TURQUIE
Turquie. Erdogan mentalement fatigué
Now. (extraits)
Beyrouth
L'état émotionnel du Premier ministre Erdogan nous inquiète. Nous
sommes extrêmement préoccupés à son sujet, mais aussi au sujet de son
entourage et de notre pays." Ainsi se terminait le communiqué de
presse publié par l'Association des médecins turcs en mars dernier, un
texte qui, je crois, établit un nouveau standard dans la compréhension
de l'autoritarisme postmoderne. Nous avons lu d'innombrables articles
sur la diminution des libertés publiques en Turquie, sur la répression
de la contestation et sur le nombre record d'arrestations de
journalistes, autant d'événements qui confi rment le style
mégalomaniaque et cavalier du Premier ministre turc. Mais à présent
les choses sont arrivées à un tel point que les gens sérieux doivent
commencer à se demander si l'allié le plus puissant de l'Otan n'a pas
pour gouvernant un homme dont le rapport à la réalité s'est totalement
dégradé. Je ne veux pas dire par là qu'il est devenu un peu toqué ou
un tantinet inquiétant comme l'était Margaret Thatcher à la fi n. Je
veux juste dire qu'il s'en faudrait d'un rien pour qu'il se prenne
pour un oeuf poché. Les indices prouvant que Recep Tayyip Erdogan doit
d'urgence prendre du repos sont aussi abondants que convaincants. Un
point critique a été atteint le 14 mai. Au lendemain d'un accident
dans une mine de Soma qui a tué 301 mineurs, Erdogan a été filmé en
train d'agresser un contestataire, Taner Kurucan, dans un supermarché.
Il n'a pas encore été établi avec certitude si Erdogan a taxé Kurucan
de "sperme israélien" ou bien s'il lui a demandé : "Pourquoi
t'enfuis-tu ? Tu réclamais ma démission." Mais mon ami Ilhan Tanir, un
journaliste turc, a visionné la scène de l'incident "une centaine de
fois" et pense qu'Erdogan a bel et bien qualifi é un citoyen de son
propre pays d'"éjaculation juive". En janvier, Erdogan a accusé le
"lobby des taux d'intérêt"
une coterie à laquelle il avait déjà attribué les manifestations
autour du parc Gezi [2013] - de tenter d'étouffer la croissance
l'était Margaret Thatcher à la fi n. Je veux juste dire qu'il s'en
faudrait d'un rien pour qu'il se prenne pour un oeuf poché. Les
indices prouvant que Recep Tayyip Erdogan doit d'urgence prendre du
repos sont aussi abondants que convaincants. Un point critique a été
atteint le 14 mai. Au lendemain d'un accident dans une mine de Soma
qui a tué 301 mineurs, Erdogan a été filmé en train d'agresser un
contestataire, Taner Kurucan, dans un supermarché. Il n'a pas encore
été établi avec certitude si Erdogan a taxé Kurucan de "sperme
israélien" ou bien s'il lui a demandé : "Pourquoi t'enfuis-tu ? Tu
réclamais ma démission." Mais mon ami Ilhan Tanir, un journaliste
turc, a visionné la scène de l'incident "une centaine de fois" et
pense qu'Erdogan a bel et bien qualifi é un citoyen de son propre pays
d'"éjaculation juive". En janvier, Erdogan a accusé le "lobby des taux
d'intérêt"
une coterie à laquelle il avait déjà attribué les manifestations
autour du parc Gezi [2013] - de tenter d'étouffer la croissance
économique turque. "Nous n'allons pas laisser le lobby des taux
d'intérêt poursuivre tranquillement ses menées", a-t-il menacé.
Erdogan voit les lobbys absolument partout, et notamment dans tout ce
qui ne va pas en Turquie. La plupart sont inédits. En février, il a
déclaré à propos de ceux qui le critiquaient ou se moquaient de lui
sur Internet : "Le lobby des robots qu'ils ont organisé sur les
réseaux sociaux frappe à coups de tweets." Lobbys. Même le rival
islamiste d'Erdogan, l'érudit Fethullah Gülen, établi en Pennsylvanie,
est à ses yeux un lobbyiste, et non le dirigeant d'un mouvement
sociopolitique. "Ils ont mis au point un scénario parfait", a un jour
expliqué Erdogan. "Le lobby du prêcheur attaquera au travers de la
police et du système judiciaire. Le lobby des médias frappera à coups
de gros titres et d'émissions. Le lobby des taux d'intérêt clamera que
l'économie se détériore. Et le lobby international nous attaquera en
nous condamnant." En littérature, le mois de mars est synonyme de
complot politique. Cette année, ce fut aussi le mois le plus diffi
cile pour Tayyip. Alors qu'il prononçait une allocution dans un
meeting commémorant sa douzième année en fonction, il a fait huer par
la foule la famille de Berkin Elvan. Il s'agissait du garçon de 15 ans
qui avait été blessé à la tête par une grenade lacrymogène pendant les
manifestations autour du parc Gezi et qui avait succombé après être
resté neuf mois dans le coma. Erdogan a déclaré qu'Elvan avait été
"embrigadé par des organisations terroristes". La preuve ? Les billes
qu'on avait trouvées dans les poches du jeune garçon à son arrivée à
l'hôpital. D'ailleurs, le fait que le père d'Elvan ait déposé
plusieurs billes - dont Erdogan a affi rmé qu'il s'agissait de boules
d'acier - dans le cercueil de son fi ls constituait une preuve
supplémentaire de l'idéologie antinationale de toute la famille. "Dans
des circonstances normales", remarque poliment l'Association des
médecins turcs, "une personne 'normale' ne qualifi erait jamais de
terroriste un garçon de 15 ans blessé à la tête par une grenade alors
qu'il allait acheter du pain." Mars fut aussi le mois pendant lequel
Erdogan a triomphé brièvement de l'un de ses lobbys redoutés. "Nous
disposons à présent d'une décision judiciaire, annonçat- il. Nous
allons éradiquer Twitter. Je me moque de ce que dira la communauté
internationale. Chacun pourra constater la puissance de la république
de Turquie." Chasse aux sorcières. Si le langage est un indicateur,
tout indique que la santé mentale d'Erdogan est en chute libre. Il y a
une dizaine de jours, juste avant l'épisode du sperme-coup de poing,
il a promis d'extirper les adeptes de Gülen tapis au sein de la police
et du système judiciaire turcs en expliquant que, "pour stériliser
l'eau souillée qui contamine notre lait, nous aurons le choix entre la
faire bouillir ou la réduire en molécules", marquant ainsi la toute
première fois dans l'Histoire où la pasteurisation aura été utilisée
comme une métaphore du contre-espionnage. Mais Erdogan a poursuivi
dans son imagerie à la Dr Folamour : "Si muter les responsables qui se
livrent à la trahison est appelé 'chasse aux sorcières', alors oui,
nous nous livrons à une chasse aux sorcières." Une métaphore qui,
depuis la Salem du XVIIe siècle, renvoie à une persécution hystérique,
paranoïaque et injuste. Il y a quelques années, pour tenter
d'expliquer le tristement célèbre départ d'Erdogan du sommet de Davos
après que ce dernier eut qualifi é le président israélien Shimon Pérès
de vieillard tueur d'enfants, la journaliste turque Asli Aydintasbas
avait établi un astucieux parallèle avec un autre dirigeant mondial
autoritaire dont beaucoup en sont également venus à se demander si son
cerveau n'était pas un peu dérangé : Vladimir Poutine. "Mais les
explosions de colère du Premier ministre turc sont bien entendu à
l'opposé des manoeuvres silencieuses et calculées de Poutine",
écrivait Mme Aydintasbas dans Forbes.
