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"Le Dernier Jour Du Jeune" De Simon Abkarian, Tragedie Grecque Revue

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    "LE DERNIER JOUR DU JEUNE" DE SIMON ABKARIAN, TRAGEDIE GRECQUE REVUE PAR PAGNOL

    Francetv info
    27 mars 2014

    Publie le 27/03/2014 a 13H44, mis a jour a 13H52

    (c) Antoine Agoudjian

    Philippe Quesne a pris le 1er janvier la direction du theâtre des
    Amandiers de Nanterre, assumant la succession et les choix de son
    predecesseur Jean-Louis Martinelli pour cette saison 2013-2014. Saison
    ambitieuse, durant laquelle Martinelli a eu la très bonne idee
    de programmer >, cree a Marseille en
    septembre dernier.

    Par Bertrand Renard Reagir

    On n'est d'ailleurs pas sûr que ce titre soit le meilleur element de la
    pièce (a en juger par la frequentation, honnete mais en demi-teinte,
    de la grande salle de Nanterre ce soir la). Ce qui compte dans ce >, c'est la soiree de l'après-jeûne, celle où l'on se
    jette de nouveau sur des monceaux de viande d'une manière un peu
    animale, justifiant le personnage de Minas, le boucher (très bien
    defendu par David Ayala, avec un terrible melange de tendresse et
    d'inconscience cruelle).

    Mais cette histoire-la est un peu annexe, comparee aux autres,
    a toutes les autres, dont Abkarian entrecroise les fils: chacun
    des fils concernant un personnage, six femmes, cinq hommes, mais ô
    combien les femmes sont essentielles et combien les hommes, malgre
    leur comportement de gros machos, semblent depasses, veules, quasi
    figurants!

    Ariane Ascaride, Judith Magre, Oceane Mozas, Chloe Rejon, Marie Fabre,
    cyril Lecomte...

    C'est une chronique. Mediterraneenne. Six femmes donc : une mère,
    Nouritsa (Ariane Ascaride), sa soeur plus âgee, Sandra, avocate,
    savante, presque pythie (Judith Magre). Ses deux filles, Zela (Oceane
    Mozas), belle et mystique, qui a reve d'un homme etranger et qui se
    complait dans ce reve, comme si elle etait la vestale, la vierge, de ce
    dieu encore inconnu. Astrig (Chloe Rejon), charnelle, terre-a-terre,
    qui a parfaitement compris et le sort fait aux femmes (la maison,
    la cuisine, les enfants) et le moyen d'y echapper (l'instruction)
    Ce qui ne l'empeche pas d'etre amoureuse d'Aris, beau gosse bruyant
    et soupe-au-lait, avec un petit pois dans la tete et un gros poil
    dans la main mais avec un coeur gros comme ca. Et avec une mère (la
    formidable Marie Fabre, melange de Marthe Villalonga et de Maïte),
    Vava dite >, cancanière et intarissable, qui
    entretient avec son fils des relations... mediterraneennes.

    Une chronique mediterraneenne (c) Antoine Agoudjian

    Tout cela serait beau, joyeux, colore, emouvant parfois (avec ce vieux
    fond de tristesse et de fatalisme propre aux peuples qui bordent la
    >) si ne regnait autour de la fille du boucher,
    la jeune Sophia, comme un halo de tragedie.

    On voit bien ce qu'a voulu faire Simon Abkarian (et ce qu'il a voulu
    faire est assez gonfle): meler la tragedie grecque a Pagnol, jouer
    sur differents niveaux de langage pour montrer combien, dans toutes
    les civilisations mediterraneennes, cette parole est transmission,
    monnaie, nourriture, echange et commerce, parole des dieux transmise
    par les hommes ou remontant des hommes aux dieux.

    Les talents d'auteur de Simon Abkarian Rien de plus emblematique que
    la scène initiale où la grande Judith Magre nous plante le decor, dans
    une langue riche, somptueuse, mais a laquelle il faut s'habituer. Puis
    surgit Ariane Ascaride, quotidienne, d'une profonde justesse, qui
    nettoie le sol et demande a ses filles d'aller >. La pièce navigue ainsi constamment entre ces deux
    niveaux d'ecriture qui pourraient mal s'abouter mais qu'Abkarian, en
    vrai ecrivain (et surtout dialoguiste), reussit a rendre harmonieux. On
    se souvient alors qu'Abkarian a obtenu il y a six ans un prix de la
    Critique Theâtrale avec > qui saluait deja
    ses talents d'auteur.

    Simon Abkarian, que le grand public connaît desormais pour ses rôles
    televises dans > ou >, est
    cet acteur aux superbes moustaches et a la carrière cinematographique
    desormais fournie où il incarne aussi bien un Armenien (ses racines)
    pour son pote Robert Guediguian qu'un Israelien (pour Ronit Elkabetz),
    un Maghrebin, un Iranien (le père de Marjane Satrapi dans >), bref un representant de ces peuples arabo-mediterraneens dont le
    point commun est le patriarcat (il se reserve ici le rôle de Theos,
    le père, personnage pas très present, silencieux mais très symbolique).

    C'est du meme coup le defaut de la pièce (outre qu'elle est un peu
    trop longue) : les noms des personnages sont grecs, la radio nous
    parle de Chypre, mais les chants entendus sont armeniens, semble-t-il,
    il y a des allusions a Marseille (et Marie Fabre et Cyril Lecomte
    utilisent a plein leur accent phoceen, ce qui est un vrai bonheur).

    Cette volonte de brouiller les pistes (allusions aussi aux guerres
    qui ont ravage le Liban ou la Serbie, mais egalement Chypre!) finit
    par mettre de la confusion dans ce qui devrait rester une chronique
    universelle, c'est-a-dire nourrie des mythes de ce coin du monde mais
    en l'ancrant vraiment dans un territoire precis. Pas sûr non plus que
    la fin, qui nous parle de la transmission des generations a travers
    le personnage du fils de 15 ans, Elias, soit vraiment necessaire.

    Un vrai esprit de troupe J'ai cite les actrices et l'essentiel des
    acteurs. Il faudrait redire combien ils sont de qualite, dans un
    vrai esprit de troupe. Mention surtout a Ascaride, Marie Fabre,
    Chloe Rejon et Cyril Lecomte, Judith Magre etant hors-concours.

    Dernier detail, très mediterraneen aussi : l'atmosphère est grave,
    voire tragique, et cependant l'on rit souvent. Ce sont vraiment
    Sophocle et Pagnol qui se tiennent la main et pour cette alliance
    inattendue on pardonnera largement a Abkarian un certain manque de
    rythme et les quelques maladresses de construction. Et que c'est bon
    d'entendre au theâtre des accents qui nous disent la vie, et non pas
    du folklore !

    > de Simon Abkarian Theâtre des Amandiers
    de Nanterre (92) jusqu'au 6 avril 7 avenue Pablo Picasso Tel : 01 46
    14 70 70 CDN de Limoges (87) du 9 au 11 avril

    http://culturebox.francetvinfo.fr/le-dernier-jour-du-jeune-de-simon-abkarian-tragedie-grecque-revue-par-pagnol-152063

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