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La Suisse recourt devant la Grande Chambre à Strasbourg

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    SDA - Suisse
    mardi 11 mars 2014 4:46 PM CET

    La Suisse recourt devant la Grande Chambre à Strasbourg

    Lausanne

    La Suisse refuse le jugement de la Cour européenne des droits l'homme
    (CEDH) donnant raison au nationaliste turc Dogu Perinçek. Elle recourt
    devant la Grande Chambre de la CEDH à Strasbourg, a indiqué mardi
    l'Office fédéral de la justice (OFJ). Dogu Perinçek a été condamné en
    Suisse pour discrimination raciale après avoir qualifié le génocide
    arménien de "mensonge international".

    Le réexamen du cas vise à préciser la marge de manoeuvre dont
    disposent les autorités suisses. L'affaire concerne l'application de
    la norme antiraciste inscrite à l'article 261 bis du code pénal,
    précise l'office.

    La Suisse a créé cette norme pour combler une lacune de son droit
    pénal, dans le but d'adhérer à la Convention de l'ONU sur
    l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
    L'article 261 bis sanctionne notamment celui qui niera, minimisera
    grossièrement ou cherchera à justifier un génocide ou d'autres crimes
    contre l'humanité.

    Discrimination raciale

    En décembre dernier, Dogu Perinçek a obtenu gain de cause à
    Strasbourg. La Cour européenne a jugé que la Suisse avait violé son
    droit à la liberté d'expression en le condamnant pour discrimination
    raciale.

    Le président du Parti des travailleurs de Turquie avait nié
    publiquement à plusieurs reprises l'existence du génocide arménien. Il
    avait été condamné en mars 2007 par le Tribunal de police de Lausanne
    à 90 jours-amendes avec sursis et 3000 francs d'amende. Le verdict
    avait été confirmé aux niveaux cantonal et fédéral, puis Dogu Perinçek
    avait recouru à Strasbourg.

    Forte pression

    Depuis le verdict de la cour, la Suisse s'est retrouvée sous une forte
    pression pour qu'elle fasse appel devant la Grande Chambre. Des
    pétitions internationales, des pages d'opinion achetées dans les
    journaux ont enjoint les autorités helvétiques à ne pas accepter cette
    décision.

    Selon le jugement du 17 décembre, Dogu Perinçek n'a pas commis d'abus
    de droit en qualifiant de "mensonge international" l'idée d'un
    génocide arménien. "Le libre exercice du droit de débattre ouvertement
    de questions sensibles et susceptibles de déplaire est l'un des
    aspects fondamentaux de la liberté d'expression", écrivait Strasbourg.

    Liberté démocratique

    Ce droit "distingue une société démocratique, tolérante et pluraliste
    d'un régime totalitaire ou dictatorial", selon la Cour. Elle
    distinguait clairement l'affaire Perinçek de celles qui portent sur la
    négation des crimes de l'Holocauste. Dans ces dernières, les personnes
    ont nié des faits historiques parfois très concrets comme l'existence
    des chambres à gaz.

    Pour Strasbourg, les motifs avancés par la Suisse pour condamner le
    nationaliste turc étaient donc "insuffisants". La condamnation ne
    répondait pas "à un besoin social impérieux" et n'était pas nécessaire
    pour la protection de l'honneur et les sentiments des descendants des
    victimes des massacres de 1915.

    Argumentation rejetée

    L'Association Suisse-Arménie (ASA) s'est félicitée mardi de la
    décision de la Confédération. Elle espère que le recours de l'Office
    fédéral de la justice (OFJ) aura "toute la solidité nécessaire" pour
    réfuter les arguments de la décision de décembre.

    Selon l'ASA, le verdict de Strasbourg comporte "des inexactitudes
    historiques et conceptuelles". Les preuves du génocide arménien sont
    "irréfutables" et la "hiérarchisation" des génocides est inacceptable.
    Ne pas recourir aurait en outre fait "régresser" le dispositif
    juridique helvétique.

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