l'université d'Ankara. Ma formation antérieure et cette époque
troublée par des événements économiques et sociaux ont influencé
notre manière de voir les photos d'actualité.
J'ai été témoin de plusieurs événements historiques durant cette
période, que j'ai photographiés. Le 1er mai 1977, alors que je
prenais des photos, 37 personnes ont été tuées. J'ai vu et vécu
leurs souffrances.
J'ai continué a voyager et a photographier l'Anatolie. J'ai partagé
la vie des gens a de multiples reprises. J'acceptais les couleurs des
différentes traditions culturelles qui font la richesse de l'Anatolie.
Ces couleurs doivent être photographiées et documentées.
- Ianyan Mag : Une grande part de ton activité photographique consiste
aussi a documenter les Arméniens qui vivent en Turquie. Pourquoi
as-tu choisi de le faire et qu'en as-tu appris ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Les Alévis, les Gitans et les Arabes sont
présents dans mes photographies, ainsi que les Arméniens. En fait,
je photographie les Gitans depuis 1999, et ce projet continue. La
différence, quand je travaille avec des Arméniens, c'est qu'ils
possèdent une expérience culturelle plus riche. Nous suivons ces
"Maîtres du Grand Bazar," tout en assistant aux cérémonies et
aux rites religieux. J'ai commencé a travailler avec les Maîtres
du Grand Bazar en 2006, en nouant des amitiés au fil du temps,
qui existent toujours.
En 2010, j'ai photographié un mariage religieux. J'avais oublié mon
flash après la cérémonie. En rentrant chez moi, je m'en suis apercu
et, le lendemain, je suis revenu dans l'église, où des religieux me
l'ont remis. J'ai été très touché par cette marque d'honnêteté.
Durant une cérémonie d'ordination d'un prêtre, que j'ai
photographiée, l'officiant demanda a l'assemblée si quelque obstacle
s'opposait au candidat. Si quelqu'un émet un avis négatif, la
cérémonie peut être annulée. Même si cette attitude relève,
elle aussi, d'un rituel de l'Eglise, elle m'intéresse car elle en
montre le fonctionnement.
Mes projets sur les Arméniens s'accompagnent d'observations
similaires.
- Ianyan Mag : Que penses-tu de la communauté arménienne de Turquie ?
- Aydın Cetinbostanoglu : J'ai beaucoup appris de cette culture au
cours de mon travail. L'amitié compte beaucoup pour les Arméniens. En
2011, j'ai participé aux cérémonies arméniennes de Pâques. Nous
avons apporté une bouteille d'alcool et des Å"ufs de Pâques
avec des motifs peints, accompagnés de pelures d'oignons. Après
la cérémonie, nous avons déposé nos Å"ufs et l'alcool sur la
table. Des membres de la communauté nous ont dit de ne pas casser
nos Å"ufs. Au lieu de cela, ils les emportent chez eux pour les
conserver. Cette attitude se fonde indubitablement sur un respect
du travail.
- Ianyan Mag : De nombreuses minorités que tu documentes luttent pour
l'égalité des droits en Turquie. Grâce a tes échanges avec eux,
qu'as-tu appris de leurs combats et quelle solution te paraît la
meilleure pour régler ce problème ?
- Aydın Cetinbostanoglu : La lutte pour la démocratie est
une nécessité pour tout le monde et devrait être accordée
a chacun. Auquel cas, il est alors possible de s'exprimer et de
protéger sa culture.
- Ianyan Mag : Au cours de tes voyages, tu as visité le dernier
village chrétien arménien de Turquie, Vakıflı. Tes impressions ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Avédis est le doyen du village de
Vakıflı.
C'est aussi un ami. Il est le père d'Artin. Lors des fêtes de
l'Ascension [Asdvadzadzin] en 2009, j'ai été l'hôte de cette
famille.
Avédis est une histoire vivante. Il m'a appris l'histoire du
village et m'a ramené au passé. Il compte des proches qui vivent
a l'étranger.
Nous formions une vaste communauté et nous avons participé aux
festivités.
Vakıflı est le seul village arménien, près de la ville d'Antakya,
située au sud de la Turquie. Chaque année, a la mi-aoÃ"t, des
milliers d'Arméniens s'y rassemblent et célèbrent leur fête
religieuse de l'Ascension. Le premier jour, le prêtre de l'église
bénit le sel, première étape des célébrations. Les femmes et les
hommes du village commencent alors a préparer le mets traditionnel,
le "harissa" (appelé "keskek" en Anatolie). Les aliments cuisent dans
sept grands chaudrons du soir au matin. Ces sept chaudrons symbolisent
les sept villages qui composaient autrefois le Mont Musa.
Durant la nuit, les gens dansent et se divertissent avec de la
musique et des chants arméniens traditionnels. Le deuxième jour,
le prêtre bénit les raisins et organise une cérémonie religieuse
dans le jardin de l'église. Après quoi, il bénit le "harissa,"
avant de le distribuer a la population. Puis les gens du village
partagent la nourriture.
L'oncle d'Avédis m'apprit qu'une grande partie des Arméniens qui
vivaient la, quittèrent leurs villages et gagnèrent le Liban, suite
au retrait des Francais. Une bien triste histoire. Si la population
de ces sept villages était en vie, la région serait plus prospère.
Aujourd'hui, ils s'occupent d'agriculture bio et alimentent le marché
avec des produits agricoles a forte plus-value. Lors des festivités,
la population atteint entre 2 500 et 3 000 personnes, invités compris,
pour redescendre ensuite a une centaine.
- Ianyan Mag : Comment crées-tu un lien avec les gens que tu
photographies ? Est-ce difficile ? Acceptent-ils que tu les
photographies ou bien dois-tu les convaincre ? Comment les
approches-tu ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Un des fondateurs de l'agence Magnum, Robert
Capa, avait une belle expression : "Ta photo n'est pas assez proche
de son sujet, si elle n'est pas belle," disait-il. Ce qui signifie :
"Fais partie du sujet." Une philosophie que je fais mienne. Je prends
des photographies de gens et de cultures de l'Anatolie depuis pas mal
de temps. C'est pourquoi je peux travailler avec eux plus facilement
et entretenir de bons rapports aujourd'hui. Je partage leur vie et,
avec le temps, les thèmes photographiques viennent a moi.
- Ianyan Mag : Quels sujets ou quelles personnes n'as-tu pas encore
photographiés, bien que tu aimerais, et pourquoi ?
- Aydın Cetinbostanoglu : Tout d'abord, j'aimerais visiter l'Arménie
et prendre des photographies. Pour une raison essentielle : les
combiner avec mes Å"uvres et créer tout un corpus arménien. Autre
option, l'Inde, un grand pays, où de nombreuses cultures coexistent.
J'aimerais me balader sur des périodes plus longues et réaliser une
étude en couleurs. J'ai en projet les cultures anciennes du Mexique,
de l'Egypte et d'Extrême-Orient.
- Ianyan Mag : Qu'espères-tu que les gens retirent de ta photographie
?
- Aydın Cetinbostanoglu : J'aimerais que les gens qui suivent mon
travail pensent un peu plus a ces cultures et les apprécient.
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Source :
http://www.ianyanmag.com/2012/02/01/photographing-turkey-aydin-cetinbostanoglu/
Traduction : © Georges Festa - 02.2014
site d'Aydin Cetinbostanoglu : www.cetinbostanoglu.com
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