Le Vif/L'Express
13 Mars 2015
LES CHRÉTIENS ASSYRIENS, ÉTERNELS PERSÉCUTÉS
de Gérald Papy
Alors que l'on s'apprête à commémorer, le 24 avril, le centième
anniversaire du génocide arménien sous l'empire ottoman, l'existence
même d'un peuple de chrétiens d'Orient est aujourd'hui menacée. Les
Assyro-Chaldéens peinent encore à faire reconnaître le martyre qu'ils
vécurent aux côtés de leurs frères arméniens en 1915 sous la
répression du gouvernement des Jeunes-Turcs. Trop de douleurs et de
divisions, trop peu de relais auprès des grandes nations ont entravé
leur juste aspiration. C'est dans ce contexte que, depuis 2014, un
autre djihad a été lancé à leur encontre par le groupe terroriste Etat
islamique. Les uns ont été chassés de leurs terres, les autres réduits
en esclavage. Leurs églises ont été saccagées et, depuis quelques
semaines, leur patrimoine historique est réduit en poussière du Musée
archéologique de Mossoul aux cités de Nimroud et de Khorsabad.
S'indigner de ces destructions n'est pas un caprice d'élite
occidentale qui apparaîtrait incongru au regard des pertes humaines,
c'est le cri d'alarme d'un peuple peu à peu dépossédé de son me et de
ses racines. L'Etat islamique, on le sait, ne limite pas sa vindicte
destructrice aux seuls chrétiens : yézidis, musulmans chiites sont
autant, ou davantage, les cibles de son intolérance. Mais le saccage
de ces vestiges ou leur dilapidation à travers de lucratifs trafics
démontre indéniablement une volonté délibérée de rayer de la région
toute trace de civilisation pré-islamique, et donc chrétienne. En
décapitant des otages occidentaux ou des soldats syriens, en immolant
par le feu un pilote jordanien, en éradiquant un patrimoine
non-islamique, Abou Bakr al-Baghdadi s'attache à répandre un message
unique, synthétisé par le philosophe Antoine Courban : ' Je suis le
pouvoir. Je suis tout. '
Tel est bien le projet totalitaire auquel le monde est confronté en
Syrie et en Irak. Et s'il est sans doute prématuré de qualifier de
génocide les persécutions dont sont victimes les chrétiens assyriens,
l'inquiétude est telle que leurs représentants, longtemps rétifs Ã
prendre les armes, réclament aujourd'hui du matériel militaire et une
formation pour leurs ' unités de protection '. La requête est légitime
et répond à la doctrine des Occidentaux dans leur combat contre l'Etat
islamique : un soutien aérien, le refus d'un engagement au sol et une
délégation du combat terrestre aux forces locales, armée irakienne,
forces kurdes, ' bons ' rebelles syriens... Le pari de la
sous-traitance nécessiterait effectivement une assistance militaire
ciblée à la mesure des enjeux alors qu'elle n'a été que partiellement
mise en oeuvre jusqu'à présent. Mais il n'est pas sans risque quand
rivalisent du même côté du champ de bataille l'armée de Bagdad, les
milices chiites, le Hezbollah libanais, les Gardiens de la révolution
iraniens, les peshmergas kurdes, les aviations des monarchies du Golfe
et de Jordanie...
Certes, la solution au drame des chrétiens assyriens est loin d'aller
de soi. Mais le silence face à leur détresse serait incompréhensible.
Or, les puissances occidentales semblent à nouveau entravées dans leur
volonté de soutien par la crainte fantasmagorique d'une accusation de
nouvelle croisade ou de néocolonialisme. C'est pourtant au nom de la
protection universelle des droits de l'homme et du respect des
minorités, quelles qu'elles soient, que l'aide aux Assyriens d'Irak
s'impose.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
13 Mars 2015
LES CHRÉTIENS ASSYRIENS, ÉTERNELS PERSÉCUTÉS
de Gérald Papy
Alors que l'on s'apprête à commémorer, le 24 avril, le centième
anniversaire du génocide arménien sous l'empire ottoman, l'existence
même d'un peuple de chrétiens d'Orient est aujourd'hui menacée. Les
Assyro-Chaldéens peinent encore à faire reconnaître le martyre qu'ils
vécurent aux côtés de leurs frères arméniens en 1915 sous la
répression du gouvernement des Jeunes-Turcs. Trop de douleurs et de
divisions, trop peu de relais auprès des grandes nations ont entravé
leur juste aspiration. C'est dans ce contexte que, depuis 2014, un
autre djihad a été lancé à leur encontre par le groupe terroriste Etat
islamique. Les uns ont été chassés de leurs terres, les autres réduits
en esclavage. Leurs églises ont été saccagées et, depuis quelques
semaines, leur patrimoine historique est réduit en poussière du Musée
archéologique de Mossoul aux cités de Nimroud et de Khorsabad.
S'indigner de ces destructions n'est pas un caprice d'élite
occidentale qui apparaîtrait incongru au regard des pertes humaines,
c'est le cri d'alarme d'un peuple peu à peu dépossédé de son me et de
ses racines. L'Etat islamique, on le sait, ne limite pas sa vindicte
destructrice aux seuls chrétiens : yézidis, musulmans chiites sont
autant, ou davantage, les cibles de son intolérance. Mais le saccage
de ces vestiges ou leur dilapidation à travers de lucratifs trafics
démontre indéniablement une volonté délibérée de rayer de la région
toute trace de civilisation pré-islamique, et donc chrétienne. En
décapitant des otages occidentaux ou des soldats syriens, en immolant
par le feu un pilote jordanien, en éradiquant un patrimoine
non-islamique, Abou Bakr al-Baghdadi s'attache à répandre un message
unique, synthétisé par le philosophe Antoine Courban : ' Je suis le
pouvoir. Je suis tout. '
Tel est bien le projet totalitaire auquel le monde est confronté en
Syrie et en Irak. Et s'il est sans doute prématuré de qualifier de
génocide les persécutions dont sont victimes les chrétiens assyriens,
l'inquiétude est telle que leurs représentants, longtemps rétifs Ã
prendre les armes, réclament aujourd'hui du matériel militaire et une
formation pour leurs ' unités de protection '. La requête est légitime
et répond à la doctrine des Occidentaux dans leur combat contre l'Etat
islamique : un soutien aérien, le refus d'un engagement au sol et une
délégation du combat terrestre aux forces locales, armée irakienne,
forces kurdes, ' bons ' rebelles syriens... Le pari de la
sous-traitance nécessiterait effectivement une assistance militaire
ciblée à la mesure des enjeux alors qu'elle n'a été que partiellement
mise en oeuvre jusqu'à présent. Mais il n'est pas sans risque quand
rivalisent du même côté du champ de bataille l'armée de Bagdad, les
milices chiites, le Hezbollah libanais, les Gardiens de la révolution
iraniens, les peshmergas kurdes, les aviations des monarchies du Golfe
et de Jordanie...
Certes, la solution au drame des chrétiens assyriens est loin d'aller
de soi. Mais le silence face à leur détresse serait incompréhensible.
Or, les puissances occidentales semblent à nouveau entravées dans leur
volonté de soutien par la crainte fantasmagorique d'une accusation de
nouvelle croisade ou de néocolonialisme. C'est pourtant au nom de la
protection universelle des droits de l'homme et du respect des
minorités, quelles qu'elles soient, que l'aide aux Assyriens d'Irak
s'impose.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress