VERS OU PENCHE L'ARMENIE?
RIA Novosti
26 juin 2014
Par Iouri Gorodnenko, RIA Novosti
L'Union economique eurasiatique (UEE) entrera en vigueur le 1er janvier
2015. Les hommes politiques americains se sont exprimes a plusieurs
reprises - et negativement - a ce sujet. Au second semestre 2014
Washington devrait redoubler d'efforts pour empecher l'integration
eurasiatique. L'Armenie sera certainement sa prochaine cible après
l'Ukraine.
Erevan devrait prochainement adherer a l'accord sur la creation de
l'Union economique eurasiatique. Il serait donc possible pour celui
qui s'y oppose de saboter l'UEE de l'interieur en organisant un coup
d'Etat dans l'un de ses pays membres.
Ensuite, l'Armenie est sur la route qui mène aux regions petrolifères
de la mer Caspienne.
Enfin, une base militaire russe se situe sur le territoire armenien:
il est donc possible d'organiser des provocations contre les militaires
russes pour les impliquer indirectement dans un conflit militaire.
L'opposition
L'activite des ambassadeurs americain John Heffern et polonais Zdzislaw
Raczynski confirme que l'Armenie pourrait etre la prochaine sur la
liste de Washington après l'Ukraine. Ils sont en consultations avec
les leaders de l'opposition armenienne, Levon Ter-Petrossian (Congrès
national armenien) et Raffi Ovannissian (Heritage), qui participent
activement aux activites antirusses.
Ter-Petrossian appelle desormais a changer de gouvernement "rapidement"
et a transformer le referendum constitutionnel en "rassemblement
national de defiance envers le gouvernement".
Dans l'ensemble, la rhetorique antirusse de l'opposition, qui contrôle
près d'un tiers des sièges du parlement, est extremement primitive.
Par exemple, les arguments suivants sont encore cites pour "prouver"
l'implication de la Russie dans la politique du genocide armenien:
- Le ministre russe des Affaires etrangères Alexeï Lobanov-Rostovski
aurait declare a la fin du XIXe siècle: "Nous avons besoin d'une
Armenie sans Armeniens";
- Le gouverneur du Caucase au debut du XXe siècle Grigori Golitsine
a dit: "Je ferai en sorte que le seul Armenien reste a Tiflis soit
un Armenien empaille au musee de la ville".
Mais le fait est qu'aucune de ces phrases n'a ete confirmee par des
sources historiques. Neanmoins, dans le contexte de vide ideologique
general, ces phrases imaginees de deux dirigeants russes ont servi
de fondement pour une puissante campagne russophobe.
Le gouvernement
Comme l'a demontre l'Euromaïdan, plus le travail ideologique du
gouvernement est faible et plus la corruption est importante, plus
il est facile d'organiser un coup d'Etat.
Le parti republicain armenien au pouvoir ressemble aujourd'hui
plutôt a un club d'affaires. Son ideologie officielle est le > de Gareguine Njdeh. Le concept ethno-religieux
de cet homme d'Etat de la Première republique (1918-1920) date d'un
siècle. A l'ère des technologies mediatiques et de la mondialisation,
le monde a tellement change que ces thèses de cent ans sont devenues
complètement archaïques.
De plus l'ideologie de Gareguine Njdeh, comme tout nationalisme, ne
travaille pas pour l'unification mais la confrontation, notamment avec
les Turcs. Un pays entoure de peuples turcs ne peut pas vivre en etat
de conflit permanent, alimente par des idees de suprematie "aryenne".
Historiquement ce pays a toujours ete au croisement des civilisations
et des cultures: a l'epoque antique - entre l'Empire romain et la
Perse (Parthie); au Moyen Âge - entre Byzance et le califat arabe;
aujourd'hui - entre le monde russe et islamique. Les Armeniens ont
ainsi toujours trouve un terrain d'entente meme la où cela semblait
impossible - et ont donc eu la reputation de population tolerante et
accueillante. Le nationalisme prive au contraire la nation de tous
ces avantages.
Enfin, Gareguine Njdeh a activement collabore avec les nazis pendant
la Seconde Guerre mondiale considerant les Armeniens, de meme que les
Slaves, comme des sous-hommes. Pour les descendants de l'un des pays
vainqueurs, il est donc offensant d'en faire un heros.
Le parti republicain armenien a manifestement besoin d'elaborer une
nouvelle ideologie, differente du nationalisme du debut du XXe siècle
oriente sur le soutien de l'Occident.
Le besoin d'une nouvelle ideologie
Bien sûr, en parallèle avec l'integration eurasiatique, la
question de la recherche d'un nouveau fondement identitaire se pose
pour l'Armenie. Et comme le gouvernement a decide de changer la
Constitution, c'est visiblement le moment pour y apporter certains
changements qui pourraient prevenir le deroulement en Armenie du
scenario ukrainien par l'Occident:
- Reconnaître le russe comme deuxième langue nationale;
- S'orienter sur la priorite de l'idee de cohesion entre toutes les
nations vivant sur ce territoire dans la politique de l'Etat.
Sans oublier la formation d'une nouvelle ideologie reconciliatrice
et non basee sur le nationalisme.
L'Armenie fait penser aujourd'hui a l'arche de Noe, echouee près du
mont Ararat coince entre deux puissants tourbillons geopolitiques.
D'une part, la vague d'integration europeenne arrive via la Georgie et
l'Ukraine. De l'autre, une tempete du radicalisme islamique belliqueux
approche de la Syrie et de l'Irak. A l'interieur l'opposition fait
chavirer l'arche et l'entraîne au fond. Les integrateurs europeens
de Moscou lui apportent leur "aide" (Echo de Moscou, Vedomosti), qui
appellent la Russie a ne pas cooperer avec des "pays economiquement
en retard et politiquement non libre".
Par ailleurs, il convient de rappeler que c'est en unissant leurs
efforts que la Russie et l'Armenie parvenaient a tenir le coup pendant
les epoques les plus difficiles.
Arriveront-elles a faire face une nouvelle fois aux defis a venir?
C'est du cap choisi aujourd'hui par l'arche armenienne que cela
dependra.
L'opinion de l'auteur ne coïncide pas forcement avec la position de
la redaction
http://fr.ria.ru/discussion/20140626/201642973.html
RIA Novosti
26 juin 2014
Par Iouri Gorodnenko, RIA Novosti
L'Union economique eurasiatique (UEE) entrera en vigueur le 1er janvier
2015. Les hommes politiques americains se sont exprimes a plusieurs
reprises - et negativement - a ce sujet. Au second semestre 2014
Washington devrait redoubler d'efforts pour empecher l'integration
eurasiatique. L'Armenie sera certainement sa prochaine cible après
l'Ukraine.
Erevan devrait prochainement adherer a l'accord sur la creation de
l'Union economique eurasiatique. Il serait donc possible pour celui
qui s'y oppose de saboter l'UEE de l'interieur en organisant un coup
d'Etat dans l'un de ses pays membres.
Ensuite, l'Armenie est sur la route qui mène aux regions petrolifères
de la mer Caspienne.
Enfin, une base militaire russe se situe sur le territoire armenien:
il est donc possible d'organiser des provocations contre les militaires
russes pour les impliquer indirectement dans un conflit militaire.
L'opposition
L'activite des ambassadeurs americain John Heffern et polonais Zdzislaw
Raczynski confirme que l'Armenie pourrait etre la prochaine sur la
liste de Washington après l'Ukraine. Ils sont en consultations avec
les leaders de l'opposition armenienne, Levon Ter-Petrossian (Congrès
national armenien) et Raffi Ovannissian (Heritage), qui participent
activement aux activites antirusses.
Ter-Petrossian appelle desormais a changer de gouvernement "rapidement"
et a transformer le referendum constitutionnel en "rassemblement
national de defiance envers le gouvernement".
Dans l'ensemble, la rhetorique antirusse de l'opposition, qui contrôle
près d'un tiers des sièges du parlement, est extremement primitive.
Par exemple, les arguments suivants sont encore cites pour "prouver"
l'implication de la Russie dans la politique du genocide armenien:
- Le ministre russe des Affaires etrangères Alexeï Lobanov-Rostovski
aurait declare a la fin du XIXe siècle: "Nous avons besoin d'une
Armenie sans Armeniens";
- Le gouverneur du Caucase au debut du XXe siècle Grigori Golitsine
a dit: "Je ferai en sorte que le seul Armenien reste a Tiflis soit
un Armenien empaille au musee de la ville".
Mais le fait est qu'aucune de ces phrases n'a ete confirmee par des
sources historiques. Neanmoins, dans le contexte de vide ideologique
general, ces phrases imaginees de deux dirigeants russes ont servi
de fondement pour une puissante campagne russophobe.
Le gouvernement
Comme l'a demontre l'Euromaïdan, plus le travail ideologique du
gouvernement est faible et plus la corruption est importante, plus
il est facile d'organiser un coup d'Etat.
Le parti republicain armenien au pouvoir ressemble aujourd'hui
plutôt a un club d'affaires. Son ideologie officielle est le > de Gareguine Njdeh. Le concept ethno-religieux
de cet homme d'Etat de la Première republique (1918-1920) date d'un
siècle. A l'ère des technologies mediatiques et de la mondialisation,
le monde a tellement change que ces thèses de cent ans sont devenues
complètement archaïques.
De plus l'ideologie de Gareguine Njdeh, comme tout nationalisme, ne
travaille pas pour l'unification mais la confrontation, notamment avec
les Turcs. Un pays entoure de peuples turcs ne peut pas vivre en etat
de conflit permanent, alimente par des idees de suprematie "aryenne".
Historiquement ce pays a toujours ete au croisement des civilisations
et des cultures: a l'epoque antique - entre l'Empire romain et la
Perse (Parthie); au Moyen Âge - entre Byzance et le califat arabe;
aujourd'hui - entre le monde russe et islamique. Les Armeniens ont
ainsi toujours trouve un terrain d'entente meme la où cela semblait
impossible - et ont donc eu la reputation de population tolerante et
accueillante. Le nationalisme prive au contraire la nation de tous
ces avantages.
Enfin, Gareguine Njdeh a activement collabore avec les nazis pendant
la Seconde Guerre mondiale considerant les Armeniens, de meme que les
Slaves, comme des sous-hommes. Pour les descendants de l'un des pays
vainqueurs, il est donc offensant d'en faire un heros.
Le parti republicain armenien a manifestement besoin d'elaborer une
nouvelle ideologie, differente du nationalisme du debut du XXe siècle
oriente sur le soutien de l'Occident.
Le besoin d'une nouvelle ideologie
Bien sûr, en parallèle avec l'integration eurasiatique, la
question de la recherche d'un nouveau fondement identitaire se pose
pour l'Armenie. Et comme le gouvernement a decide de changer la
Constitution, c'est visiblement le moment pour y apporter certains
changements qui pourraient prevenir le deroulement en Armenie du
scenario ukrainien par l'Occident:
- Reconnaître le russe comme deuxième langue nationale;
- S'orienter sur la priorite de l'idee de cohesion entre toutes les
nations vivant sur ce territoire dans la politique de l'Etat.
Sans oublier la formation d'une nouvelle ideologie reconciliatrice
et non basee sur le nationalisme.
L'Armenie fait penser aujourd'hui a l'arche de Noe, echouee près du
mont Ararat coince entre deux puissants tourbillons geopolitiques.
D'une part, la vague d'integration europeenne arrive via la Georgie et
l'Ukraine. De l'autre, une tempete du radicalisme islamique belliqueux
approche de la Syrie et de l'Irak. A l'interieur l'opposition fait
chavirer l'arche et l'entraîne au fond. Les integrateurs europeens
de Moscou lui apportent leur "aide" (Echo de Moscou, Vedomosti), qui
appellent la Russie a ne pas cooperer avec des "pays economiquement
en retard et politiquement non libre".
Par ailleurs, il convient de rappeler que c'est en unissant leurs
efforts que la Russie et l'Armenie parvenaient a tenir le coup pendant
les epoques les plus difficiles.
Arriveront-elles a faire face une nouvelle fois aux defis a venir?
C'est du cap choisi aujourd'hui par l'arche armenienne que cela
dependra.
L'opinion de l'auteur ne coïncide pas forcement avec la position de
la redaction
http://fr.ria.ru/discussion/20140626/201642973.html