LES ARMENIENS ONT BESOIN DE JUSTICE, NON DE TOLERANCE PAR ALIN OZINIAN
Stephane
armenews.com
vendredi 13 avril 2012
La proposition de loi qui penalise la negation du "genocide reconnu"
adoptee la semaine passee par le parlement francais continue de
retenir l'attention et de provoquer la colère en Turquie.
A l'exception d'un petit groupe de gens raisonnables, presque tous
pensent que la proposition de loi francaise devrait en realite freiner
les progrès vers la verite de ce qui s'est passe entre 1915 et 1917.
Malheureusement, on ne voit pas pourquoi la France voudrait contribuer
a la deterioration des relations entre la Turquie et l'Armenie. Est-il
raisonnable de penser qu'une decision du Parlement francais concernant
le peuple francais pourrait avoir un impact sur la liberte d'expression
dans un autre pays ?
Ce serait avant tout aux citoyens francais de soulever des objections
a la proposition de loi, et s'ils y sont favorables, alors on ne peut
rien y faire. Qu'on le veuille ou non, le fondement principal de la
democratie est la suprematie du point de vue de la majorite. Meme
si c'est difficile a comprendre dans un pays comme le nôtre, où
la France a ete adoptee comme le modèle d'etat-nation sous Mustafa
Kemal, et où les principes suivis, pour l'etat et de la democratie,
sont ceux du Comite Union et Progrès (CUP), la democratie, c'est le
pouvoir du peuple de demander ce dont il a besoin. C'est different du
pouvoir du dictat d'un groupe elitiste auquel nous avons ete habitues.
Je pense que meme un homme politique en Turquie peut comprendre ce
que la France essaie de faire. Tout le monde sait que l'adoption de la
proposition de loi resulte de la perspective des elections francaises
et que cette initiative est celle du president Sarkozy pour reunir
contre le Socialistes le plus grand soutien de l'electorat. En outre,
le titre officiel de la proposition de loi n'est pas la proposition
de la negation du Genocide Armenien, c'est la negation de tous les cas
de genocide reconnus par la loi francaise qu'il est prevu de reprouver.
Ce qui inquiète le plus la Turquie, c'est le Genocide Armenien dont
la discussion c'est intensifiee a cette occasion. Tandis que les
media turc auraient dû considerer cette initiative francaise comme
superflue et inutile, comme quelque chose pouvant etre ignoree, meme
les journalistes sportifs se sont intensement focalises sur ce sujet.
Etait-il si difficile de publier commentaires et opinions sur la
proposition adoptee en France sans recourir a un discours de haine et
de discrimination ethnique ? J'ai beaucoup reflechi a cette question,
lisant des douzaines d'articles chaque jour. Les Francais y etaient
accuses d'hypocrisie et de malhonnetete. Il n'etait pas necessaire
cependant d'insulter l'ensemble de la nation francaise parce que
la majorite des Francais n'est probablement meme pas au courant de
cette proposition de loi. De grand efforts ont ete deployes pour en
venir a declarer que le père de Sarkozy etait d'origine hongroise. Des
considerations ethniques on ete faites, dans lesquelles on insistait
sur le fait que Valerie Boyer, qui a prepare la proposition de loi,
descendait d'une famille algerienne. Certains se sont meme demande
les raisons pour lesquelles une Algerienne pourrait faire une chose
pareille, alors que les gens considèrent aujourd'hui plus les positions
politiques des personnes plutôt que leur origine ethnique.
Questions-cliche au Patriarcat Armenien
Nos "intellectuels", qui ont accuse la France de prendre des mesures
antidemocratiques, ont rappele en le citant dans leurs critiques aux
francais qu'ils descendent de Voltaire, et en reprenant souvent leurs
cliches, tels "allegations armeniennes", "mensonges armeniens" et
"complot armenien". Ils ont meme insulte un groupe ethnique important
qui ne soutient nullement Sarkozy en France. Malheureusement,
Hrant Dink, qui a ete abattu en partie a cause de campagnes et de
provocations de ce genre, n'est plus parmi nous. Il manque aux media
turcs un homme courageux qui, en depit de ses origines armeniennes,
s'opposerait a de telles initiatives, pour le plus grand bien de la
lutte pour la democratie ; et de ce fait, les media se sont rabattus
sur quelques questions, toujours les memes, posees au Patriarcat
Armenien. Dans des declarations plates et timides, les ecclesiastiques
armeniens ont evoque les incidents de 1915, suggerant que c'etaient des
temps douloureux, et aussi concluant leur declarations en disant : "Il
n'y a aucun problème entre nous ; recemment, nous avons pris ensemble
notre Noah Pudding [pâtisserie turque symbolisant les liens entre le
Createur et les hommes, ndt] ; personne ne doit se mettre entre nous
". C'etaient des propos gentils. Ils se sont efforces d'apaiser la
reaction de certains cercles avec leurs titres : comme par exemple,
"La Patriarcat donne une claque a la France".
