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Le Coeur Brise Des Heros Antiques

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    LE COEUR BRISE DES HEROS ANTIQUES

    Les Echos
    29 mai 2008 jeudi
    France

    Le mythe d'Ulysse revisite dans une belle douleur tendre.

    Avec Catherine Schaub-Abkarian, John Arnold, Simon Abkarian, Georges
    Bigot.

    Plus grand monde n'ose etre lyrique aujourd'hui. Peu d'ecrivains de
    theâtre ne se risquent a ecrire ainsi : " Lune, retiens ta course,
    apaise les marees, ces putes echaudees qui vont et viennent sur le
    ventre du monde. " Simon Abkarian, dont la pièce " Penelope, ô Penelope
    " brasse un ocean de metaphores, tourne le dos aux modes et semble
    mediter dans un monde où l'Antiquite, l'Orient eternel et l'Orient
    d'aujourd'hui sont dans la meme echelle du temps. On le connaît comme
    acteur : il a ete l'un des grands interprètes du Theâtre du Soleil
    d'Ariane Mnouchkine et de pas mal de films. Il concoit ses propres
    spectacles depuis une dizaine d'annees mais il n'etait jamais exprime
    de facon aussi personnelle, n'avait jamais autant devoile ses dons
    de poète de la scène.

    Il reprend le thème de " L'Odyssee ", la solitude de Penelope,
    la violence des guerriers, le retour d'Ulysse. Mais il prend ses
    distances, change certains noms (Ulysse est devenu Elias), fait
    apparaître la mère d'Ulysse, le dieu Antee devenu boucher, une
    personnification de la Conscience...

    Spectacle heteroclite

    Où sommes-nous ? Quelque part, dans le bassin mediterraneen,
    au bord de la mer, mais aussi sur un champ de bataille, dans le
    domicile d'un simple, femme, dans le debarras d'une maison grecque,
    libanaise ou armenienne. Au tout debut, Penelope gemit de tristesse et
    d'insatisfaction sexuelle. Tout ne sera ensuite que plaintes doucement
    proferees ou tues tandis que le passe douloureux et les cris de la
    guerre tentent d'imposer leur concert. Simon Abkarian est lui-meme
    Ulysse, ou plutôt Elias, un homme defait par la guerre et qui n'ose
    plus croire a l'amour, avec une etonnante intensite douce. Catherine
    Schaub-Abkarian est une grande tragedienne. Georges Bigot, travesti
    en vieille femme fantomatique, est magnifique. John Arnold est coupant
    comme une lame. Sarajeanne Drillaud parvient a etre reelle et irreelle.

    Pourquoi ce spectacle heteroclite, comme bricole, nous emeut-il
    tant ? Parce qu'en arrière-plan, une confession intime nous est
    faite. Abkarian se souvient de sa mère et de son Armenie, dans la
    pudeur du secret et la flamboyance du verbe.

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