A PARAÃŽTRE DANS POLITIQUE INTERNATIONALE
Haut-Karabagh : un règlement en vue ? par Edward Nalbandian
C'est l'histoire d'un peuple qui a exercé son droit légitime Ã
l'autodétermination. Un peuple qui a exprimé librement sa volonté et
qui se heurte, depuis près d'un siècle, à l'hostilité de ceux qui se
prétendent ses maîtres. Ce peuple, c'est celui du Haut-Karabagh.
Retour sur l'Histoire
Le Karabagh (appelé Artsakh pendant plusieurs siècles) faisait partie
intégrante des royaumes arméniens. En attestent les ouvrages des
auteurs anciens (Strabon, Pline l'Ancien, Claude Ptolémée, Plutarque,
Dion Cassius) ainsi que les nombreux témoignages culturels et
historiques de la présence arménienne (monuments, églises, cimetières,
etc.).
En 1918, après l'effondrement de l'Empire russe, l'Arménie, la Géorgie
et l'Azerbaïdjan ont déclaré leur indépendance. Peuplé majoritairement
d'Arméniens - environ 95 % -, le Haut-Karabagh était alors une entité
disposant des attributs de la souveraineté de facto (1). Dès cette
époque, l'Azerbaïdjan a commencé à faire valoir des revendications sur
ce territoire et a tenté de l'annexer par la force. De mai 1918 Ã
avril 1920, plusieurs massacres ont été perpétrés contre la population
arménienne. Pour le seul mois de mars 1920, on a dénombré environ 20
000 victimes tandis que 20 000 autres Arméniens étaient expulsés de
Chouchi, capitale du Karabagh en ce temps-là . L'illégalité de ces
exactions a été soulignée par la Société des Nations qui a, par
ailleurs, rejeté l'adhésion de l'Azerbaïdjan au motif qu'il était
impossible de définir clairement ses frontières (2).
Avec la soviétisation des républiques caucasiennes, les autorités
azerbaïdjanaises reçoivent le feu vert pour annexer l'Artsakh.
Le 5 juillet 1921, le Bureau caucasien du Parti communiste russe, sous
la pression de Joseph Staline, décide d'attribuer le Karabagh Ã
l'Azerbaïdjan. Il est à noter que ce Bureau n'était nullement habilité
à trancher les différends territoriaux d'un pays tiers, d'autant que
l'Union des républiques socialistes soviétiques n'avait pas encore été
créée et que l'Arménie comme l'Azerbaïdjan étaient des républiques
indépendantes reconnues de jure.
Après la fin de son programme d'occupation, Bakou est allé encore plus
loin. Alors que le Bureau caucasien du Parti communiste prévoyait la
création d'une région autonome sur l'ensemble du Haut-Karabagh, seule
une partie de ce territoire fut incluse dans la Région autonome du
Haut-Karabagh (NKAO). Résultat : celle-ci est devenue une enclave et a
été privée de frontière commune avec l'Arménie.
À l'époque soviétique, les autorités de l'Azerbaïdjan ont cherché Ã
entraver le développement social et économique de la région en
procédant à un véritable nettoyage ethnique et en détruisant ou en
s'appropriant les monuments et le patrimoine culturel arméniens. Dans
l'une de ses interviews (3), Heydar Aliev, l'ancien président de
l'Azerbaïdjan, a avoué avoir tout mis en oeuvre pour modifier la
démographie du Haut-Karabagh en faveur des Azerbaïdjanais. De fait,
les Arméniens qui, en 1921, formaient 94,4 % de la population n'en
représentaient plus que 76,9 % en 1989.
Les habitants de l'Artsakh n'ont jamais accepté la politique des
autorités azerbaïdjanaises visant à les priver de leur droit à choisir
leur propre destin. À plusieurs reprises, ils sont allés plaider leur
cause devant les autorités centrales soviétiques. Plusieurs requêtes
et pétitions ont été envoyées, priant Moscou de revenir sur la
décision de 1921 et de les réunir à l'Arménie.
La perestroïka, lancée par Mikhaïl Gorbatchev en 1985, a fourni
l'occasion de rouvrir la question. Le Mouvement populaire pour le
rattachement du Haut-Karabagh à l'Arménie (dirigé par les comités > et >) prend une nouvelle ampleur à partir de 1988.
Ce Mouvement, qui milite pour la fin de la tutelle azerbaïdjanaise et
pour le droit à l'autodétermination, a été l'un des moteurs de ce
processus de libéralisation, de démocratisation et de défense des
droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Le 20 février 1988, le Conseil des représentants du peuple du Karabagh
- le parlement local - adopte une résolution demandant aux autorités
soviétiques de rattacher la région autonome du Haut-Karabagh Ã
l'Arménie.
La réaction de l'Azerbaïdjan soviétique ne se fait pas attendre. Une
nouvelle vague de nettoyage ethnique contre les Arméniens déferle sur
le territoire de l'Artsakh ainsi que dans les régions de l'Azerbaïdjan
peuplées d'Arméniens. En février 1988, Soumgaït est le thétre d'un
massacre qui fait des dizaines de morts. La violence ne tarde pas Ã
gagner Bakou, Kirovabad, ainsi que d'autres villes et villages. Au
total, des centaines d'Arméniens trouvent la mort dans ces pogroms,
près de 400 000 autres sont obligés de fuir, trouvant refuge en
Arménie, en Russie et dans les autres républiques soviétiques.
