La demande de pardon, la confrontation, le deuil...
mardi 16 septembre 2014
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Pardon, Réconciliation, Dialogue
Point de vue de Turquie
La demande de pardon, la confrontation, le deuil
Yetvart Danzikyan
Yetvart Danzikyan
Journaliste
En tentant une confrontation, toute autorité politique devra démolir
le mur de ciment qu'elle avait construit de ses propres mains. La
confrontation et la demande de pardon ne peuvent avoir lieu que par la
suite.
Pour un pays aussi bien que pour une personne, la demande de pardon
constitue une étape cruciale composée d'un >, d'un >, et d'un >. Pour un l'individu, cela peut paraître
conventionnel, mais avant toute chose, une demande de pardon demande
la présence d'une familiarité, de compréhension et par dessus tout,
d'un besoin de s'excuser. Il faut accepter le fait d'avoir commis une
faute et comprendre qu'il est impossible de la corriger, mais qu'au
moins -- comme une condition préalable nécessaire -- une demande de
pardon doit être effectuée pour le mal commis. Autrement dit, il faut
tout d'abord comprendre le fait d'avoir soi-même commis >,
ce qui est un processus qui se révèle parfois difficile.
Nous avons tous probablement demandé pardon, à un moment de notre vie,
et le processus qui précède cette confrontation n'est pas facile.
C'est jusqu'à ce moment-là que, peut-être, l'on considère encore avoir
raison. Puis, soudain, on réalise que nos pensées ne correspondent pas
à ce qu'il se passe à l'extérieur. Nos amis et notre entourage pensent
que nous avons tort : il existe une victime. En bref, à un certain
moment, nous nous rendons compte que quelque chose s'est mal passé. Et
c'est là que nous commençons le processus d'auto-confrontation. Avant
cela, nous nous sentons agité. Il s'agit de l'inquiétude d'avoir fait
du tort et de savoir que nous avons fait du tort à quelqu'un. Ainsi
commence la confrontation. Puis, comme celle ci continue son chemin
progressivement, nous nous rendons compte que nous nous sommes
trompés. Nous demandons l'avis de ceux qui nous entourent et essayons
de tout comprendre dans les moindres détails.
Arrive un moment où la confrontation s'achève, lorsqu'on a compris
notre erreur. Toutefois, le processus lui-même n'est pas encore fini.
Nous n'avons fait que nous confronter à nous même et notre entourage ;
il s'agit maintenant de l'exprimer à l'autre partie, ce qui est un
tout autre processus. Car dans certaines cultures, ou disons, certains
>, accepter d'avoir commis une faute est considéré comme un
signe de faiblesse. Dès que vous dites , le > et l' > sont
trois étapes capitales.
C'est cependant la plus cruciale des étapes. Savoir que s'excuser est
difficile, venant d'un tel monde, on se force à trouver d'autres mots
pour remplacer la demande de pardon. On peut avoir réalisé et compris
le fait que l'on avait tort tout en étant encore incapable de faire
ses excuses. C'est parce que, comme nous l'avons dit ci-dessus,
s'excuser peut être un signe de faiblesse et que l'acceptation de sa
faute peut vouloir dire qu'on a baissé sa garde. Si vous considérez la
vie comme une guerre, comme un combat, un champ de bataille où il faut
toujours être au dessus de tous, toujours être un leader, cela pose
évidemment un problème.
La demande de pardon nous fait descendre de notre attitude précédente
Il nous faut une autre formule, mais laquelle ? On cherche une issue.
On peut dire, par exemple : > et puis
essayer de le compenser avec des gestes : une simple inclination du
cou, un mouvement de sourcils pour signifier >, une moue de
regret... tout cela peut être utile pour essayer d'esquiver l´épreuve.
Et parfois, on essaie d'éviter le sujet de cette façon. Cela
fonctionne, mais pas souvent il faut le reconnaître. Ce qui est
attendu c'est une excuse, la reconnaissance de la faute. Par
conséquent, le mot > est important. C'est pourquoi nos mères
nous demandent de demander pardon en insistant bien sur ce mot.
L'important ici est de prononcer le mot. Ou, du moins, la capacité de
dire
et pourquoi l'autre partie, s'attend-elle absolument à ce mot et pas à
une autre formule ou un autre terme ? Puisque nous comprenons ce
principe, je ne vais pas chercher à répéter ce que l'on sait. Mais je
pense vraiment qu'en allant un peu plus loin, il serait plus facile de
comprendre le problème > A ce moment là, on croit
qu'on peut s'amender en se mettant à genoux. On s'agenouille par
avance, de sorte que l'on peut atteindre une position similaire
ensuite, pourvu, certes, que l'autre partie l'approuve. Certains torts
ne peuvent être pardonnés qu'ainsi : ce que Willy Brandt a fait en
Pologne en s'agenouillant devant le mémorial du soulèvement du ghetto
de Varsovie en est l'illustration.
D'autre part, il est possible d'envisager le problème de la demande de
pardon comme les deux faces d'une même pièce. Car il y a aussi l'acte
de forcer quelqu'un à s'excuser, ce qui concerne à la fois les
relations humaines, la hiérarchie et les positions prévues des
personnes par rapport à leurs interlocuteurs. On sort ici du processus
de la passivité, de la confrontation et des comptes rendus que
constitue > Tout spécialement si la partie qui
attend une demande de pardon se voit en position supérieure et qu'elle
voudrait mettre l'accent sur cette supériorité, l'affaire peut prendre
la forme de quelque chose d'imposé. Dans un tel cas, et
particulièrement si la personne en attente de pardon possède
réellement un statut social supérieur -- comme un employeur ou un
politicien -- alors la demande de pardon se transforme en une toute
autre chose. Car ici, celui qui doit s'excuser ne réalise pas la
confrontation mentionnée plus haut. Celle ci est devenue un programme
de conduite qui s'impose à lui. S'il ne demande pas pardon, il
pourrait risquer plusieurs difficultés quotidiennes et
professionnelles. S'il n'est pas en mesure de les surmonter, il
demandera pardon. Ici, aussi, il est peut-être question d'un
agenouillement, mais forcé. Il ne sert qu'à souligner le statut
supérieur de l'autre et perpétuer la hiérarchie. On n'y gagne rien de
plus. On peut le voir de temps à autre dans les relations
interétatiques. Mais le pardon dont on parle n'est pas celui là. Ce
pardon forcé n'est qu'un mauvais exemple donné à ce sujet.
Venons en enfin à celui qui attend à une demande de pardon. C'est une
victime, sans aucun doute. Elle a éprouvé un dommage énorme, qu'il
soit matériel ou moral, pour lequel elle s'attend à des réparations
aussi bien qu'à une >. Les réparations matérielles
ne suffisent pas. Et pourquoi ? Parce que, comme on l'a déjà dit,
elle attend et exige que celui qui a perpétré le crime subisse une
confrontation avec sa propre action. Faute de confrontation, les
réparations (hypothétiques, voire parfois inexistantes) ne suffisent
pas, loin s'en faut. Plus important que les réparations, il faut que en
dit beaucoup sur les dites relations entre l'Etat et la société, aussi
bien qu'entre l'autorité centrale et les Kurdes.).
Le déni perpétue le crime
Dans certains cas -- on peut maintenant sortir des situations
interpersonnelles et passer aux situations inter sociétales -- le
perpétrateur a agi en vertu de son statut qu'il considère supérieur.
En renforçant son statut de dominant, il a déjà refusé de voir l'autre
comme son égal et l'a même rabaissé. Il ne tente que de l'affaiblir,
peut-être de l'anéantir : voilà l'arrière pensée qui nous explique
pourquoi les réparations ne suffiront pas. Car on ne parle pas d'une
confrontation du genre : "Je l'ai payé et je m'en suis débarrassé".
Cette intention explique comment, en niant son action et en refusant
de demander pardon, le perpétrateur continue encore à commettre le
crime. On peut donc dire, dans certains cas, que le déni perpétue en
quelque sorte le crime.
Ici, nous avons pénétré dans le champ des Etats et des sociétés.
Répétons le, le déni perpétue le crime à un autre niveau. Abordons
maintenant le sujet de la Turquie et du langage de la position
officielle. En Turquie, le déni est pratiqué par la position
officielle et l'autorité fondatrice avec une extrême facilité et une
grande insouciance, avant tout au niveau du >. Une
performance absolument impressionnante, négativement parlant. Ce
langage de déni s'est établi sur deux terrains, au sujet des Kurdes et
des Arméniens. Ce qui est significatif car la République s'est fondée
> ces deux peuples (voire trois, en comptant les Grecs). Ce
processus n'étant pas le sujet de cet article, on peut noter par une
simple lecture impartiale que, adoptant le caractère par rapport
au massacre/génocide des Arméniens dans le contexte de la
confrontation et de la demande de pardon.
Lorsqu'on pourra lever la tête, reprendre notre souffle et regarder
autour de nous en échappant au bombardement de la position officielle,
avec laquelle on a enterré la société toute entière, et sous laquelle
nous avons été enterrés tout au long de notre vie, voilà ce qu'on
pourra voir : une autorité, avec le soutien de quelques éléments de la
> a soumis un peuple sédentaire de l'Anatolie à la
purification ethnique. Elle l'a contraint à migrer, l'a massacré et a
confisqué une grande partie de ces biens. A la suite de acte, la
population de ce peuple a été réduite à une fraction symbolique dans
ce pays. Après tout ceci, on voit naturellement une tension émerger
entre la victime et le perpétrateur. Le lésé, ou pour mieux dire la
victime d'une telle atrocité, a attendu une sorte d'> de la
part de celui qui avait commis cet acte.
On peut revenir maintenant donc à la vie politique concrète. Comme on
le sait, l'année 2015 (il va sans dire, le centenaire de 1915)
approche. Il est probable que, pas seulement les victimes et leur
famille, mais aussi l'AKP, héritier de >, s'y
préparent. Les signes d'une préparation sont manifestes ; il semble
que l'AKP prend des mesures pour trouver une solution sans attirer
l'attention en 2015 et sans abandonner l'image du parti pragmatiste
aux confins de la position officielle classique. Ömer Çelik, ministre
de la Culture, a expliqué dans une récente interview au journal
arménien Agos (1) une de ces mesures :
>
Selon le Ministre Çelik, il n'y a pas de génocide, mais seulement des
massacres réciproques survenus en période d'absence de l'autorité.
Ici, il semble n'y avoir aucune nouvelle déclaration allant au-delà de
la ligne officielle. Cependant, il semble être à la recherche d'une
nouvelle formule, plus loin :
> et de la confrontation, c'est à tout cela qu'on se
réfère. Il ne faut pas comprimer notre avenir entre les parenthèses du
passé. Si un règlement des comptes imminent devait avoir lieu, il ne
serait pas entre les Turcs et les Arméniens, mais entre ceux parmi
nous qui embrassent la mentalité des Unionistes d'un côté et le lobby
du génocide de l'autre. >>
L'arrogance de la position officielle continue
Cette logique, cette formule est effectivement un pas en avant vis à
vis de la position officielle. Et assurément un pas positif. Au moins
cela inclut une confrontation. Mais on s'arrête précisément là. Et la
formule proposée est celle de >, qui, au départ, sonne
plutôt bien. L'autorité a remarqué que quelque chose s'est passé ; en
vérité, elle sait ce qui a été fait et dit: > Le problème qui en résulte c'est
que, comme on a déjà expliqué dans la partie concernant les individus,
il est possible de prendre un chemin plus facile pour éviter de
demander pardon. On esquive le mot même. Par contre, on peut dire
peut-être qu'il s'agit d'une demande de pardon ; qu'il est aussi
significatif pour la Turquie d'avoir atteint cette position et qu'il
n'est peut être pas réaliste de s'attendre à une demande de pardon > de la part des états.
A chacun son avis, mais il faut l'avouer : en ce qui concerne de
telles problématiques, il n'y a pas de formule >
entre les Etats ou les sociétés. Du moins elle ne pourrait pas
constituer une formule définitive puisque, du point de vue de la
victime, l'action n'est pas encore définie : tout en acceptant
l'action, le perpétrateur choisit de ne pas > ce qui est
conséquemment et logiquement exigé. Bref, il ne demande pas pardon du
tout. Il accepte simplement que quelque chose s'est passé, mais en le
transformant en un évènement arbitraire et chaotique, sans auteur et
sans sujet. La hiérarchie entre l'autorité et la victime est donc
protégée et perpétuée. L'arrogance de l'autorité -- héritière du
perpétrateur -- est préservée. (Et ici on fait une troisième
comparaison : rappelons-nous du moment où le gouvernement de l'AKP a
affirmé à Israël, au sujet de l'attaque contre Mavi Marmara, qu'une
demande de pardon était absolument exigée et que les relations ne
seraient pas normalisées jusqu'à l'utilisation du mot >
D'autre part, comparons ceci avec la déclaration d'Ömer Çelik : et qu'il faut laisser tomber
l'affaire. Naturellement, cela revient à dire à la victime : > De plus, cette formule
peut indiquer aux victimes et à leurs proches qu'au lieu de donner
lieu à une confrontation ou à une demande de pardon, l'affaire sera
plutôt déclarée comme >.
Un dernier point important dans les mots de Çelik est sa tendance à
voir et à la thérapie réciproque. Pourquoi est-il devenu si
facilement une cible et à travers quels paradigmes ? Dans quel climat
social habitaient les Arméniens ou habitent encore les Arméniens ?
Sans chercher véritablement la réponse à ces questions, la formule de
> restera encore populaire dans ce pays. Et
naturellement, le parti Union et Progrès qui est l'>,
continuera à être assimilé à la diaspora qui est formée des familles
des victimes.
Pour conclure l'analyse de l'interview d'Ömer Çelik, on peut aborder
un dernier point. Il est bien sûr impossible de prévoir le climat
politique d'ici 2015, ni de prétendre que l'AKP ou la Turquie assumera
la position qu'implique la déclaration de Çelik. Un ton plus doux ou
au contraire plus dur pourra être employé. Cependant, ses paroles sont
les indices les plus concrets dont nous disposons actuellement, j'ai
donc basé mon analyse sur sa déclaration.
À quoi s'attendent la victime et le lésé ?
Néanmoins, nous ne parlons pas d'un endroit où tout est clair et sans
ambiguïté. Il y a des questions. Juste à ce moment, peut-être devrions
nous pouvons prêter l'oreille à ce que dit Marc Nichanian. Ses
conférences sur la catastrophe, les excuses, le pardon et le deuil ont
été recueillies dans le volume Littérature et Catastrophe, où il fait
la remarque suivante en référence à Derrida:
Afin de pouvoir atteindre le niveau où nous pouvons conjointement
questionner ce que faire la paix révèle et cache, la première étape
pour faire la paix doit être la confession, une demande afin d'être
pardonné, un projet de paix. Dans les dernières années de sa vie,
Derrida avait également manifesté son intérêt pour ce sujet. Maintes
et maintes fois, il est revenu sur les mêmes questions : la
mondialisation de la scène du pardon, la thétralisation mondiale de
la confession et du témoignage. Nous confessons nos péchés et ceux de
nos pères. Nous sommes coupables et demandons pardon. Ou dans une
autre version: nous faisons des excuses, même si nous ne sommes pas
personnellement coupable. Au nom de qui et de quoi ? Au nom de l'État
? De la société civile ? De nos pères ? Avons-nous le droit de parler
au nom de nos pères ? En outre, à qui s'adresse la phrase > ? La nation ? Les individus ? L'Etat, qui est censé
représenter ces personnes ou incarner la nation ? Un tribunal de la
planète ? Sans aucun doute, beaucoup de questions exigent des
réponses. Pourtant, chacune de ces questions sont cruciales et doivent
trouver très rapidement une réponse. De plus, il existe encore une
autre question qui nous attend. Doit-on dire > ou
>, mais pas, par exemple, par . (...)
S'agit-il vraiment de phrases d'excuses ? L'interlocuteur ne peut-il
pas se demander si il ou elle a la force de pardonner ? (...) > ; pour les familles des
victimes. Des années plus tard, on a trouvé des ossements à la suite
d'aveux de la part de quelques officiels et de recherches. C'est
ensuite que les familles ont parlé. Le message le plus important parmi
toutes les choses qu'elles ont pu dire était : >. Oui, elles pourraient le faire désormais
parce que l'Etat, en détenant ces corps, en les cachant, avait privé
les familles du processus le plus humain qui soit : le deuil. Des
centaines de personnes n'ont pas pu faire le deuil de leurs enfants,
de leurs maris, de leurs pères pendant des années. Il est tout à fait
impossible pour nous de l'imaginer ou de le comprendre. Pourtant, il
nous est toujours possible de voir à quel point l' peut
être cruelle.
Le déni a privé la société arménienne du deuil
Dans un sens, c'est le même effet créé par la politique de déni, la
culture du déni, et l'utilisation de la formule > dans toutes les déclarations officielles et les
correspondances. On a refusé le droit de deuil à la société arménienne
en la niant, en la décrivant comme >, en ayant une
attitude méprisante, et en répétant fort l'argument du >. Cela revient à dissimuler l'emplacement des os
des >. La différence étant qu'ici, le vide historique n'est
pas encore refermé, il est toujours en cours depuis 1915. C'est une
période extrêmement longue pour ne pas être en mesure de faire le
deuil.
Deuxièmement, nous avons suggéré que la victime ne serait pas en
mesure de satisfaire sa/son sens de la justice. Je pense cela ne
nécessite pas trop d'explication. Les personnes et les sociétés
s'attendent à la justice. La principale condition préalable ici est la
reconnaissance de la victime comme une >. C'est la première
étape. Cependant, la ligne officielle et largement acceptée (ce qui
est une description plus précise depuis que la ligne officielle n'est
plus simplement officielle, mais est également partagée dans l'espace
public et acceptée par une partie importante de la société), qui est
une extension des politique de déni, n'a pas reconnu que la victime
est effectivement une >. Et encore une fois, comme une
extension de cette politique, ils ont affirmé qu'ils sont les
véritables victimes, et de ce fait imposé ce point de vue à la
communauté arménienne de Turquie. En résumé, les victimes ont non
seulement été privées de leur >, mais la > a
également été confisquée de leurs mains. Aussi, les déclarations
officielles étant répétées encore et encore pendant des années, la > a été remplacée.4 Comme si tout cela ne suffisait pas, le
mot > a été utilisé comme une insulte, une opprobre, tout
le temps accompagnée de l'argument du gouvernement
israélien en raison de l'attaque sur le navire Mavi Marmara, et
pourquoi il a déclaré que les relations bilatérales ne pourraient pas
revenir à la normale jusqu'à ce que le mot > ait été
prononcé. Et faisons une comparaison entre la déclaration de Ömer
Çelik >, et les
mots du Premier ministre Erdogan > dans le contexte du massacre d'Uludere.
3. Marc Nichanian, Edebiyat ve Felaket, Editions Ýletiþim, Trad:
Ayþegül Sönmezay, p. 207 et suite. MS Littérature et Catastrophe pp
164-65.
4. Bien sûr, cela ne veut pas dire que je considère que les pertes des
Turcs ou des musulmans à l'époque soient sans importance. Eux aussi,
ont subi des pertes et c'est une souffrance qui doit être partagée et
prise en considération. Néanmoins, il ne peut pas être considéré comme
une approche juste d'opposer cette souffrance à ce qu'il s'est passé
en 1915, et progressivement minimiser ce dernier en soulignant
l'ancien au point de détruire 1915.
mardi 16 septembre 2014
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Pardon, Réconciliation, Dialogue
Point de vue de Turquie
La demande de pardon, la confrontation, le deuil
Yetvart Danzikyan
Yetvart Danzikyan
Journaliste
En tentant une confrontation, toute autorité politique devra démolir
le mur de ciment qu'elle avait construit de ses propres mains. La
confrontation et la demande de pardon ne peuvent avoir lieu que par la
suite.
Pour un pays aussi bien que pour une personne, la demande de pardon
constitue une étape cruciale composée d'un >, d'un >, et d'un >. Pour un l'individu, cela peut paraître
conventionnel, mais avant toute chose, une demande de pardon demande
la présence d'une familiarité, de compréhension et par dessus tout,
d'un besoin de s'excuser. Il faut accepter le fait d'avoir commis une
faute et comprendre qu'il est impossible de la corriger, mais qu'au
moins -- comme une condition préalable nécessaire -- une demande de
pardon doit être effectuée pour le mal commis. Autrement dit, il faut
tout d'abord comprendre le fait d'avoir soi-même commis >,
ce qui est un processus qui se révèle parfois difficile.
Nous avons tous probablement demandé pardon, à un moment de notre vie,
et le processus qui précède cette confrontation n'est pas facile.
C'est jusqu'à ce moment-là que, peut-être, l'on considère encore avoir
raison. Puis, soudain, on réalise que nos pensées ne correspondent pas
à ce qu'il se passe à l'extérieur. Nos amis et notre entourage pensent
que nous avons tort : il existe une victime. En bref, à un certain
moment, nous nous rendons compte que quelque chose s'est mal passé. Et
c'est là que nous commençons le processus d'auto-confrontation. Avant
cela, nous nous sentons agité. Il s'agit de l'inquiétude d'avoir fait
du tort et de savoir que nous avons fait du tort à quelqu'un. Ainsi
commence la confrontation. Puis, comme celle ci continue son chemin
progressivement, nous nous rendons compte que nous nous sommes
trompés. Nous demandons l'avis de ceux qui nous entourent et essayons
de tout comprendre dans les moindres détails.
Arrive un moment où la confrontation s'achève, lorsqu'on a compris
notre erreur. Toutefois, le processus lui-même n'est pas encore fini.
Nous n'avons fait que nous confronter à nous même et notre entourage ;
il s'agit maintenant de l'exprimer à l'autre partie, ce qui est un
tout autre processus. Car dans certaines cultures, ou disons, certains
>, accepter d'avoir commis une faute est considéré comme un
signe de faiblesse. Dès que vous dites , le > et l' > sont
trois étapes capitales.
C'est cependant la plus cruciale des étapes. Savoir que s'excuser est
difficile, venant d'un tel monde, on se force à trouver d'autres mots
pour remplacer la demande de pardon. On peut avoir réalisé et compris
le fait que l'on avait tort tout en étant encore incapable de faire
ses excuses. C'est parce que, comme nous l'avons dit ci-dessus,
s'excuser peut être un signe de faiblesse et que l'acceptation de sa
faute peut vouloir dire qu'on a baissé sa garde. Si vous considérez la
vie comme une guerre, comme un combat, un champ de bataille où il faut
toujours être au dessus de tous, toujours être un leader, cela pose
évidemment un problème.
La demande de pardon nous fait descendre de notre attitude précédente
Il nous faut une autre formule, mais laquelle ? On cherche une issue.
On peut dire, par exemple : > et puis
essayer de le compenser avec des gestes : une simple inclination du
cou, un mouvement de sourcils pour signifier >, une moue de
regret... tout cela peut être utile pour essayer d'esquiver l´épreuve.
Et parfois, on essaie d'éviter le sujet de cette façon. Cela
fonctionne, mais pas souvent il faut le reconnaître. Ce qui est
attendu c'est une excuse, la reconnaissance de la faute. Par
conséquent, le mot > est important. C'est pourquoi nos mères
nous demandent de demander pardon en insistant bien sur ce mot.
L'important ici est de prononcer le mot. Ou, du moins, la capacité de
dire
et pourquoi l'autre partie, s'attend-elle absolument à ce mot et pas à
une autre formule ou un autre terme ? Puisque nous comprenons ce
principe, je ne vais pas chercher à répéter ce que l'on sait. Mais je
pense vraiment qu'en allant un peu plus loin, il serait plus facile de
comprendre le problème > A ce moment là, on croit
qu'on peut s'amender en se mettant à genoux. On s'agenouille par
avance, de sorte que l'on peut atteindre une position similaire
ensuite, pourvu, certes, que l'autre partie l'approuve. Certains torts
ne peuvent être pardonnés qu'ainsi : ce que Willy Brandt a fait en
Pologne en s'agenouillant devant le mémorial du soulèvement du ghetto
de Varsovie en est l'illustration.
D'autre part, il est possible d'envisager le problème de la demande de
pardon comme les deux faces d'une même pièce. Car il y a aussi l'acte
de forcer quelqu'un à s'excuser, ce qui concerne à la fois les
relations humaines, la hiérarchie et les positions prévues des
personnes par rapport à leurs interlocuteurs. On sort ici du processus
de la passivité, de la confrontation et des comptes rendus que
constitue > Tout spécialement si la partie qui
attend une demande de pardon se voit en position supérieure et qu'elle
voudrait mettre l'accent sur cette supériorité, l'affaire peut prendre
la forme de quelque chose d'imposé. Dans un tel cas, et
particulièrement si la personne en attente de pardon possède
réellement un statut social supérieur -- comme un employeur ou un
politicien -- alors la demande de pardon se transforme en une toute
autre chose. Car ici, celui qui doit s'excuser ne réalise pas la
confrontation mentionnée plus haut. Celle ci est devenue un programme
de conduite qui s'impose à lui. S'il ne demande pas pardon, il
pourrait risquer plusieurs difficultés quotidiennes et
professionnelles. S'il n'est pas en mesure de les surmonter, il
demandera pardon. Ici, aussi, il est peut-être question d'un
agenouillement, mais forcé. Il ne sert qu'à souligner le statut
supérieur de l'autre et perpétuer la hiérarchie. On n'y gagne rien de
plus. On peut le voir de temps à autre dans les relations
interétatiques. Mais le pardon dont on parle n'est pas celui là. Ce
pardon forcé n'est qu'un mauvais exemple donné à ce sujet.
Venons en enfin à celui qui attend à une demande de pardon. C'est une
victime, sans aucun doute. Elle a éprouvé un dommage énorme, qu'il
soit matériel ou moral, pour lequel elle s'attend à des réparations
aussi bien qu'à une >. Les réparations matérielles
ne suffisent pas. Et pourquoi ? Parce que, comme on l'a déjà dit,
elle attend et exige que celui qui a perpétré le crime subisse une
confrontation avec sa propre action. Faute de confrontation, les
réparations (hypothétiques, voire parfois inexistantes) ne suffisent
pas, loin s'en faut. Plus important que les réparations, il faut que en
dit beaucoup sur les dites relations entre l'Etat et la société, aussi
bien qu'entre l'autorité centrale et les Kurdes.).
Le déni perpétue le crime
Dans certains cas -- on peut maintenant sortir des situations
interpersonnelles et passer aux situations inter sociétales -- le
perpétrateur a agi en vertu de son statut qu'il considère supérieur.
En renforçant son statut de dominant, il a déjà refusé de voir l'autre
comme son égal et l'a même rabaissé. Il ne tente que de l'affaiblir,
peut-être de l'anéantir : voilà l'arrière pensée qui nous explique
pourquoi les réparations ne suffiront pas. Car on ne parle pas d'une
confrontation du genre : "Je l'ai payé et je m'en suis débarrassé".
Cette intention explique comment, en niant son action et en refusant
de demander pardon, le perpétrateur continue encore à commettre le
crime. On peut donc dire, dans certains cas, que le déni perpétue en
quelque sorte le crime.
Ici, nous avons pénétré dans le champ des Etats et des sociétés.
Répétons le, le déni perpétue le crime à un autre niveau. Abordons
maintenant le sujet de la Turquie et du langage de la position
officielle. En Turquie, le déni est pratiqué par la position
officielle et l'autorité fondatrice avec une extrême facilité et une
grande insouciance, avant tout au niveau du >. Une
performance absolument impressionnante, négativement parlant. Ce
langage de déni s'est établi sur deux terrains, au sujet des Kurdes et
des Arméniens. Ce qui est significatif car la République s'est fondée
> ces deux peuples (voire trois, en comptant les Grecs). Ce
processus n'étant pas le sujet de cet article, on peut noter par une
simple lecture impartiale que, adoptant le caractère par rapport
au massacre/génocide des Arméniens dans le contexte de la
confrontation et de la demande de pardon.
Lorsqu'on pourra lever la tête, reprendre notre souffle et regarder
autour de nous en échappant au bombardement de la position officielle,
avec laquelle on a enterré la société toute entière, et sous laquelle
nous avons été enterrés tout au long de notre vie, voilà ce qu'on
pourra voir : une autorité, avec le soutien de quelques éléments de la
> a soumis un peuple sédentaire de l'Anatolie à la
purification ethnique. Elle l'a contraint à migrer, l'a massacré et a
confisqué une grande partie de ces biens. A la suite de acte, la
population de ce peuple a été réduite à une fraction symbolique dans
ce pays. Après tout ceci, on voit naturellement une tension émerger
entre la victime et le perpétrateur. Le lésé, ou pour mieux dire la
victime d'une telle atrocité, a attendu une sorte d'> de la
part de celui qui avait commis cet acte.
