TURQUIE : LA CENSURE S'ABAT A NOUVEAU SUR LES MéDIAS TURCS
Publié le : 09-04-2015
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=87280
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
invite a lire cette information publiée sur le site des Reporters
sans frontières le 2 avril 2015.
Reporters sans frontières
Turquie
Prise en otage d'un procureur : la censure s'abat a nouveau sur les
médias turcs
Publié le jeudi 2 avril 2015.
Alors qu'une prise d'otage se déroulait au Palais de justice
d'Istanbul, le 31 mars 2015, le Premier ministre turc a rapidement
interdit toute couverture médiatique de cet événement. Le
lendemain, de nombreux médias critiques des autorités ont été
empêchés d'assister aux funérailles de l'otage abattu. Quatre
titres sont également visés par une enquête pour "propagande du
terrorisme". Reporters sans frontières (RSF) condamne ces restrictions
abusives.
L'exécutif turc a de nouveau démontré que la censure était
son premier réflexe en cas de difficulté. La prise en otage du
procureur Mehmet Selim Kiraz par un commando armé, le 31 mars 2015
au Palais de justice de Caglayan (Istanbul), s'est soldée par la
mort du magistrat et de ses deux ravisseurs, après huit heures de
négociations infructueuses avec les forces de l'ordre. Dès les
premières heures du drame, le bureau du Premier ministre a interdit
aux médias de couvrir cette affaire.
"En Turquie, chaque affaire sensible fait désormais l'objet
d'une interdiction de publier, observe Johann Bihr, responsable
du bureau Europe de l'Est et Asie centrale de Reporters sans
frontières. La banalisation de cette censure pure et simple est
d'autant plus inquiétante que l'exécutif en assume de plus en plus
la responsabilité. Ce faisant, il foule aux pieds le droit de la
population d'être informée sur un sujet d'intérêt général."
Interdiction de couvrir la prise d'otage
L'"interdiction temporaire de publier" décrétée en début
d'après-midi par le Premier ministre Ahmet Davutoglu se fonde sur
l'article 7 de la loi sur le Haut conseil de l'audiovisuel (RTUK),
qui l'autorise en cas d""atteinte a la sécurité nationale ou a
l'ordre public". Aucune échéance n'a été fixée pour la levée
de cet interdit.
Les principales chaînes de télévision ont ainsi abruptement mis
fin a leurs directs depuis le Palais de justice. Citant a l'antenne la
décision du Premier ministre, les chaînes d'information en continu se
sont dès lors bornées a relayer les quelques informations disponibles
- et ce, encore longtemps après le dénouement de la prise d'otage.
"[L'interdiction] n'a eu pour effet que de décupler les rumeurs
et d'empêcher les gens de recevoir des informations exactes", a
déclaré au journal Today's Zaman le directeur général de Bugun
TV et de Kanal Turk, Tarık Toros.
La volonté des autorités de contrôler l'information s'est
également traduite aux abords du Palais de justice de Caglayan par
des débordements policiers vis-a-vis de plusieurs journalistes. Ece
Aydın, correspondante du journal BirGun et de la chaîne Yol TV,
a été interpellée dans la soirée et n'a été relâchée qu'au
milieu de la nuit. La journaliste danoise Nanna Muus, bousculée par
les forces de l'ordre, s'est vu dire : "Rentrez dans votre pays ou
nous vous arrêterons".
Des dizaines d'affaires sensibles ont fait l'objet d'"interdictions
de publier" ces dernières années. Parmi les plus connues, on
peut citer l'enquête parlementaire visant d'anciens ministres
soupconnés de corruption, les émeutes les plus meurtrières de
ces trente dernières années, la prise d'otages au consulat turc de
Mossoul, les convois d'armes présumés a destination de la Syrie,
les sanglants attentats de Reyhanli...
Les médias critiques proclamés "complices des terroristes"
Sur ordre du Premier ministre, de nombreux médias critiques des
autorités ont été empêchés d'assister aux funérailles du
procureur Mehmet Selim Kiraz, le 1er avril a la mosquée Eyup Sultan
d'Istanbul.
Les journalistes des agences Cihan et Dogan, des quotidiens Zaman,
Hurriyet, Posta, Sözcu, Taraf, Millet, Cumhuriyet, Ortadogu,
Yenicag et Birgun, des chaînes Samanyolu TV, IMC TV, Kanalturk,
CNN Turk et Bugun, ont été refoulés, qu'ils disposent ou non de
cartes de presse.
Ahmet Davutoglu a reconnu après la cérémonie qu'il avait "donné
l'ordre de barrer l'accès" de la cérémonie a certains médias. "A
partir de maintenant, tout le monde fera attention a son comportement",
a-t-il ajouté, critiquant ceux qui avaient "publié de la propagande
terroriste".
Les services du Premier ministre et les journaux proches du pouvoir
ont explicité cet anathème, dénoncant les médias qui avaient
republié une photo postée par les preneurs d'otage, mettant en
scène le procureur Mehmet Selim Kiraz un revolver sur la tempe sur
fond d'affiches du DHKP/C. L'image avait aussitôt fait le tour des
réseaux sociaux et avait été largement reprise. Certains médias
se sont également vus reprocher de n'avoir pas utilisé le mot
"terroristes" pour désigner les preneurs d'otage.
Reporters sans frontières se joint aux protestations du syndicat
de journalistes TGC et le Conseil de la Presse, qui ont dénoncé un
boycott discriminatoire. "Le débat déontologique est légitime au
sein de la profession, mais les actions arbitraires des autorités
contribuent a le rendre impossible, estime Johann Bihr. En tout état
de cause, il ne revient pas au Premier ministre de dicter aux médias
leurs choix éditoriaux, ni de filtrer les entrées a un événement
de cette importance."
Dans la soirée, le parquet d'Istanbul a ouvert une enquête contre
les quotidiens Hurriyet, Cumhuriyet, Posta et Bugun, soupconnés de
"propagande du terrorisme" (article 7.2 de la Loi antiterroriste). RSF
dénonce un acharnement déplacé et demande l'abandon de ces
procédures.
La Turquie occupe la 149e place sur 180 pays dans le Classement
mondial 2015 de la liberté de la presse, établi par l'organisation.
Source/Lien : Reporters sans frontières
Publié le : 09-04-2015
http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=87280
Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
invite a lire cette information publiée sur le site des Reporters
sans frontières le 2 avril 2015.
Reporters sans frontières
Turquie
Prise en otage d'un procureur : la censure s'abat a nouveau sur les
médias turcs
Publié le jeudi 2 avril 2015.
Alors qu'une prise d'otage se déroulait au Palais de justice
d'Istanbul, le 31 mars 2015, le Premier ministre turc a rapidement
interdit toute couverture médiatique de cet événement. Le
lendemain, de nombreux médias critiques des autorités ont été
empêchés d'assister aux funérailles de l'otage abattu. Quatre
titres sont également visés par une enquête pour "propagande du
terrorisme". Reporters sans frontières (RSF) condamne ces restrictions
abusives.
L'exécutif turc a de nouveau démontré que la censure était
son premier réflexe en cas de difficulté. La prise en otage du
procureur Mehmet Selim Kiraz par un commando armé, le 31 mars 2015
au Palais de justice de Caglayan (Istanbul), s'est soldée par la
mort du magistrat et de ses deux ravisseurs, après huit heures de
négociations infructueuses avec les forces de l'ordre. Dès les
premières heures du drame, le bureau du Premier ministre a interdit
aux médias de couvrir cette affaire.
"En Turquie, chaque affaire sensible fait désormais l'objet
d'une interdiction de publier, observe Johann Bihr, responsable
du bureau Europe de l'Est et Asie centrale de Reporters sans
frontières. La banalisation de cette censure pure et simple est
d'autant plus inquiétante que l'exécutif en assume de plus en plus
la responsabilité. Ce faisant, il foule aux pieds le droit de la
population d'être informée sur un sujet d'intérêt général."
Interdiction de couvrir la prise d'otage
L'"interdiction temporaire de publier" décrétée en début
d'après-midi par le Premier ministre Ahmet Davutoglu se fonde sur
l'article 7 de la loi sur le Haut conseil de l'audiovisuel (RTUK),
qui l'autorise en cas d""atteinte a la sécurité nationale ou a
l'ordre public". Aucune échéance n'a été fixée pour la levée
de cet interdit.