La base juridique
Le 3 avril 1990, une nouvelle loi est adoptée qui autorise les entités
autonomes et les groupes ethniques à déterminer librement leur statut
juridique en cas de séparation d'une république de l'UR SS. Suite à la
déclaration d'indépendance de l'Azerbaïdjan soviétique, le 30 août
1991, le Haut-Karabagh se lance dans la même procédure juridique et
adopte sa propre déclaration d'indépendance. Lors du référendum du 10
décembre 1991, organisé sous la supervision d'observateurs étrangers,
la population du Haut-Karabagh se prononce à une majorité écrasante
(plus de 99 % des votants) en faveur de l'indépendance.
Ce référendum, qui s'est déroulé à un moment où le Haut-Karabagh
faisait encore partie de l'UR SS, était parfaitementconforme à la loi
soviétique. En toute logique, au lendemain de la disparition de l'UR
SS, deux formations étatiques ont vu le jour sur le territoire de
l'ancienne République socialiste soviétique d'Azerbaïdjan : la
République du Haut-Karabagh et la République de l'Azerbaïdjan.
Durant des années, le Parlement européen a adopté de nombreuses
résolutions de soutien à la lutte du Haut-Karabagh pour son
autodétermination. Ainsi, dans sa résolution du 21 juin 1999, il a
affirmé : >
Ce droit des peuples à l'autodétermination est un droit fondamental
consacré dans la Charte des Nations unies et réaffirmé par plusieurs
autres documents internationaux fondamentaux.
Ne pouvant opposer aucun argument juridique à l'indépendance du
Haut-Karabagh, Bakou a alors tenté de réduire le problème à un
différend territorial entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.
Le conflit et le processus de paix
Au Haut-Karabagh et dans les régions environnantes peuplées
d'Arméniens, le nettoyage ethnique mené par les autorités
azerbaïdjanaises a rapidement laissé place à des opérations militaires
de grande envergure. Celles-ci ont provoqué la mort de dizaines de
milliers de personnes et causé des destructions considérables. Dans
cette guerre, l'Azerbaïdjan a utilisé des mercenaires, notamment
afghans et tchétchènes, en liaison étroite avec des organisations
terroristes notoires.
Ces graves violations du droit international n'ont pas échappé Ã
l'attention de la communauté internationale. En 1988-1991, le Congrès
américain a condamné, à plusieurs reprises, l'agression de
l'Azerbaïdjan contre les civils arméniens. Et il a adopté, en 1992, la
Section 907 de l'Acte de soutien à la liberté, qui limite l'aide
américaine à l'Azerbaïdjan en raison de sa politique agressive et du
blocus exercé contre l'Arménie et le Haut-Karabagh.
En 1993, le Conseil de sécurité a adopté quatre résolutions appelant Ã
la cessation des hostilités, à l'ouverture des voies de communication
et à la reprise des pourparlers de paix avec toutes les parties
concernées, y compris le Haut-Karabagh. Pour toute réponse,
l'Azerbaïdjan s'est contenté d'intensifier ses offensives militaires.
Mais, sur le terrain, le rapport des forces tournait à son désavantage
et, bientôt, il n'eut d'autre choix que de demander un cessez-le-feu
au Haut-Karabagh.
En mai 1994, un accord de cessez-le-feu est signé entre le
Haut-Karabagh et l'Azerbaïdjan, auquel l'Arménie s'est également
jointe. Un nouvel accord trilatéral sur la consolidation du
cessez-le-feu est conclu en février 1995. Ces deux accords sont
constamment violés par l'Azerbaïdjan.
Depuis le milieu des années 1990, des pourparlers de paix sont menés
par les co-présidents du Groupe de Minsk de l'OSCE, composé de la
France, de la Russie et des États-Unis. Durant la première phase, les
négociations de paix impliquaient les trois parties - l'Arménie,
l'Azerbaïdjan et le Haut-Karabagh. Mais, à la fin des années 1990,
l'Azerbaïdjan a rompu le dialogue avec le Haut-Karabagh. Afin de
préserver le processus de paix, l'Arménie a poursuivi les
négociations, considérant que, à terme, le Haut-Karabagh serait
nécessairement impliqué. Il sera, en effet, impossible de parvenir Ã
un règlement durable sans sa participation ; cette approche est
entièrement partagée par les co-présidents.
Les co-présidents du Groupe de Minsk n'ont pas ménagé leur peine,
organisant des pourparlers réguliers à un haut niveau et multipliant
les navettes entre Bakou, Stepanakert et Erevan. En pure perte : tous
les efforts de paix ont été sabotés par l'Azerbaïdjan. En 2001, les
parties, réunies à Paris, sont passées tout près d'un règlement.
Malheureusement, Heydar Aliev, le président azerbaïdjanais de l'époque
et père de l'actuel président, est revenu sur les accords élaborés
dans la capitale française.