On peut revenir maintenant donc à la vie politique concrète. Comme on
le sait, l'année 2015 (il va sans dire, le centenaire de 1915)
approche. Il est probable que, pas seulement les victimes et leur
famille, mais aussi l'AKP, héritier de >, s'y
préparent. Les signes d'une préparation sont manifestes ; il semble
que l'AKP prend des mesures pour trouver une solution sans attirer
l'attention en 2015 et sans abandonner l'image du parti pragmatiste
aux confins de la position officielle classique. Ömer Çelik, ministre
de la Culture, a expliqué dans une récente interview au journal
arménien Agos (1) une de ces mesures :
>
Selon le Ministre Çelik, il n'y a pas de génocide, mais seulement des
massacres réciproques survenus en période d'absence de l'autorité.
Ici, il semble n'y avoir aucune nouvelle déclaration allant au-delà de
la ligne officielle. Cependant, il semble être à la recherche d'une
nouvelle formule, plus loin :
> et de la confrontation, c'est à tout cela qu'on se
réfère. Il ne faut pas comprimer notre avenir entre les parenthèses du
passé. Si un règlement des comptes imminent devait avoir lieu, il ne
serait pas entre les Turcs et les Arméniens, mais entre ceux parmi
nous qui embrassent la mentalité des Unionistes d'un côté et le lobby
du génocide de l'autre. >>
L'arrogance de la position officielle continue
Cette logique, cette formule est effectivement un pas en avant vis à
vis de la position officielle. Et assurément un pas positif. Au moins
cela inclut une confrontation. Mais on s'arrête précisément là. Et la
formule proposée est celle de >, qui, au départ, sonne
plutôt bien. L'autorité a remarqué que quelque chose s'est passé ; en
vérité, elle sait ce qui a été fait et dit: > Le problème qui en résulte c'est
que, comme on a déjà expliqué dans la partie concernant les individus,
il est possible de prendre un chemin plus facile pour éviter de
demander pardon. On esquive le mot même. Par contre, on peut dire
peut-être qu'il s'agit d'une demande de pardon ; qu'il est aussi
significatif pour la Turquie d'avoir atteint cette position et qu'il
n'est peut être pas réaliste de s'attendre à une demande de pardon > de la part des états.
A chacun son avis, mais il faut l'avouer : en ce qui concerne de
telles problématiques, il n'y a pas de formule >
entre les Etats ou les sociétés. Du moins elle ne pourrait pas
constituer une formule définitive puisque, du point de vue de la
victime, l'action n'est pas encore définie : tout en acceptant
l'action, le perpétrateur choisit de ne pas > ce qui est
conséquemment et logiquement exigé. Bref, il ne demande pas pardon du
tout. Il accepte simplement que quelque chose s'est passé, mais en le
transformant en un évènement arbitraire et chaotique, sans auteur et
sans sujet. La hiérarchie entre l'autorité et la victime est donc
protégée et perpétuée. L'arrogance de l'autorité -- héritière du
perpétrateur -- est préservée. (Et ici on fait une troisième
comparaison : rappelons-nous du moment où le gouvernement de l'AKP a
affirmé à Israël, au sujet de l'attaque contre Mavi Marmara, qu'une
demande de pardon était absolument exigée et que les relations ne
seraient pas normalisées jusqu'à l'utilisation du mot >
D'autre part, comparons ceci avec la déclaration d'Ömer Çelik : et qu'il faut laisser tomber
l'affaire. Naturellement, cela revient à dire à la victime : > De plus, cette formule
peut indiquer aux victimes et à leurs proches qu'au lieu de donner
lieu à une confrontation ou à une demande de pardon, l'affaire sera
plutôt déclarée comme >.
Un dernier point important dans les mots de Çelik est sa tendance à
voir et à la thérapie réciproque. Pourquoi est-il devenu si
facilement une cible et à travers quels paradigmes ? Dans quel climat
social habitaient les Arméniens ou habitent encore les Arméniens ?
Sans chercher véritablement la réponse à ces questions, la formule de
> restera encore populaire dans ce pays. Et
naturellement, le parti Union et Progrès qui est l'>,
continuera à être assimilé à la diaspora qui est formée des familles
des victimes.
Pour conclure l'analyse de l'interview d'Ömer Çelik, on peut aborder
un dernier point. Il est bien sûr impossible de prévoir le climat
politique d'ici 2015, ni de prétendre que l'AKP ou la Turquie assumera
la position qu'implique la déclaration de Çelik. Un ton plus doux ou
au contraire plus dur pourra être employé. Cependant, ses paroles sont
les indices les plus concrets dont nous disposons actuellement, j'ai
donc basé mon analyse sur sa déclaration.
À quoi s'attendent la victime et le lésé ?
Néanmoins, nous ne parlons pas d'un endroit où tout est clair et sans
ambiguïté. Il y a des questions. Juste à ce moment, peut-être devrions
nous pouvons prêter l'oreille à ce que dit Marc Nichanian. Ses
conférences sur la catastrophe, les excuses, le pardon et le deuil ont
été recueillies dans le volume Littérature et Catastrophe, où il fait
la remarque suivante en référence à Derrida:
Afin de pouvoir atteindre le niveau où nous pouvons conjointement
questionner ce que faire la paix révèle et cache, la première étape
pour faire la paix doit être la confession, une demande afin d'être
pardonné, un projet de paix. Dans les dernières années de sa vie,
Derrida avait également manifesté son intérêt pour ce sujet. Maintes
et maintes fois, il est revenu sur les mêmes questions : la
mondialisation de la scène du pardon, la thétralisation mondiale de
la confession et du témoignage. Nous confessons nos péchés et ceux de
nos pères. Nous sommes coupables et demandons pardon. Ou dans une
autre version: nous faisons des excuses, même si nous ne sommes pas
personnellement coupable. Au nom de qui et de quoi ? Au nom de l'État
? De la société civile ? De nos pères ? Avons-nous le droit de parler
au nom de nos pères ? En outre, à qui s'adresse la phrase > ? La nation ? Les individus ? L'Etat, qui est censé
représenter ces personnes ou incarner la nation ? Un tribunal de la
planète ? Sans aucun doute, beaucoup de questions exigent des
réponses. Pourtant, chacune de ces questions sont cruciales et doivent
trouver très rapidement une réponse. De plus, il existe encore une
autre question qui nous attend. Doit-on dire > ou
>, mais pas, par exemple, par . (...)
S'agit-il vraiment de phrases d'excuses ? L'interlocuteur ne peut-il
pas se demander si il ou elle a la force de pardonner ? (...) > ; pour les familles des
victimes. Des années plus tard, on a trouvé des ossements à la suite
d'aveux de la part de quelques officiels et de recherches. C'est
ensuite que les familles ont parlé. Le message le plus important parmi
toutes les choses qu'elles ont pu dire était : >. Oui, elles pourraient le faire désormais
parce que l'Etat, en détenant ces corps, en les cachant, avait privé
les familles du processus le plus humain qui soit : le deuil. Des
centaines de personnes n'ont pas pu faire le deuil de leurs enfants,
de leurs maris, de leurs pères pendant des années. Il est tout à fait
impossible pour nous de l'imaginer ou de le comprendre. Pourtant, il
nous est toujours possible de voir à quel point l' peut
être cruelle.
Le déni a privé la société arménienne du deuil
Dans un sens, c'est le même effet créé par la politique de déni, la
culture du déni, et l'utilisation de la formule > dans toutes les déclarations officielles et les
correspondances. On a refusé le droit de deuil à la société arménienne
en la niant, en la décrivant comme >, en ayant une
attitude méprisante, et en répétant fort l'argument du >. Cela revient à dissimuler l'emplacement des os
des >. La différence étant qu'ici, le vide historique n'est
pas encore refermé, il est toujours en cours depuis 1915. C'est une
période extrêmement longue pour ne pas être en mesure de faire le
deuil.
Deuxièmement, nous avons suggéré que la victime ne serait pas en
mesure de satisfaire sa/son sens de la justice. Je pense cela ne
nécessite pas trop d'explication. Les personnes et les sociétés
s'attendent à la justice. La principale condition préalable ici est la
reconnaissance de la victime comme une >. C'est la première
étape. Cependant, la ligne officielle et largement acceptée (ce qui
est une description plus précise depuis que la ligne officielle n'est
plus simplement officielle, mais est également partagée dans l'espace
public et acceptée par une partie importante de la société), qui est
une extension des politique de déni, n'a pas reconnu que la victime
est effectivement une >. Et encore une fois, comme une
extension de cette politique, ils ont affirmé qu'ils sont les
véritables victimes, et de ce fait imposé ce point de vue à la
communauté arménienne de Turquie. En résumé, les victimes ont non
seulement été privées de leur >, mais la > a
également été confisquée de leurs mains. Aussi, les déclarations
officielles étant répétées encore et encore pendant des années, la > a été remplacée.4 Comme si tout cela ne suffisait pas, le
mot > a été utilisé comme une insulte, une opprobre, tout
le temps accompagnée de l'argument du gouvernement
israélien en raison de l'attaque sur le navire Mavi Marmara, et
pourquoi il a déclaré que les relations bilatérales ne pourraient pas
revenir à la normale jusqu'à ce que le mot > ait été
prononcé. Et faisons une comparaison entre la déclaration de Ömer
Çelik >, et les
mots du Premier ministre Erdogan > dans le contexte du massacre d'Uludere.
3. Marc Nichanian, Edebiyat ve Felaket, Editions Ýletiþim, Trad:
Ayþegül Sönmezay, p. 207 et suite. MS Littérature et Catastrophe pp
164-65.
4. Bien sûr, cela ne veut pas dire que je considère que les pertes des
Turcs ou des musulmans à l'époque soient sans importance. Eux aussi,
ont subi des pertes et c'est une souffrance qui doit être partagée et
prise en considération. Néanmoins, il ne peut pas être considéré comme
une approche juste d'opposer cette souffrance à ce qu'il s'est passé
en 1915, et progressivement minimiser ce dernier en soulignant
l'ancien au point de détruire 1915.