TURQUIE : MEMOIRE OTTOMANE, RETOUR DU REFOULE
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=77839
Publie le : 14-01-2014
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le Collectif VAN
vous propose cet article d'Etienne Copeaux publie sur son blog
susam-sokak.fr.
Legende photo : Le petit-fils d'Abdulhamid II, Selim Osmanoglu (en
turban blanc), lors d'une celebration "ottomane" a Berlin en 1997
(photo Turkiye, 22 avril 1997)
susam-sokak.fr
Esquisse n° 34 - Memoire ottomane, retour du refoule
Les evenements de Bosnie et du Kosovo, le siège de Sarajevo par les
Serbes (1992-1996), le massacre de Srebrenica (1995), ont revolte
l'opinion publique en Turquie. La sensibilite des Turcs a l'egard
de ces evenements a revele la force de la composante " ottomane "
du nationalisme turc, qui avait ete plus ou moins occultee.
Le mouvement kemaliste avait besoin de s'affirmer comme le renouveau
de la Turquie : en utilisant l'image, populaire en Europe, du "
declin ottoman ", declin presente comme consubstantiel a une dynastie
incapable de gerer son patrimoine, il a fait croire a une coupure
radicale entre la republique naissante et l'empire.
Il est vrai que certaines reformes de Mustafa Kemal sont des coupures
decisives, comme celle de l'ecriture et de la langue, par lesquelles
les nouvelles generations turques sont devenues etrangères a leur
propre passe. La volonte de coupure accordait beaucoup d'importance aux
signes visuels ; l'ecriture en est un, et c'est jusqu'a la designation
de cette ecriture que va l'opprobre, car on ne dit pas, a son propos,
qu'elle est en " caractères arabes ", mais que ce sont les " anciennes
lettres " (eski harfler). L'autre signe visuel est le vetement, et la
" modernisation " forcee est passee par deux lois, en 1925 et 1934,
interdisant le port du fez et de certains vetements.
Or ces signes visuels, qui devraient logiquement renvoyer au referent
" epoque ottomane ", renvoyaient de plus en plus, dans les annees 1990,
au referent " islam " voire " islamisme ", grâce au fonctionnement des
connotations : la republique est connotee " laïque ", donc supposee
ennemie de la religion. La memoire ottomane, releguee aux oubliettes,
et la religion, repoussee dans la sphère privee, se retrouvaient de
facto dans un ensemble de signifiants communs.
Pourtant, a la fin du vingtième siècle, ce n'est pas seulement dans la
sphère politique de l'islam qu'on pouvait observer un retour du refoule
ottoman. Celui-ci procedait egalement du souci de retrouver passe
reel de son pays ou de sa famille (alors que le kemalisme renvoyait a
une Asie centrale lointaine et fantasmatique), et ce desir fortement
present dans la societe etait d'ailleurs facilite par l'autonomisation
des recherches historiques par rapport a la pensee officielle.
Lire la suite sur susam-sokak le blog d'Etienne Copeaux
Retour a la rubrique
Source/Lien : Infos Collectif VAN
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(photo Turkiye, 22 avril 1997)
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Les evenements de Bosnie et du Kosovo, le siège de Sarajevo par les
Serbes (1992-1996), le massacre de Srebrenica (1995), ont revolte
l'opinion publique en Turquie. La sensibilite des Turcs a l'egard
de ces evenements a revele la force de la composante " ottomane "
du nationalisme turc, qui avait ete plus ou moins occultee.
Le mouvement kemaliste avait besoin de s'affirmer comme le renouveau
de la Turquie : en utilisant l'image, populaire en Europe, du "
declin ottoman ", declin presente comme consubstantiel a une dynastie
incapable de gerer son patrimoine, il a fait croire a une coupure
radicale entre la republique naissante et l'empire.
Il est vrai que certaines reformes de Mustafa Kemal sont des coupures
decisives, comme celle de l'ecriture et de la langue, par lesquelles
les nouvelles generations turques sont devenues etrangères a leur
propre passe. La volonte de coupure accordait beaucoup d'importance aux
signes visuels ; l'ecriture en est un, et c'est jusqu'a la designation
de cette ecriture que va l'opprobre, car on ne dit pas, a son propos,
qu'elle est en " caractères arabes ", mais que ce sont les " anciennes
lettres " (eski harfler). L'autre signe visuel est le vetement, et la
" modernisation " forcee est passee par deux lois, en 1925 et 1934,
interdisant le port du fez et de certains vetements.
Or ces signes visuels, qui devraient logiquement renvoyer au referent
" epoque ottomane ", renvoyaient de plus en plus, dans les annees 1990,
au referent " islam " voire " islamisme ", grâce au fonctionnement des
connotations : la republique est connotee " laïque ", donc supposee
ennemie de la religion. La memoire ottomane, releguee aux oubliettes,
et la religion, repoussee dans la sphère privee, se retrouvaient de
facto dans un ensemble de signifiants communs.
Pourtant, a la fin du vingtième siècle, ce n'est pas seulement dans la
sphère politique de l'islam qu'on pouvait observer un retour du refoule
ottoman. Celui-ci procedait egalement du souci de retrouver passe
reel de son pays ou de sa famille (alors que le kemalisme renvoyait a
une Asie centrale lointaine et fantasmatique), et ce desir fortement
present dans la societe etait d'ailleurs facilite par l'autonomisation
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