Les principes de base
En novembre 2007, lors du Conseil ministériel de l'OSCE à Madrid, les
co-présidents ont présenté les principes fondamentaux du règlement du
conflit du Haut-Karabagh, plus connus sous le nom de >.
L'Azerbaïdjan a, tout d'abord, refusé publiquement d'accepter
l'existence même des propositions de Madrid. Ensuite, Bakou s'est
efforcé de falsifier l'essence du document et de déformer le contenu
du processus de paix.
Les pays co-présidents ont donc été conduits à divulguer les grandes
lignes du document de Madrid, lequel repose sur trois principes
fondamentaux du droit international : le non-recours à la force ou Ã
la menace de la force ; le droit à l'autodétermination des peuples ;
et l'intégrité territoriale.
Les principaux éléments des propositions ont également été dévoilés :
la détermination du statut juridique final du Haut-Karabagh par une
expression juridiquement contraignante de la volonté de sa population
; un statut intérimaire pour le Haut-Karabagh jusqu'à l'organisation
de la libre expression de la volonté ; des garanties de sécurité
multi-niveau, incluant une opération de maintien de la paix autour du
Haut-Karabagh ; le retour des territoires entourant le Haut-Karabagh ;
un corridor reliant le Haut-Karabagh à l'Arménie ; le droit de tous
les réfugiés et des personnes déplacées à retourner dans leurs anciens
lieux de résidence.
L'Azerbaïdjan a rejeté chacun de ces points. Il a non seulement tenté
de changer l'essence du processus de négociation, mais a aussi essayé
de falsifier la nature du conflit dans les différentes enceintes
internationales, n'hésitant pas à induire en erreur la communauté
internationale en présentant les conséquences du conflit comme ses
causes.
Lors du sommet de l'OSCE qui s'est tenu à Astana en 2010, les
co-présidents du Groupe de Minsk ont prévenu : >
Entre 2008 et 2011, l'ancien président russe Dmitri Medvedev s'est
fortement impliqué dans le processus de paix. Il a organisé de
nombreuses réunions trilatérales entre les présidents de Russie,
d'Arménie et d'Azerbaïdjan, à l'occasion desquelles les parties ont
adopté quatre déclarations (4).
En appui aux efforts visant à un règlement pacifique, les présidents
des trois pays co-présidents ont adopté cinq déclarations (5). Des
déclarations sur le règlement du conflit du Haut-Karabagh ont
également été adoptées dans le cadre du sommet et des conférences
ministérielles de l'OSCE (6).
L'Arménie a accueilli favorablement toutes ces déclarations et exprimé
sa volonté de régler le conflit sur la base des propositions qui y
sont exprimées.
De son côté, l'Azerbaïdjan a non seulement refusé d'endosser ces
déclarations, mais il a rejeté toutes les versions des Principes de
base du règlement du conflit du Haut-Karabagh proposées par les
co-présidents du Groupe de Minsk, y compris les toutes dernières
présentées aux sommets de Saint-Pétersbourg (juin 2010), d'Astrakhan
(octobre 2010), de Sotchi (mars 2011) et de Kazan (juin 2011).
Nous avons participé à la réunion de Kazan, organisée à l'initiative
du président Medvedev avec le soutien des présidents Obama et Sarkozy,
dans un esprit positif, avec le sentiment qu'un accord sur les
Principes de base était à portée de main. Les présidents américain et
français avaient mis tout leur poids dans la balance. Dans un discours
prononcé à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe Ã
Strasbourg, juste avant la réunion, le président de l'Arménie, Serge
Sargsian, avait déclaré que si l'Azerbaïdjan ne proposait pas de
nouveaux amendements, on pouvait s'attendre à des résultats positifs.
Mais, encore une fois, le sommet de Kazan n'a pas enregistré de
percée, en dépit des espoirs qu'il avait suscités. Au dernier moment,
l'Azerbaïdjan a fait volte-face, proposant dix amendements au texte
qui était, en fait, déjà agréé. Le scénario des rencontres précédentes
se répétait une nouvelle fois.
Après le sommet de Kazan
Après le sommet de Kazan, le processus de paix a connu près de deux
années de stagnation. Par son attitude négative, l'Azerbaïdjan n'a pas
seulement torpillé les négociations ; il a également contribué Ã
déstabiliser la situation sur le terrain. Durant cette période, les
violations du cessez-le-feu commises par l'Azerbaïdjan et les
provocations le long de la ligne de contact entre le Haut-Karabagh et
l'Azerbaïdjan, ainsi que sur la frontière entre l'Arménie et
l'Azerbaïdjan, se sont multipliées.
Les co-présidents ont reçu un mandat international pour faciliter le
processus de paix, ainsi que pour contribuer à la préservation et au
renforcement du cessez-le-feu existant. Ils ont défini un certain
nombre de Mesures de confiance et de sécurité (MDCS) : consolidation
du cessez-le-feu ; retrait des tireurs embusqués sur la ligne de
contact ; création d'un mécanisme d'enquête sur les violations du
cessez-le-feu. Ces propositions ont été approuvées par de grandes
organisations internationales aussi bien que par le secrétaire général
des Nations unies. Elles ont également été saluées par l'Arménie et le
Haut-Karabagh. Mais toutes ont été rejetées par Bakou.
L'Azerbaïdjan a même refusé d'entériner la mise en place du mécanisme
d'enquête qui avait pourtant été accepté par le président Aliev
(déclarations de Sotchi du 5 mars 2011 et du 23 janvier 2012). Il a
également menacé d'opposer son veto au vote du budget de l'OSCE pour
2012 si jamais des fonds étaient alloués à la création d'un tel
mécanisme d'enquête.
L'Arménie, elle, a toujours soutenu ces Mesures de confiance et de
sécurité (MDCS). Nous considérons qu'elles permettront de créer des
conditions favorables aux négociations. L'Azerbaïdjan soutient le
point de vue inverse et n'envisage la mise en place de ces mesures
qu'après que des progrès auront été réalisés dans le processus de
règlement. Cela n'a guère de sens, car il est évident que si nous
parvenions à une solution, ces mesures de confiance seraient moins
nécessaires. Il est tout aussi évident que, sans confiance entre les
parties, aucune solution n'est possible.
Arménophobie en Azerbaïdjan
Bakou encourage ouvertement la xénophobie et attise la haine contre
les Arméniens. Le président Aliev est même allé jusqu'à désigner les
Arméniens du monde entier comme les > de
l'Azerbaïdjan.
Ce sentiment anti-arménien a connu son apogée avec l'affaire Safarov.
En 2004, ce jeune militaire azerbaïdjanais qui participait à une
formation de l'Otan en Hongrie attaque dans son sommeil un autre
militaire et le tue à coups de hache au seul motif qu'il est arménien.
Condamné en Hongrie où il purge sa peine, il est finalement extradé en
2012. Aussitôt rentré chez lui, au lieu d'être incarcéré, il est
gracié et couvert d'honneurs. Les dirigeants azerbaïdjanais font de
lui un symbole de la fierté nationale et un exemple à suivre pour les
jeunes générations, s'attirant ainsi la réprobation du monde entier.
Le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe s'est
montré très clair : .
Malgré ces mises en garde, les autorités de Bakou ont continué Ã
affirmer que ce qu'elles avaient fait > et
ont fustigé en retour l'attitude de la communauté internationale.
Quand, à Vienne en novembre 2013, grce aux efforts des co-présidents,
la réunion de haut niveau entre les présidents de l'Arménie et de
l'Azerbaïdjan a repris après la fameuse affaire Safarov, on a cru que
les négociations pourraient aller de l'avant. Une nouvelle fois, ces
attentes furent déçues, l'Azerbaïdjan s'ingéniant à déstabiliser la
situation dans la zone du conflit.
La partie azerbaïdjanaise a mené plusieurs incursions qui ont fait de
nombreuses victimes, augmentant considérablement la tension sur le
terrain. Un villageois arménien qui s'était égaré par erreur en
territoire azerbaïdjanais a été arrêté, humilié devant les caméras de
télévision - une tactique qu'affectionnent les organisations
terroristes -, avant d'être exécuté le lendemain.
En Azerbaïdjan, des journalistes, des militants de la société civile,
des représentants de l'élite intellectuelle sont persécutés en tant
qu'> ou > pour la seule et
unique raison qu'ils appellent à la paix et à la réconciliation.
L'écrivain Akram Aylisli a ainsi été pris pour cible parce qu'il avait
publié un roman (7) dans lequel il faisait allusion aux pogroms
anti-arméniens de Bakou et Soumgait. Ses livres ont été brûlés sur la
place publique et lui-même a dû quitter le pays pour échapper à des
menaces de mort.
L'arménophobie est devenue une constante du discours politique. Les
plus courageux qui se dressent contre la ligne officielle
disparaissent rapidement de la scène. La manipulation de l'Histoire et
la propagande ont atteint un point tel que l'Arménie, et même Erevan,
ville pourtant plusieurs fois millénaire, est présentée comme un
ancien territoire azerbaïdjanais.
À une époque où la protection et la promotion des droits de l'homme
sont considérées comme des principes fondamentaux, l'intolérance
envers les valeurs des civilisations étrangères, les dégradations du
patrimoine culturel et religieux, voire son anéantissement
systématique, doivent être condamnés avec la même fermeté et la même
détermination que la violence exercée contre les peuples.
La destruction systématique des chefs-d'oeuvre de l'architecture
arménienne et des sites sacrés, notamment le saccage entre 1998 et
2005, au Nakhitchevan (8), de milliers de croix de pierre délicatement
sculptées par les maîtres arméniens entre le IXe et le XVIe siècle
relève à l'évidence de cette catégorie de crimes.
Des milliers de ces sculptures médiévales géantes ont été rasées sous
les yeux attentifs des autorités azerbaïdjanaises avant que la zone ne
soit transformée en terrain militaire. Un acte de vandalisme
sévèrement condamné par le Conseil international des monuments et des
sites (ICOMOS) lors de sa 16e assemblée générale : , Druzhba Narodov, 2012.
(8) - Stephen Castle, >,
The Independent, 30 mai 2006 ;
Sarah Pickman, >, archaeology.org, 30 juin 2006 ;
>, RFE/RL,
22 avril 2011.
dimanche 8 février 2015,
Ara (c)armenews.com
http://www.armenews.com/article.php3?id_article=107891
Haut-Karabagh : un règlement en vue ? par Edward Nalbandian
C'est l'histoire d'un peuple qui a exercé son droit légitime Ã
l'autodétermination. Un peuple qui a exprimé librement sa volonté et
qui se heurte, depuis près d'un siècle, à l'hostilité de ceux qui se
prétendent ses maîtres. Ce peuple, c'est celui du Haut-Karabagh.
Retour sur l'Histoire
Le Karabagh (appelé Artsakh pendant plusieurs siècles) faisait partie
intégrante des royaumes arméniens. En attestent les ouvrages des
auteurs anciens (Strabon, Pline l'Ancien, Claude Ptolémée, Plutarque,
Dion Cassius) ainsi que les nombreux témoignages culturels et
historiques de la présence arménienne (monuments, églises, cimetières,
etc.).
En 1918, après l'effondrement de l'Empire russe, l'Arménie, la Géorgie
et l'Azerbaïdjan ont déclaré leur indépendance. Peuplé majoritairement
d'Arméniens - environ 95 % -, le Haut-Karabagh était alors une entité
disposant des attributs de la souveraineté de facto (1). Dès cette
époque, l'Azerbaïdjan a commencé à faire valoir des revendications sur
ce territoire et a tenté de l'annexer par la force. De mai 1918 Ã
avril 1920, plusieurs massacres ont été perpétrés contre la population
arménienne. Pour le seul mois de mars 1920, on a dénombré environ 20
000 victimes tandis que 20 000 autres Arméniens étaient expulsés de
Chouchi, capitale du Karabagh en ce temps-là . L'illégalité de ces
exactions a été soulignée par la Société des Nations qui a, par
ailleurs, rejeté l'adhésion de l'Azerbaïdjan au motif qu'il était
impossible de définir clairement ses frontières (2).
Avec la soviétisation des républiques caucasiennes, les autorités
azerbaïdjanaises reçoivent le feu vert pour annexer l'Artsakh.
Le 5 juillet 1921, le Bureau caucasien du Parti communiste russe, sous
la pression de Joseph Staline, décide d'attribuer le Karabagh Ã
l'Azerbaïdjan. Il est à noter que ce Bureau n'était nullement habilité
à trancher les différends territoriaux d'un pays tiers, d'autant que
l'Union des républiques socialistes soviétiques n'avait pas encore été
créée et que l'Arménie comme l'Azerbaïdjan étaient des républiques
indépendantes reconnues de jure.
Après la fin de son programme d'occupation, Bakou est allé encore plus
loin. Alors que le Bureau caucasien du Parti communiste prévoyait la
création d'une région autonome sur l'ensemble du Haut-Karabagh, seule
une partie de ce territoire fut incluse dans la Région autonome du
Haut-Karabagh (NKAO). Résultat : celle-ci est devenue une enclave et a
été privée de frontière commune avec l'Arménie.
À l'époque soviétique, les autorités de l'Azerbaïdjan ont cherché Ã
entraver le développement social et économique de la région en
procédant à un véritable nettoyage ethnique et en détruisant ou en
s'appropriant les monuments et le patrimoine culturel arméniens. Dans
l'une de ses interviews (3), Heydar Aliev, l'ancien président de
l'Azerbaïdjan, a avoué avoir tout mis en oeuvre pour modifier la
démographie du Haut-Karabagh en faveur des Azerbaïdjanais. De fait,
les Arméniens qui, en 1921, formaient 94,4 % de la population n'en
représentaient plus que 76,9 % en 1989.
Les habitants de l'Artsakh n'ont jamais accepté la politique des
autorités azerbaïdjanaises visant à les priver de leur droit à choisir
leur propre destin. À plusieurs reprises, ils sont allés plaider leur
cause devant les autorités centrales soviétiques. Plusieurs requêtes
et pétitions ont été envoyées, priant Moscou de revenir sur la
décision de 1921 et de les réunir à l'Arménie.
La perestroïka, lancée par Mikhaïl Gorbatchev en 1985, a fourni
l'occasion de rouvrir la question. Le Mouvement populaire pour le
rattachement du Haut-Karabagh à l'Arménie (dirigé par les comités > et >) prend une nouvelle ampleur à partir de 1988.
Ce Mouvement, qui milite pour la fin de la tutelle azerbaïdjanaise et
pour le droit à l'autodétermination, a été l'un des moteurs de ce
processus de libéralisation, de démocratisation et de défense des
droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Le 20 février 1988, le Conseil des représentants du peuple du Karabagh
- le parlement local - adopte une résolution demandant aux autorités
soviétiques de rattacher la région autonome du Haut-Karabagh Ã
l'Arménie.
La réaction de l'Azerbaïdjan soviétique ne se fait pas attendre. Une
nouvelle vague de nettoyage ethnique contre les Arméniens déferle sur
le territoire de l'Artsakh ainsi que dans les régions de l'Azerbaïdjan
peuplées d'Arméniens. En février 1988, Soumgaït est le thétre d'un
massacre qui fait des dizaines de morts. La violence ne tarde pas Ã
gagner Bakou, Kirovabad, ainsi que d'autres villes et villages. Au
total, des centaines d'Arméniens trouvent la mort dans ces pogroms,
près de 400 000 autres sont obligés de fuir, trouvant refuge en
Arménie, en Russie et dans les autres républiques soviétiques.
La base juridique
Le 3 avril 1990, une nouvelle loi est adoptée qui autorise les entités
autonomes et les groupes ethniques à déterminer librement leur statut
juridique en cas de séparation d'une république de l'UR SS. Suite à la
déclaration d'indépendance de l'Azerbaïdjan soviétique, le 30 août
1991, le Haut-Karabagh se lance dans la même procédure juridique et
adopte sa propre déclaration d'indépendance. Lors du référendum du 10
décembre 1991, organisé sous la supervision d'observateurs étrangers,
la population du Haut-Karabagh se prononce à une majorité écrasante
(plus de 99 % des votants) en faveur de l'indépendance.
Ce référendum, qui s'est déroulé à un moment où le Haut-Karabagh
faisait encore partie de l'UR SS, était parfaitementconforme à la loi
soviétique. En toute logique, au lendemain de la disparition de l'UR
SS, deux formations étatiques ont vu le jour sur le territoire de
l'ancienne République socialiste soviétique d'Azerbaïdjan : la
République du Haut-Karabagh et la République de l'Azerbaïdjan.
Durant des années, le Parlement européen a adopté de nombreuses
résolutions de soutien à la lutte du Haut-Karabagh pour son
autodétermination. Ainsi, dans sa résolution du 21 juin 1999, il a
affirmé : >
Ce droit des peuples à l'autodétermination est un droit fondamental
consacré dans la Charte des Nations unies et réaffirmé par plusieurs
autres documents internationaux fondamentaux.
Ne pouvant opposer aucun argument juridique à l'indépendance du
Haut-Karabagh, Bakou a alors tenté de réduire le problème à un
différend territorial entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.
Le conflit et le processus de paix
Au Haut-Karabagh et dans les régions environnantes peuplées
d'Arméniens, le nettoyage ethnique mené par les autorités
azerbaïdjanaises a rapidement laissé place à des opérations militaires
de grande envergure. Celles-ci ont provoqué la mort de dizaines de
milliers de personnes et causé des destructions considérables. Dans
cette guerre, l'Azerbaïdjan a utilisé des mercenaires, notamment
afghans et tchétchènes, en liaison étroite avec des organisations
terroristes notoires.
Ces graves violations du droit international n'ont pas échappé Ã
l'attention de la communauté internationale. En 1988-1991, le Congrès
américain a condamné, à plusieurs reprises, l'agression de
l'Azerbaïdjan contre les civils arméniens. Et il a adopté, en 1992, la
Section 907 de l'Acte de soutien à la liberté, qui limite l'aide
américaine à l'Azerbaïdjan en raison de sa politique agressive et du
blocus exercé contre l'Arménie et le Haut-Karabagh.
En 1993, le Conseil de sécurité a adopté quatre résolutions appelant Ã
la cessation des hostilités, à l'ouverture des voies de communication
et à la reprise des pourparlers de paix avec toutes les parties
concernées, y compris le Haut-Karabagh. Pour toute réponse,
l'Azerbaïdjan s'est contenté d'intensifier ses offensives militaires.
Mais, sur le terrain, le rapport des forces tournait à son désavantage
et, bientôt, il n'eut d'autre choix que de demander un cessez-le-feu
au Haut-Karabagh.
En mai 1994, un accord de cessez-le-feu est signé entre le
Haut-Karabagh et l'Azerbaïdjan, auquel l'Arménie s'est également
jointe. Un nouvel accord trilatéral sur la consolidation du
cessez-le-feu est conclu en février 1995. Ces deux accords sont
constamment violés par l'Azerbaïdjan.
Depuis le milieu des années 1990, des pourparlers de paix sont menés
par les co-présidents du Groupe de Minsk de l'OSCE, composé de la
France, de la Russie et des États-Unis. Durant la première phase, les
négociations de paix impliquaient les trois parties - l'Arménie,
l'Azerbaïdjan et le Haut-Karabagh. Mais, à la fin des années 1990,
l'Azerbaïdjan a rompu le dialogue avec le Haut-Karabagh. Afin de
préserver le processus de paix, l'Arménie a poursuivi les
négociations, considérant que, à terme, le Haut-Karabagh serait
nécessairement impliqué. Il sera, en effet, impossible de parvenir Ã
un règlement durable sans sa participation ; cette approche est
entièrement partagée par les co-présidents.
Les co-présidents du Groupe de Minsk n'ont pas ménagé leur peine,
organisant des pourparlers réguliers à un haut niveau et multipliant
les navettes entre Bakou, Stepanakert et Erevan. En pure perte : tous
les efforts de paix ont été sabotés par l'Azerbaïdjan. En 2001, les
parties, réunies à Paris, sont passées tout près d'un règlement.
Malheureusement, Heydar Aliev, le président azerbaïdjanais de l'époque
et père de l'actuel président, est revenu sur les accords élaborés
dans la capitale française.
Les principes de base
En novembre 2007, lors du Conseil ministériel de l'OSCE à Madrid, les
co-présidents ont présenté les principes fondamentaux du règlement du
conflit du Haut-Karabagh, plus connus sous le nom de >.
L'Azerbaïdjan a, tout d'abord, refusé publiquement d'accepter
l'existence même des propositions de Madrid. Ensuite, Bakou s'est
efforcé de falsifier l'essence du document et de déformer le contenu
du processus de paix.
Les pays co-présidents ont donc été conduits à divulguer les grandes
lignes du document de Madrid, lequel repose sur trois principes
fondamentaux du droit international : le non-recours à la force ou Ã
la menace de la force ; le droit à l'autodétermination des peuples ;
et l'intégrité territoriale.
Les principaux éléments des propositions ont également été dévoilés :
la détermination du statut juridique final du Haut-Karabagh par une
expression juridiquement contraignante de la volonté de sa population
; un statut intérimaire pour le Haut-Karabagh jusqu'à l'organisation
de la libre expression de la volonté ; des garanties de sécurité
multi-niveau, incluant une opération de maintien de la paix autour du
Haut-Karabagh ; le retour des territoires entourant le Haut-Karabagh ;
un corridor reliant le Haut-Karabagh à l'Arménie ; le droit de tous
les réfugiés et des personnes déplacées à retourner dans leurs anciens
lieux de résidence.
L'Azerbaïdjan a rejeté chacun de ces points. Il a non seulement tenté
de changer l'essence du processus de négociation, mais a aussi essayé
de falsifier la nature du conflit dans les différentes enceintes
internationales, n'hésitant pas à induire en erreur la communauté
internationale en présentant les conséquences du conflit comme ses
causes.
Lors du sommet de l'OSCE qui s'est tenu à Astana en 2010, les
co-présidents du Groupe de Minsk ont prévenu : >
Entre 2008 et 2011, l'ancien président russe Dmitri Medvedev s'est
fortement impliqué dans le processus de paix. Il a organisé de
nombreuses réunions trilatérales entre les présidents de Russie,
d'Arménie et d'Azerbaïdjan, à l'occasion desquelles les parties ont
adopté quatre déclarations (4).
En appui aux efforts visant à un règlement pacifique, les présidents
des trois pays co-présidents ont adopté cinq déclarations (5). Des
déclarations sur le règlement du conflit du Haut-Karabagh ont
également été adoptées dans le cadre du sommet et des conférences
ministérielles de l'OSCE (6).
L'Arménie a accueilli favorablement toutes ces déclarations et exprimé
sa volonté de régler le conflit sur la base des propositions qui y
sont exprimées.
De son côté, l'Azerbaïdjan a non seulement refusé d'endosser ces
déclarations, mais il a rejeté toutes les versions des Principes de
base du règlement du conflit du Haut-Karabagh proposées par les
co-présidents du Groupe de Minsk, y compris les toutes dernières
présentées aux sommets de Saint-Pétersbourg (juin 2010), d'Astrakhan
(octobre 2010), de Sotchi (mars 2011) et de Kazan (juin 2011).
Nous avons participé à la réunion de Kazan, organisée à l'initiative
du président Medvedev avec le soutien des présidents Obama et Sarkozy,
dans un esprit positif, avec le sentiment qu'un accord sur les
Principes de base était à portée de main. Les présidents américain et
français avaient mis tout leur poids dans la balance. Dans un discours
prononcé à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe Ã
Strasbourg, juste avant la réunion, le président de l'Arménie, Serge
Sargsian, avait déclaré que si l'Azerbaïdjan ne proposait pas de
nouveaux amendements, on pouvait s'attendre à des résultats positifs.
Mais, encore une fois, le sommet de Kazan n'a pas enregistré de
percée, en dépit des espoirs qu'il avait suscités. Au dernier moment,
l'Azerbaïdjan a fait volte-face, proposant dix amendements au texte
qui était, en fait, déjà agréé. Le scénario des rencontres précédentes
se répétait une nouvelle fois.
Après le sommet de Kazan
Après le sommet de Kazan, le processus de paix a connu près de deux
années de stagnation. Par son attitude négative, l'Azerbaïdjan n'a pas
seulement torpillé les négociations ; il a également contribué Ã
déstabiliser la situation sur le terrain. Durant cette période, les
violations du cessez-le-feu commises par l'Azerbaïdjan et les
provocations le long de la ligne de contact entre le Haut-Karabagh et
l'Azerbaïdjan, ainsi que sur la frontière entre l'Arménie et
l'Azerbaïdjan, se sont multipliées.
Les co-présidents ont reçu un mandat international pour faciliter le
processus de paix, ainsi que pour contribuer à la préservation et au
renforcement du cessez-le-feu existant. Ils ont défini un certain
nombre de Mesures de confiance et de sécurité (MDCS) : consolidation
du cessez-le-feu ; retrait des tireurs embusqués sur la ligne de
contact ; création d'un mécanisme d'enquête sur les violations du
cessez-le-feu. Ces propositions ont été approuvées par de grandes
organisations internationales aussi bien que par le secrétaire général
des Nations unies. Elles ont également été saluées par l'Arménie et le
Haut-Karabagh. Mais toutes ont été rejetées par Bakou.
L'Azerbaïdjan a même refusé d'entériner la mise en place du mécanisme
d'enquête qui avait pourtant été accepté par le président Aliev
(déclarations de Sotchi du 5 mars 2011 et du 23 janvier 2012). Il a
également menacé d'opposer son veto au vote du budget de l'OSCE pour
2012 si jamais des fonds étaient alloués à la création d'un tel
mécanisme d'enquête.
L'Arménie, elle, a toujours soutenu ces Mesures de confiance et de
sécurité (MDCS). Nous considérons qu'elles permettront de créer des
conditions favorables aux négociations. L'Azerbaïdjan soutient le
point de vue inverse et n'envisage la mise en place de ces mesures
qu'après que des progrès auront été réalisés dans le processus de
règlement. Cela n'a guère de sens, car il est évident que si nous
parvenions à une solution, ces mesures de confiance seraient moins
nécessaires. Il est tout aussi évident que, sans confiance entre les
parties, aucune solution n'est possible.
Arménophobie en Azerbaïdjan
Bakou encourage ouvertement la xénophobie et attise la haine contre
les Arméniens. Le président Aliev est même allé jusqu'à désigner les
Arméniens du monde entier comme les > de
l'Azerbaïdjan.
Ce sentiment anti-arménien a connu son apogée avec l'affaire Safarov.
En 2004, ce jeune militaire azerbaïdjanais qui participait à une
formation de l'Otan en Hongrie attaque dans son sommeil un autre
militaire et le tue à coups de hache au seul motif qu'il est arménien.
Condamné en Hongrie où il purge sa peine, il est finalement extradé en
2012. Aussitôt rentré chez lui, au lieu d'être incarcéré, il est
gracié et couvert d'honneurs. Les dirigeants azerbaïdjanais font de
lui un symbole de la fierté nationale et un exemple à suivre pour les
jeunes générations, s'attirant ainsi la réprobation du monde entier.
Le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe s'est
montré très clair : .
Malgré ces mises en garde, les autorités de Bakou ont continué Ã
affirmer que ce qu'elles avaient fait > et
ont fustigé en retour l'attitude de la communauté internationale.
Quand, à Vienne en novembre 2013, grce aux efforts des co-présidents,
la réunion de haut niveau entre les présidents de l'Arménie et de
l'Azerbaïdjan a repris après la fameuse affaire Safarov, on a cru que
les négociations pourraient aller de l'avant. Une nouvelle fois, ces
attentes furent déçues, l'Azerbaïdjan s'ingéniant à déstabiliser la
situation dans la zone du conflit.
La partie azerbaïdjanaise a mené plusieurs incursions qui ont fait de
nombreuses victimes, augmentant considérablement la tension sur le
terrain. Un villageois arménien qui s'était égaré par erreur en
territoire azerbaïdjanais a été arrêté, humilié devant les caméras de
télévision - une tactique qu'affectionnent les organisations
terroristes -, avant d'être exécuté le lendemain.
En Azerbaïdjan, des journalistes, des militants de la société civile,
des représentants de l'élite intellectuelle sont persécutés en tant
qu'> ou > pour la seule et
unique raison qu'ils appellent à la paix et à la réconciliation.
L'écrivain Akram Aylisli a ainsi été pris pour cible parce qu'il avait
publié un roman (7) dans lequel il faisait allusion aux pogroms
anti-arméniens de Bakou et Soumgait. Ses livres ont été brûlés sur la
place publique et lui-même a dû quitter le pays pour échapper à des
menaces de mort.
L'arménophobie est devenue une constante du discours politique. Les
plus courageux qui se dressent contre la ligne officielle
disparaissent rapidement de la scène. La manipulation de l'Histoire et
la propagande ont atteint un point tel que l'Arménie, et même Erevan,
ville pourtant plusieurs fois millénaire, est présentée comme un
ancien territoire azerbaïdjanais.
À une époque où la protection et la promotion des droits de l'homme
sont considérées comme des principes fondamentaux, l'intolérance
envers les valeurs des civilisations étrangères, les dégradations du
patrimoine culturel et religieux, voire son anéantissement
systématique, doivent être condamnés avec la même fermeté et la même
détermination que la violence exercée contre les peuples.
La destruction systématique des chefs-d'oeuvre de l'architecture
arménienne et des sites sacrés, notamment le saccage entre 1998 et
2005, au Nakhitchevan (8), de milliers de croix de pierre délicatement
sculptées par les maîtres arméniens entre le IXe et le XVIe siècle
relève à l'évidence de cette catégorie de crimes.
Des milliers de ces sculptures médiévales géantes ont été rasées sous
les yeux attentifs des autorités azerbaïdjanaises avant que la zone ne
soit transformée en terrain militaire. Un acte de vandalisme
sévèrement condamné par le Conseil international des monuments et des
sites (ICOMOS) lors de sa 16e assemblée générale : , Druzhba Narodov, 2012.
(8) - Stephen Castle, >,
The Independent, 30 mai 2006 ;
Sarah Pickman, >, archaeology.org, 30 juin 2006 ;
>, RFE/RL,
22 avril 2011.
dimanche 8 février 2015,
Ara (c)armenews.com
http://www.armenews.com/article.php3?id_article=107891