JOURNAL LE MONDE
La Shoah, un traumatisme héréditaire
Le drame vécu par les victimes du génocide laisse une marque dans
l'ADN de leurs descendants
Le traumatisme de la Shoah se transmet aux descendants. Et pas
seulement au travers des récits des parents qui ont connu les camps de
concentration, la torture ou la crainte d'ĂŞtre faits prisonniers. Non.
Ce traumatisme laisse une empreinte biologique, une marque sur l'ADN
de la génération suivante. C'est ce que montrent Rachel Yehuda et son
équipe de l'école de médecine du Mont-Sinaï à New York dans l'American
Journal of Psychiatry du 16 mai, après une épopée scientifique débutée
en 1998. A l'Ă©poque, la chercheuse observe que les descendants des
personnes traumatisées par la Shoah présentent plus de risques de
développer une dépression ou un syndrome de stress post-traumatique
(SSPT), un trouble anxieux sévère qui survient à la suite d'une
expérience choquante. Il en va de même chez des familles
palestiniennes touchées par la guerre ou encore chez des Cambodgiens
ayant survécu au génocide perpétré par les Khmers rouges. Toutefois,
cette vulnérabilité ne serait pas liée au seul poids du contexte
familial. Empreinte réversible Rachel Yehuda s'en aperçoit
fortuitement au lendemain de la catastrophe du 11 septembre 2001,
lorsque 1 700 femmes enceintes sont affectées par l'effondrement des
tours du World Trade Center. Quelques semaines après le drame, la
chercheuse analyse la salive de 38 d'entre elles et observe que celles
présentant un SSPT ont un faible taux basal d'une hormone de stress
appelée cortisol. > Un an plus tard, Rachel Yehuda analyse la salive des
bébés et s'aperçoit que les descendants des femmes présentant un SSPT
ont eux aussi un niveau de cortisol très bas. Rien de tel n'est
observé chez les enfants des femmes ayant vécu la catastrophe sans
être traumatisées. Le même phénomène est constaté chez les descendants
des survivants de la Shoah, à cela près que le destin psychologique
des enfants varie selon le sexe du parent traumatisé. Ainsi, avoir une
mère souffrant d'un SSPT augmente les risques de SSPT, tandis qu'avoir
un père atteint augmente les risques de dépression. Des résultats qui,
pour la chercheuse, posent la question du mode de transmission de ce
traumatisme. Entre 2010 et 2012, elle convoque 95 descendants des
survivants de la Shoah et leur fait remplir un questionnaire très
détaillé sur leur état psychologique et celui de leurs parents, l'idée
étant de déterminer si l'un, l'autre ou les deux souffraient d'un
SSPT. Elle effectue un prélèvement de salive, pour la teneur en
cortisol. Puis une prise de sang, pour déterminer si une zone de
l'ADN, le promoteur du gène GR-1F, est pourvue d'un groupement
méthyle. Cette marque biochimique apposée sur l'ADN, dite
épigénétique, permet de réprimer l'expression du gène codant pour la
synthèse de récepteur au cortisol. Elle montre ainsi que les individus
dont seul le père souffrait de SSPT présentent des taux de cortisol
plus élevés et une méthylation accrue du promoteur du gène GR-1F que
ceux ne possédant aucun parent frappé d'un SSPT. Cette augmentation de
la méthylation est absente lorsque seule la mère ou les deux parents
souffrent de SSPT.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
La Shoah, un traumatisme héréditaire
Le drame vécu par les victimes du génocide laisse une marque dans
l'ADN de leurs descendants
Le traumatisme de la Shoah se transmet aux descendants. Et pas
seulement au travers des récits des parents qui ont connu les camps de
concentration, la torture ou la crainte d'ĂŞtre faits prisonniers. Non.
Ce traumatisme laisse une empreinte biologique, une marque sur l'ADN
de la génération suivante. C'est ce que montrent Rachel Yehuda et son
équipe de l'école de médecine du Mont-Sinaï à New York dans l'American
Journal of Psychiatry du 16 mai, après une épopée scientifique débutée
en 1998. A l'Ă©poque, la chercheuse observe que les descendants des
personnes traumatisées par la Shoah présentent plus de risques de
développer une dépression ou un syndrome de stress post-traumatique
(SSPT), un trouble anxieux sévère qui survient à la suite d'une
expérience choquante. Il en va de même chez des familles
palestiniennes touchées par la guerre ou encore chez des Cambodgiens
ayant survécu au génocide perpétré par les Khmers rouges. Toutefois,
cette vulnérabilité ne serait pas liée au seul poids du contexte
familial. Empreinte réversible Rachel Yehuda s'en aperçoit
fortuitement au lendemain de la catastrophe du 11 septembre 2001,
lorsque 1 700 femmes enceintes sont affectées par l'effondrement des
tours du World Trade Center. Quelques semaines après le drame, la
chercheuse analyse la salive de 38 d'entre elles et observe que celles
présentant un SSPT ont un faible taux basal d'une hormone de stress
appelée cortisol. > Un an plus tard, Rachel Yehuda analyse la salive des
bébés et s'aperçoit que les descendants des femmes présentant un SSPT
ont eux aussi un niveau de cortisol très bas. Rien de tel n'est
observé chez les enfants des femmes ayant vécu la catastrophe sans
être traumatisées. Le même phénomène est constaté chez les descendants
des survivants de la Shoah, à cela près que le destin psychologique
des enfants varie selon le sexe du parent traumatisé. Ainsi, avoir une
mère souffrant d'un SSPT augmente les risques de SSPT, tandis qu'avoir
un père atteint augmente les risques de dépression. Des résultats qui,
pour la chercheuse, posent la question du mode de transmission de ce
traumatisme. Entre 2010 et 2012, elle convoque 95 descendants des
survivants de la Shoah et leur fait remplir un questionnaire très
détaillé sur leur état psychologique et celui de leurs parents, l'idée
étant de déterminer si l'un, l'autre ou les deux souffraient d'un
SSPT. Elle effectue un prélèvement de salive, pour la teneur en
cortisol. Puis une prise de sang, pour déterminer si une zone de
l'ADN, le promoteur du gène GR-1F, est pourvue d'un groupement
méthyle. Cette marque biochimique apposée sur l'ADN, dite
épigénétique, permet de réprimer l'expression du gène codant pour la
synthèse de récepteur au cortisol. Elle montre ainsi que les individus
dont seul le père souffrait de SSPT présentent des taux de cortisol
plus élevés et une méthylation accrue du promoteur du gène GR-1F que
ceux ne possédant aucun parent frappé d'un SSPT. Cette augmentation de
la méthylation est absente lorsque seule la mère ou les deux parents
souffrent de SSPT.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress