LES LECONS D'UN CENTENAIRE. PROPOS DU GENOCIDE ARMENIEN (DEBOUT LA FRANCE)
FRANCE
Le 24 avril, le centenaire du genocide armenien sera commemore,
a Erevan, en presence de plusieurs chefs d'Etat etrangers dont
Francois Hollande. Il le sera aussi dans les pays de diaspora,
et au premier chef en France, où 600.000 de nos compatriotes sont
d'origine armenienne.
L'ampleur du massacre perpetre dans l'Empire ottoman a partir du
24 avril 1915 est incontestable et, dans l'etat des connaissances
historiques, la qualification de genocide, c'est-a-dire de massacre
premedite et systematique d'un peuple ou d'un groupe ethnique a fin
d'extermination, ne peut, elle-meme, etre deniee.
Il est impossible de relativiser l'horreur par l'horreur comme
certains, et en particulier les autorites turques, l'ont fait pendant
trop longtemps. Les massacres qui ont eu lieu anterieurement dans
l'Empire, en particulier sous Abdulhamid II, surnomme le >, puis après sa deposition par les Jeunes Turcs du Comite Union
et Progrès, en 1909, pendant que d'autres se deroulaient ailleurs
comme les pogroms des Juifs en Russie, l'extermination parallèle a
celle des Armeniens, en pleine Première Guerre, des Grecs pontiques
et des Yazidis (deja !), aux deux extremites de l'Empire, ou les
quelques Turcs tues par des ressortissants des peuples minoritaires,
ne changent strictement rien au problème.
Les historiens ont aussi fait justice depuis longtemps de l'allegation
par les bourreaux et par leurs avocats du contexte de la Grande Guerre
et du fait que les Armeniens auraient constitue une cinquième colonne
preparant un soulèvement general en appui des Russes, ennemis des
Turcs. Lire aussi : Le pape et le > armenien
Quant au genocide lui-meme, il est evidemment difficile a prouver
definitivement, car les documents les plus compromettants, des
ordres officiels aux archives de l'Organisation speciale chargee de
l'execution, ont ete systematiquement detruits par les responsables.
Il reste neanmoins des epaves, les travaux de la cour martiale de 1919,
les multiples temoignages des survivants, mais aussi de fonctionnaires
turcs et de diplomates etrangers et le fameux >
du ministre de l'Interieur de l'epoque Talaat Pacha, instigateur et
maître d'oeuvre, texte revele en 2005. Il est plus que probable que
plus d'un million d'Armeniens vivant alors dans l'Empire ont ete tues
sur l'ordre d'Istanbul, les autres n'etant epargnes que parce qu'ils
vivaient dans la capitale ou a Smyrne, où le gouvernement ne pouvait
agir aussi facilement sous les yeux des etrangers et de l'opinion,
parce qu'ils reussirent a fuir ou parce qu'ils furent sauves par
l'avancee de l'armee russe. Pour ceux qui voudraient de plus amples
informations, je les invite a lire l'excellent ouvrage Comprendre le
genocide des armeniens, 1915 a nos jours, codirige par Hamit Bozarslan,
Vincent Duclert et Raymond Kevorkian (Tallandier, 2015).
Cela signifie-t-il pour autant qu'il faut legiferer en la matière ?
Non ! Depuis un quart de siècle, les responsables politiques francais
font fausse route avec des lois memorielles comme la loi Gayssot de
juillet 1990 ou la loi Taubira de mai 2001. Dans le cadre de notre
propos, une loi a reconnu le genocide armenien, en janvier 2001. Mais
un historien serieux et un responsable politique doivent le dire, ce
n'est pas au legislateur d'ecrire l'Histoire comme cela se fait dans
les regimes totalitaires ; ce n'est pas a lui de figer la recherche ;
ce n'est pas a lui de donner demagogiquement dans le compassionnel,
d'encourager la concurrence victimaire, de donner un alibi aux
complotistes ; ce n'est meme pas a lui d'affirmer un fait historique,
fût-il indiscutable !
En novembre 2008, après de nouvelles controverses, les deputes avaient
pris la decision de ne plus se prononcer que par des resolutions
dans le domaine de la memoire. Trois ans plus tard, cette decision
plus sage etait oubliee. La loi visant a reprimer la contestation
de l'existence des genocides reconnus par les lois deja evoquees fut
votee. Elle a justement ete sanctionnee par le Conseil constitutionnel
comme contraire a la Constitution, le 28 fevrier 2012. Depuis, le
president Francois Hollande, qui a fait du pathos l'un de ses chevaux
de bataille, a envisage de refaire, une fois de plus, du Parlement un
tribunal de l'Histoire. De grâce, laissons les historiens travailler
et donnons ensuite de l'echo a leurs recherches ! N'instrumentalisons
pas la souffrance ou ne la desservons pas en croyant bien faire !
Si le deni du gouvernement turc est insupportable, il ne pourra etre
eternel. Sa reaction a la declaration historique du pape Francois et
sa volonte d'attenuer les commemorations du 24 par l'organisation,
en grande pompe, du centenaire du debarquement des Dardanelles (avec,
au passage, un tour de passe-passe historique puisque celui-ci eut
lieu le lendemain) ne passent pas, y compris en Turquie, et ont ete
tournees en derision. Les mentalites evoluent. La normalisation des
relations turco-armeniennes est au bout. Encore est-il souhaitable
qu'elle ne tarde pas trop et que le gouvernement turc comprenne
rapidement où se trouve son interet !
C'est pourquoi, en plus de ce que nous devons a nos compatriotes
d'origine armenienne, il est capital de participer aux commemorations
du 24 avril a travers toute la France et de leur donner le plus grand
echo possible. Cela nous incitera peut-etre aussi a ne pas fermer
les yeux sur un autre massacre, celui qui se deroule actuellement aux
confins des Empires ottoman et perse de jadis et qui frappe d'autres
chretiens !
http://www.debout-la-france.fr/article/les-lecons-d-un-centenaire-propos-du-genocide-armenien
jeudi 23 avril 2015, Stephane (c)armenews.com
http://www.armenews.com/article.php3?id_article=110745
From: A. Papazian
FRANCE
Le 24 avril, le centenaire du genocide armenien sera commemore,
a Erevan, en presence de plusieurs chefs d'Etat etrangers dont
Francois Hollande. Il le sera aussi dans les pays de diaspora,
et au premier chef en France, où 600.000 de nos compatriotes sont
d'origine armenienne.
L'ampleur du massacre perpetre dans l'Empire ottoman a partir du
24 avril 1915 est incontestable et, dans l'etat des connaissances
historiques, la qualification de genocide, c'est-a-dire de massacre
premedite et systematique d'un peuple ou d'un groupe ethnique a fin
d'extermination, ne peut, elle-meme, etre deniee.
Il est impossible de relativiser l'horreur par l'horreur comme
certains, et en particulier les autorites turques, l'ont fait pendant
trop longtemps. Les massacres qui ont eu lieu anterieurement dans
l'Empire, en particulier sous Abdulhamid II, surnomme le >, puis après sa deposition par les Jeunes Turcs du Comite Union
et Progrès, en 1909, pendant que d'autres se deroulaient ailleurs
comme les pogroms des Juifs en Russie, l'extermination parallèle a
celle des Armeniens, en pleine Première Guerre, des Grecs pontiques
et des Yazidis (deja !), aux deux extremites de l'Empire, ou les
quelques Turcs tues par des ressortissants des peuples minoritaires,
ne changent strictement rien au problème.
Les historiens ont aussi fait justice depuis longtemps de l'allegation
par les bourreaux et par leurs avocats du contexte de la Grande Guerre
et du fait que les Armeniens auraient constitue une cinquième colonne
preparant un soulèvement general en appui des Russes, ennemis des
Turcs. Lire aussi : Le pape et le > armenien
Quant au genocide lui-meme, il est evidemment difficile a prouver
definitivement, car les documents les plus compromettants, des
ordres officiels aux archives de l'Organisation speciale chargee de
l'execution, ont ete systematiquement detruits par les responsables.
Il reste neanmoins des epaves, les travaux de la cour martiale de 1919,
les multiples temoignages des survivants, mais aussi de fonctionnaires
turcs et de diplomates etrangers et le fameux >
du ministre de l'Interieur de l'epoque Talaat Pacha, instigateur et
maître d'oeuvre, texte revele en 2005. Il est plus que probable que
plus d'un million d'Armeniens vivant alors dans l'Empire ont ete tues
sur l'ordre d'Istanbul, les autres n'etant epargnes que parce qu'ils
vivaient dans la capitale ou a Smyrne, où le gouvernement ne pouvait
agir aussi facilement sous les yeux des etrangers et de l'opinion,
parce qu'ils reussirent a fuir ou parce qu'ils furent sauves par
l'avancee de l'armee russe. Pour ceux qui voudraient de plus amples
informations, je les invite a lire l'excellent ouvrage Comprendre le
genocide des armeniens, 1915 a nos jours, codirige par Hamit Bozarslan,
Vincent Duclert et Raymond Kevorkian (Tallandier, 2015).
Cela signifie-t-il pour autant qu'il faut legiferer en la matière ?
Non ! Depuis un quart de siècle, les responsables politiques francais
font fausse route avec des lois memorielles comme la loi Gayssot de
juillet 1990 ou la loi Taubira de mai 2001. Dans le cadre de notre
propos, une loi a reconnu le genocide armenien, en janvier 2001. Mais
un historien serieux et un responsable politique doivent le dire, ce
n'est pas au legislateur d'ecrire l'Histoire comme cela se fait dans
les regimes totalitaires ; ce n'est pas a lui de figer la recherche ;
ce n'est pas a lui de donner demagogiquement dans le compassionnel,
d'encourager la concurrence victimaire, de donner un alibi aux
complotistes ; ce n'est meme pas a lui d'affirmer un fait historique,
fût-il indiscutable !
En novembre 2008, après de nouvelles controverses, les deputes avaient
pris la decision de ne plus se prononcer que par des resolutions
dans le domaine de la memoire. Trois ans plus tard, cette decision
plus sage etait oubliee. La loi visant a reprimer la contestation
de l'existence des genocides reconnus par les lois deja evoquees fut
votee. Elle a justement ete sanctionnee par le Conseil constitutionnel
comme contraire a la Constitution, le 28 fevrier 2012. Depuis, le
president Francois Hollande, qui a fait du pathos l'un de ses chevaux
de bataille, a envisage de refaire, une fois de plus, du Parlement un
tribunal de l'Histoire. De grâce, laissons les historiens travailler
et donnons ensuite de l'echo a leurs recherches ! N'instrumentalisons
pas la souffrance ou ne la desservons pas en croyant bien faire !
Si le deni du gouvernement turc est insupportable, il ne pourra etre
eternel. Sa reaction a la declaration historique du pape Francois et
sa volonte d'attenuer les commemorations du 24 par l'organisation,
en grande pompe, du centenaire du debarquement des Dardanelles (avec,
au passage, un tour de passe-passe historique puisque celui-ci eut
lieu le lendemain) ne passent pas, y compris en Turquie, et ont ete
tournees en derision. Les mentalites evoluent. La normalisation des
relations turco-armeniennes est au bout. Encore est-il souhaitable
qu'elle ne tarde pas trop et que le gouvernement turc comprenne
rapidement où se trouve son interet !
C'est pourquoi, en plus de ce que nous devons a nos compatriotes
d'origine armenienne, il est capital de participer aux commemorations
du 24 avril a travers toute la France et de leur donner le plus grand
echo possible. Cela nous incitera peut-etre aussi a ne pas fermer
les yeux sur un autre massacre, celui qui se deroule actuellement aux
confins des Empires ottoman et perse de jadis et qui frappe d'autres
chretiens !
http://www.debout-la-france.fr/article/les-lecons-d-un-centenaire-propos-du-genocide-armenien
jeudi 23 avril 2015, Stephane (c)armenews.com
http://www.armenews.com/article.php3?id_article=110745
From: A. Papazian