Michael Weiss
Publié le 23 mai
samedi 28 juin 2014,
Stéphane (c)armenews.com
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
Turquie. Erdogan mentalement fatigué
Now. (extraits)
Beyrouth
L'état émotionnel du Premier ministre Erdogan nous inquiète. Nous
sommes extrêmement préoccupés à son sujet, mais aussi au sujet de son
entourage et de notre pays." Ainsi se terminait le communiqué de
presse publié par l'Association des médecins turcs en mars dernier, un
texte qui, je crois, établit un nouveau standard dans la compréhension
de l'autoritarisme postmoderne. Nous avons lu d'innombrables articles
sur la diminution des libertés publiques en Turquie, sur la répression
de la contestation et sur le nombre record d'arrestations de
journalistes, autant d'événements qui confi rment le style
mégalomaniaque et cavalier du Premier ministre turc. Mais à présent
les choses sont arrivées à un tel point que les gens sérieux doivent
commencer à se demander si l'allié le plus puissant de l'Otan n'a pas
pour gouvernant un homme dont le rapport à la réalité s'est totalement
dégradé. Je ne veux pas dire par là qu'il est devenu un peu toqué ou
un tantinet inquiétant comme l'était Margaret Thatcher à la fi n. Je
veux juste dire qu'il s'en faudrait d'un rien pour qu'il se prenne
pour un oeuf poché. Les indices prouvant que Recep Tayyip Erdogan doit
d'urgence prendre du repos sont aussi abondants que convaincants. Un
point critique a été atteint le 14 mai. Au lendemain d'un accident
dans une mine de Soma qui a tué 301 mineurs, Erdogan a été filmé en
train d'agresser un contestataire, Taner Kurucan, dans un supermarché.
Il n'a pas encore été établi avec certitude si Erdogan a taxé Kurucan
de "sperme israélien" ou bien s'il lui a demandé : "Pourquoi
t'enfuis-tu ? Tu réclamais ma démission." Mais mon ami Ilhan Tanir, un
journaliste turc, a visionné la scène de l'incident "une centaine de
fois" et pense qu'Erdogan a bel et bien qualifi é un citoyen de son
propre pays d'"éjaculation juive". En janvier, Erdogan a accusé le
"lobby des taux d'intérêt"
une coterie à laquelle il avait déjà attribué les manifestations
autour du parc Gezi [2013] - de tenter d'étouffer la croissance
l'était Margaret Thatcher à la fi n. Je veux juste dire qu'il s'en
faudrait d'un rien pour qu'il se prenne pour un oeuf poché. Les
indices prouvant que Recep Tayyip Erdogan doit d'urgence prendre du
repos sont aussi abondants que convaincants. Un point critique a été
atteint le 14 mai. Au lendemain d'un accident dans une mine de Soma
qui a tué 301 mineurs, Erdogan a été filmé en train d'agresser un
contestataire, Taner Kurucan, dans un supermarché. Il n'a pas encore
été établi avec certitude si Erdogan a taxé Kurucan de "sperme
israélien" ou bien s'il lui a demandé : "Pourquoi t'enfuis-tu ? Tu
réclamais ma démission." Mais mon ami Ilhan Tanir, un journaliste
turc, a visionné la scène de l'incident "une centaine de fois" et
pense qu'Erdogan a bel et bien qualifi é un citoyen de son propre pays
d'"éjaculation juive". En janvier, Erdogan a accusé le "lobby des taux
d'intérêt"
une coterie à laquelle il avait déjà attribué les manifestations
autour du parc Gezi [2013] - de tenter d'étouffer la croissance
économique turque. "Nous n'allons pas laisser le lobby des taux
d'intérêt poursuivre tranquillement ses menées", a-t-il menacé.
Erdogan voit les lobbys absolument partout, et notamment dans tout ce
qui ne va pas en Turquie. La plupart sont inédits. En février, il a
déclaré à propos de ceux qui le critiquaient ou se moquaient de lui
sur Internet : "Le lobby des robots qu'ils ont organisé sur les
réseaux sociaux frappe à coups de tweets." Lobbys. Même le rival
islamiste d'Erdogan, l'érudit Fethullah Gülen, établi en Pennsylvanie,
est à ses yeux un lobbyiste, et non le dirigeant d'un mouvement
sociopolitique. "Ils ont mis au point un scénario parfait", a un jour
expliqué Erdogan. "Le lobby du prêcheur attaquera au travers de la
police et du système judiciaire. Le lobby des médias frappera à coups
de gros titres et d'émissions. Le lobby des taux d'intérêt clamera que
l'économie se détériore. Et le lobby international nous attaquera en
nous condamnant." En littérature, le mois de mars est synonyme de
complot politique. Cette année, ce fut aussi le mois le plus diffi
cile pour Tayyip. Alors qu'il prononçait une allocution dans un
meeting commémorant sa douzième année en fonction, il a fait huer par
la foule la famille de Berkin Elvan. Il s'agissait du garçon de 15 ans
qui avait été blessé à la tête par une grenade lacrymogène pendant les
manifestations autour du parc Gezi et qui avait succombé après être
resté neuf mois dans le coma. Erdogan a déclaré qu'Elvan avait été
"embrigadé par des organisations terroristes". La preuve ? Les billes
qu'on avait trouvées dans les poches du jeune garçon à son arrivée à
l'hôpital. D'ailleurs, le fait que le père d'Elvan ait déposé
plusieurs billes - dont Erdogan a affi rmé qu'il s'agissait de boules
d'acier - dans le cercueil de son fi ls constituait une preuve
supplémentaire de l'idéologie antinationale de toute la famille. "Dans
des circonstances normales", remarque poliment l'Association des
médecins turcs, "une personne 'normale' ne qualifi erait jamais de
terroriste un garçon de 15 ans blessé à la tête par une grenade alors
qu'il allait acheter du pain." Mars fut aussi le mois pendant lequel
Erdogan a triomphé brièvement de l'un de ses lobbys redoutés. "Nous
disposons à présent d'une décision judiciaire, annonçat- il. Nous
allons éradiquer Twitter. Je me moque de ce que dira la communauté
internationale. Chacun pourra constater la puissance de la république
de Turquie." Chasse aux sorcières. Si le langage est un indicateur,
tout indique que la santé mentale d'Erdogan est en chute libre. Il y a
une dizaine de jours, juste avant l'épisode du sperme-coup de poing,
il a promis d'extirper les adeptes de Gülen tapis au sein de la police
et du système judiciaire turcs en expliquant que, "pour stériliser
l'eau souillée qui contamine notre lait, nous aurons le choix entre la
faire bouillir ou la réduire en molécules", marquant ainsi la toute
première fois dans l'Histoire où la pasteurisation aura été utilisée
comme une métaphore du contre-espionnage. Mais Erdogan a poursuivi
dans son imagerie à la Dr Folamour : "Si muter les responsables qui se
livrent à la trahison est appelé 'chasse aux sorcières', alors oui,
nous nous livrons à une chasse aux sorcières." Une métaphore qui,
depuis la Salem du XVIIe siècle, renvoie à une persécution hystérique,
paranoïaque et injuste. Il y a quelques années, pour tenter
d'expliquer le tristement célèbre départ d'Erdogan du sommet de Davos
après que ce dernier eut qualifi é le président israélien Shimon Pérès
de vieillard tueur d'enfants, la journaliste turque Asli Aydintasbas
avait établi un astucieux parallèle avec un autre dirigeant mondial
autoritaire dont beaucoup en sont également venus à se demander si son
cerveau n'était pas un peu dérangé : Vladimir Poutine. "Mais les
explosions de colère du Premier ministre turc sont bien entendu à
l'opposé des manoeuvres silencieuses et calculées de Poutine",
écrivait Mme Aydintasbas dans Forbes.
Michael Weiss
Publié le 23 mai
samedi 28 juin 2014,
Stéphane (c)armenews.com
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress