TURQUIE : UNE POLITIQUE ETRANGERE EN ZIGZAG
REVUE DE PRESSE
Les "puissances sunnites" [Turquie, Arabie Saoudite, Qatar,
Egypte,...], comme elles aiment a se presenter, n'ont pas reussi
a s'adapter aux changements politiques au Moyen-Orient. Le Qatar
[accuse de financer les islamistes] et la Turquie [dirigee par un
parti islamiste modere] ont resiste jusqu'au bout aux changements.
Ces pays se retrouvent desormais "interventionnistes malgre eux"
[le Parlement turc a vote le 2 octobre pour l'intervention militaire
contre l'Etat islamique (EI)] : le Qatar participe aux operations
militaires contre l'EI, et le president turc declare que "la Turquie
fera tout ce qui est necessaire pour lutter contre l'EI".
Inutile de rappeler que jadis leur position se limitait a s'opposer
a une intervention occidentale contre les islamistes. La Turquie
et les pays sunnites reclamaient a grands cris l'intervention de
l'Occident contre le regime syrien de Bachar El-Assad. Et puis les
choses ont commence a changer quand le "printemps arabe" a tourne
court et que la montee du fondamentalisme sunnite a tue les espoirs
d'une transition democratique.
Le Moyen-Orient etait devenu le terrain de predilection des tenants
d'un pretendu "islamisme modere" [comme la Turquie] cense assurer la
stabilite en remplacant les regimes autoritaires. Or ce fut un echec
retentissant non seulement en termes de gouvernance, mais aussi de
gestion des extremistes religieux. Pendant ce temps, ces "allies
sunnites de l'Occident" surestimaient leur rôle et preferaient agir
en sous-main pour conquerir l'hegemonie regionale.
La Turquie a ete la première a s'obstiner a entretenir des relations
douteuses avec des groupes armes [islamistes] en Irak et en Syrie dans
le but d'assouvir ses ambitions au Moyen-Orient. Elle avait peur de
perdre son emprise dans la region (une emprise qui relevait pourtant
davantage du fantasme). Après l'effondrement de sa politique en Syrie,
le gouvernement turc a reporte son attention sur les "espaces sunnites"
en Syrie et en Irak [où règnent les groupes islamistes].
C'est d'ailleurs pour cette raison qu'au depart l'Etat islamique etait
considere par Ankara comme une expression "de la colère des sunnites
et de la resistance contre les politiques discriminantes" de l'ancien
Premier ministre irakien [chiite] Nouri Al-Maliki. Pour faire court,
la Turquie n'a jamais cesse de rever de dominer le Moyen-Orient avec sa
"politique sunnite" et elle attendait beaucoup des liens entretenus
avec les Turkmènes sunnites, les radicaux sunnites et les Kurdes
conservateurs ou islamistes. Malheureusement, ses espoirs ont ete
decus et Ankara a fini par s'allier avec les "interventionnistes
occidentaux". Il incombe maintenant au president turc et a son
gouvernement de se debrouiller pour presenter la nouvelle position
de la Turquie.
Après tout, c'est la un problème que l'on retrouve plus generalement
dans les pays musulmans, qui imposent chez eux un discours islamiste et
"toutes sortes de theories du complot antioccidental", tout en etant
des allies pragmatiques des puissances de l'Ouest. Depuis une dizaine
d'annees, c'est egalement le cas de la Turquie, avec son gouvernement
"conservateur", devenu bel et bien "islamiste". Le veritable problème,
pour les pays musulmans (et d'ailleurs recemment encore pour les
puissances occidentales), c'est qu'ils s'appuient sur des politiques
et des alliances pragmatiques qui n'ont en fin de compte abouti qu'a
une hypocrisie absolue, et a l'echec.
Nuray Mert
Publie le 2 octobre 2014 dans Hurriyet Daily News Istanbul
mercredi 14 janvier 2015, Stephane (c)armenews.com
http://www.armenews.com/article.php3?id_article=106712
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
REVUE DE PRESSE
Les "puissances sunnites" [Turquie, Arabie Saoudite, Qatar,
Egypte,...], comme elles aiment a se presenter, n'ont pas reussi
a s'adapter aux changements politiques au Moyen-Orient. Le Qatar
[accuse de financer les islamistes] et la Turquie [dirigee par un
parti islamiste modere] ont resiste jusqu'au bout aux changements.
Ces pays se retrouvent desormais "interventionnistes malgre eux"
[le Parlement turc a vote le 2 octobre pour l'intervention militaire
contre l'Etat islamique (EI)] : le Qatar participe aux operations
militaires contre l'EI, et le president turc declare que "la Turquie
fera tout ce qui est necessaire pour lutter contre l'EI".
Inutile de rappeler que jadis leur position se limitait a s'opposer
a une intervention occidentale contre les islamistes. La Turquie
et les pays sunnites reclamaient a grands cris l'intervention de
l'Occident contre le regime syrien de Bachar El-Assad. Et puis les
choses ont commence a changer quand le "printemps arabe" a tourne
court et que la montee du fondamentalisme sunnite a tue les espoirs
d'une transition democratique.
Le Moyen-Orient etait devenu le terrain de predilection des tenants
d'un pretendu "islamisme modere" [comme la Turquie] cense assurer la
stabilite en remplacant les regimes autoritaires. Or ce fut un echec
retentissant non seulement en termes de gouvernance, mais aussi de
gestion des extremistes religieux. Pendant ce temps, ces "allies
sunnites de l'Occident" surestimaient leur rôle et preferaient agir
en sous-main pour conquerir l'hegemonie regionale.
La Turquie a ete la première a s'obstiner a entretenir des relations
douteuses avec des groupes armes [islamistes] en Irak et en Syrie dans
le but d'assouvir ses ambitions au Moyen-Orient. Elle avait peur de
perdre son emprise dans la region (une emprise qui relevait pourtant
davantage du fantasme). Après l'effondrement de sa politique en Syrie,
le gouvernement turc a reporte son attention sur les "espaces sunnites"
en Syrie et en Irak [où règnent les groupes islamistes].
C'est d'ailleurs pour cette raison qu'au depart l'Etat islamique etait
considere par Ankara comme une expression "de la colère des sunnites
et de la resistance contre les politiques discriminantes" de l'ancien
Premier ministre irakien [chiite] Nouri Al-Maliki. Pour faire court,
la Turquie n'a jamais cesse de rever de dominer le Moyen-Orient avec sa
"politique sunnite" et elle attendait beaucoup des liens entretenus
avec les Turkmènes sunnites, les radicaux sunnites et les Kurdes
conservateurs ou islamistes. Malheureusement, ses espoirs ont ete
decus et Ankara a fini par s'allier avec les "interventionnistes
occidentaux". Il incombe maintenant au president turc et a son
gouvernement de se debrouiller pour presenter la nouvelle position
de la Turquie.
Après tout, c'est la un problème que l'on retrouve plus generalement
dans les pays musulmans, qui imposent chez eux un discours islamiste et
"toutes sortes de theories du complot antioccidental", tout en etant
des allies pragmatiques des puissances de l'Ouest. Depuis une dizaine
d'annees, c'est egalement le cas de la Turquie, avec son gouvernement
"conservateur", devenu bel et bien "islamiste". Le veritable problème,
pour les pays musulmans (et d'ailleurs recemment encore pour les
puissances occidentales), c'est qu'ils s'appuient sur des politiques
et des alliances pragmatiques qui n'ont en fin de compte abouti qu'a
une hypocrisie absolue, et a l'echec.
Nuray Mert
Publie le 2 octobre 2014 dans Hurriyet Daily News Istanbul
mercredi 14 janvier 2015, Stephane (c)armenews.com
http://www.armenews.com/article.php3?id_article=106712
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress