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Hasan Cemal à l'UGAB : l'honneur de la Turquie

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    PARIS
    Hasan Cemal à l'UGAB : l'honneur de la Turquie


    Comment en venir à reconnaître le génocide des Arméniens quand on est
    le petit fils de Djémal Pacha, l'un des trois organisateurs avec Talt
    Pacha et Enver Pacha de l'entreprise d'extermination ? Comment
    accomplir ce geste quand de surcroit votre grand-père a été victime
    d'un commando de justiciers arméniens ? Ce sont les affres de cet
    accouchement intellectuel, à la fois très intime et très symbolique de
    la mauvaise conscience de son propre pays, dont est venu parler
    vendredi soir Hasan Cemal à Paris. L'homme qui se trouvait sur
    l'estrade du centre Alex Manoogian de l'UGAB avait eu une autre vie
    avant de cheminer vers la reconnaissance du génocide arménien. Il
    était éditorialiste à Milliyet, journaliste très connu en Turquie.
    Considéré comme l'un des faiseurs d'opinion du pays, il avait de
    surcroit l'oreille des autorités. Un statut social qui a subi les
    conséquences de la publication de son livre événement intitulé, 1915 :
    le génocide arménien, sorti en 2012.

    Cet ouvrage qui a suscité la controverse et dont il est venu expliquer
    la genèse fait écho au plan personnel au questionnement auquel
    commence à se livrer la Turquie sur ce crime fondateur érigé en
    véritable tabou national. Un interdit d'Etat qui n'a commencé à se
    fissurer que dans les années 70-80, avec le surgissement de la cause
    arménienne dans l'actualité internationale, puis qui a été érodé par
    le travail des premiers intellectuels éditeurs et historiens turcs sur
    la question dans les années 90, mais qui a surtout été fragilisé grce
    à l'action de Hrant Dink. Le travail, les mots, puis le tragique
    assassinat du journaliste d'origine arménienne devant le siège du
    quotidien Agos à Istanbul en janvier 2007 ayant été le catalyseur de
    la libération de la parole sur le génocide des Arméniens,
    expliquera-t-il.

    Hasan Cemal, Samson Ozararat, Alexis Govciyan.

    Hasan Cémal a posé devant une salle comble une série de questions très
    profondes sur les tabous, les fléaux que constituent le nationalisme,
    le racisme, le négationnisme, mais aussi sur la fonction des
    intellectuels dans son pays. Comment peut-on vivre dans un
    environnement qui oblige à cacher son origine ?, s'est-il interrogé en
    évoquant le cas de deux de ses illustres confères chroniqueurs, Mehmet
    Ali Birand et Ilhan Celik, dont il a fallu attendre la mort pour
    apprendre que le premier était de mère Kurde et le second de mère
    arménienne. Des secrets qu'ils avaient cachés tout au long de leur
    vie. Ce sont ces interdits, générés par l'idéologie dominante turque,
    laquelle a aussi longtemps emprisonné sa propre pensée, qu'Hasan Cemal
    a décortiqués devant un public arméno-turc qui buvait ses paroles.

    Hasan Cemal à la tribune.

    Evoquant a lancé Hasan Cemal à la salle. >. Et pourtant, .
    Quand bien même l'exercice fut-il douloureux. Pour Hasan, celui qui a
    fait le plus >, jusqu'à y perdre sa vie, c'est
    Hrant Dink, avec lequel il raconte avoir noué un dialogue imaginaire,
    dans l'enceinte du mémorial du génocide à Erevan, en ce jour de l'été
    2008 où il s'y était recueilli. Un hommage à son ami qui clôturera ce
    beau discours écrit, qu'a traduit simultanément Kirkor Adjéranian et
    dont le contenu sera publié dans la presse turque du 25 octobre.

    La salle pleine (photo Krikor Djidjirian)

    La soirée s'est poursuivie par des questions posées par le public.
    Hasan Cemal y précisera notamment qu'il a peu de famille. Juste deux
    cousins qui n'ont pas critiqué son livre. Il a évoqué le petit fils
    d'Enver Pacha, qui travaillait en Turquie pour une firme d'arme
    américaine et la fille de Talät Pacha, chimiste, que le hasard a amené
    à travailler un temps avec son père, fils aîné de Djémal Pacha, dans
    une entreprise de ciment. Il n'a aucun contact avec eux. Sur la
    question des réparations, Hasan Cemal a répondu qu'il n'était pas
    expert en la matière et a renvoyé le public à son livre, indiquant
    tout de même les réactions épidermiques que suscitait l'évocation de
    ce problème en Turquie... Il pense néanmoins que la Turquie finira par
    reconnaître le génocide. Citant les difficultés de la France à
    regarder en face la guerre d'Algérie et même celles de l'Allemagne (
    il a affirmé que 65% des Allemands s'étaient dits hostiles au geste de
    Willy Brand qui s'était agenouillé à Auschwitz), il estime que la
    Turquie n'est pas le seul pays au monde à refouler les pages sombres
    de son passé, quand bien même il combat cette attitude. Il a qualifié
    également de crime contre l'humanité le fait que les Arméniens aient
    été arrachés à leurs terres dont il pense qu'ils gardent la nostalgie.
    La réunion s'est terminée par la signature du livre de Cemal. Un
    ouvrage en turc qui attend sa traduction en Français.

    Séance de dédicaces(photo Krikor Djidjirian)

    L'intellectuel était accompagné par Samson Ozararat, qui dirige avec
    Kirkor Adjéranian SOS Arménie-côte d'Azur, co-organisateur de la
    réunion avec l'UGAB ile-de-France.

    Alexis Govciyan, président de l'UGAB-Europe, qui a introduit et
    clôturé cette réunion en annonçant à juste titre qu'elle revêtait un
    caractère exceptionnel, a rappelé, fort à propos, les mots de Raymond
    Aron : >. Un
    sentiment largement partagé par l'auditoire de cette soirée.

    Hasan Cemal et Kirkor Adjeranian (photo Krikor Djidjirian)
    Photo Krikor Djirdjirian
    Photo Krikor Djirdjirian

    samedi 25 octobre 2014,
    Ara (c)armenews.com
    http://www.armenews.com/article.php3?id_article=104654

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