Les principales chaînes de télévision ont ainsi abruptement mis
fin a leurs directs depuis le Palais de justice. Citant a l'antenne la
décision du Premier ministre, les chaînes d'information en continu se
sont dès lors bornées a relayer les quelques informations disponibles
- et ce, encore longtemps après le dénouement de la prise d'otage.
"[L'interdiction] n'a eu pour effet que de décupler les rumeurs
et d'empêcher les gens de recevoir des informations exactes", a
déclaré au journal Today's Zaman le directeur général de Bugun
TV et de Kanal Turk, Tarık Toros.
La volonté des autorités de contrôler l'information s'est
également traduite aux abords du Palais de justice de Caglayan par
des débordements policiers vis-a-vis de plusieurs journalistes. Ece
Aydın, correspondante du journal BirGun et de la chaîne Yol TV,
a été interpellée dans la soirée et n'a été relâchée qu'au
milieu de la nuit. La journaliste danoise Nanna Muus, bousculée par
les forces de l'ordre, s'est vu dire : "Rentrez dans votre pays ou
nous vous arrêterons".
Des dizaines d'affaires sensibles ont fait l'objet d'"interdictions
de publier" ces dernières années. Parmi les plus connues, on
peut citer l'enquête parlementaire visant d'anciens ministres
soupconnés de corruption, les émeutes les plus meurtrières de
ces trente dernières années, la prise d'otages au consulat turc de
Mossoul, les convois d'armes présumés a destination de la Syrie,
les sanglants attentats de Reyhanli...
Les médias critiques proclamés "complices des terroristes"
Sur ordre du Premier ministre, de nombreux médias critiques des
autorités ont été empêchés d'assister aux funérailles du
procureur Mehmet Selim Kiraz, le 1er avril a la mosquée Eyup Sultan
d'Istanbul.
Les journalistes des agences Cihan et Dogan, des quotidiens Zaman,
Hurriyet, Posta, Sözcu, Taraf, Millet, Cumhuriyet, Ortadogu,
Yenicag et Birgun, des chaînes Samanyolu TV, IMC TV, Kanalturk,
CNN Turk et Bugun, ont été refoulés, qu'ils disposent ou non de
cartes de presse.
Ahmet Davutoglu a reconnu après la cérémonie qu'il avait "donné
l'ordre de barrer l'accès" de la cérémonie a certains médias. "A
partir de maintenant, tout le monde fera attention a son comportement",
a-t-il ajouté, critiquant ceux qui avaient "publié de la propagande
terroriste".
Les services du Premier ministre et les journaux proches du pouvoir
ont explicité cet anathème, dénoncant les médias qui avaient
republié une photo postée par les preneurs d'otage, mettant en
scène le procureur Mehmet Selim Kiraz un revolver sur la tempe sur
fond d'affiches du DHKP/C. L'image avait aussitôt fait le tour des
réseaux sociaux et avait été largement reprise. Certains médias
se sont également vus reprocher de n'avoir pas utilisé le mot
"terroristes" pour désigner les preneurs d'otage.
Reporters sans frontières se joint aux protestations du syndicat
de journalistes TGC et le Conseil de la Presse, qui ont dénoncé un
boycott discriminatoire. "Le débat déontologique est légitime au
sein de la profession, mais les actions arbitraires des autorités
contribuent a le rendre impossible, estime Johann Bihr. En tout état
de cause, il ne revient pas au Premier ministre de dicter aux médias
leurs choix éditoriaux, ni de filtrer les entrées a un événement
de cette importance."
Dans la soirée, le parquet d'Istanbul a ouvert une enquête contre
les quotidiens Hurriyet, Cumhuriyet, Posta et Bugun, soupconnés de
"propagande du terrorisme" (article 7.2 de la Loi antiterroriste). RSF
dénonce un acharnement déplacé et demande l'abandon de ces
procédures.
La Turquie occupe la 149e place sur 180 pays dans le Classement
mondial 2015 de la liberté de la presse, établi par l'organisation.
Source/Lien : Reporters sans frontières