Au-dela des reactions de gens ordinaires et des representants des media
qui ignorent en general toute règle ethique, il est quelquefois encore
plus difficile de comprendre les reponses des figures politiques. La
Turquie, notant que la France n'est plus impartiale, est intervenue
au sein de l'Organisation pour la Securite et la Cooperation en
Europe (OSCE), pour obtenir que ce pays se retire du groupe de
Minsk. Selon elle la France devrait immediatement se retirer des
actions de mediation et des efforts faits sous les auspices du Groupe
de Minsk, constitue pour resoudre le conflit entre l'Azerbaïdjan et
l'Armenie, parce qu'elle a pris des positions qui ruinent sa position
impartiale et neutre. La Turquie fait partie du Groupe de Minsk,
et elle a tenu fermee la frontière avec l'Armenie pendant vingt ans
du fait du problème du Karabagh. Elle impose en outre un embargo sur
l'Armenie, mais en depit de cela, elle se considère elle-meme comme
etant impartiale.
Les remarques du premier ministre Erdogan d'annuler les reunions de
defense et economiques auraient pu etre prises en consideration par
les Francais, mais en meme temps, la Turquie ayant offert d'engager
une discussion ouverte basee sur les archives, les remarques selon
lesquelles "il n'y a pas de genocide dans mon histoire" peuvent ne pas
etre credibles a ceux qui ont sur la question une approche impartiale.
Lorsque j'ai entendu ces remarques pour la première fois, je me suis
souvenu du cycle de conferences "Discussions sur les relations entre
Turquie et Armenie", dans une universite du sud-ouest, organise par
la Fondation Turque d'Etudes Sociales et Economiques (TESEV) le mois
precedent. Dans le cadre de cette initiative, les experts voyageaient
dans un certain nombre de villes pour y faire des exposes et repondre
aux questions des etudiants. Les etudiants ont pose des questions
prometteuses a la plus recente des reunions auxquelles j'ai assiste.
Il etait très difficile de croire que c'etaient les memes etudiants
qui avaient assiste au cycle a son debut. L'un des professeurs
qui sont intervenus au cours de la conference dit : "Nous sommes
prets a faire des recherches sur le genocide armenien allegue, nos
archives sont ouvertes, et nos historiens sont prets". Pendant une
demi-heure, il a egalement mentionne les methodes a suivre pour la
recherche du genocide et il a finit en disant qu'il s'agissait d'un
genocide allegue. Cela m'est venu a l'esprit lorsque j'ai entendu
le premier ministre. Etant donne que nous ferons de la recherche
et que nous voulons la verite, pourquoi notre opinion sur ce point
n'a-t-elle pas change ? Comment pourrez-vous faire une recherche sur
quelque chose qui est qualifie d' "allegue" ? Pourquoi quelles raison
quelqu'un qui dit que ses ancetres n'ont pas fait une pareille chose
creerait-t-il une commission d'historiens ? Cela signifie que nous
ferons cette recherche pour trouver ce que l'on veut en realite,
pas pour la verite. C'est aussi simple que cela.
Etre "tolerant"
L'un des professeurs de la meme universite, au cours d'un dîner suivant
la conference, m'a dit d'eux qu'ils sont tolerants, capables de boire
de l'alcool, et que contrairement a "eux", ils n'etaient pas des
integristes, je pensai qu'il etait veritablement triste d'attribuer
la consommation d'alcool et d'autres habitudes banales a l'adoption
d'un mode de vie moderne, et a la liberte de conscience ; mais les
remarques d'un membre que me fit une autre universite etaient encore
plus tristes. Il parla de tolerance, me disant qu'ils avaient meme
un professeur armenien dans leur departement, et qu'il n'y avait pas
de discrimination parmi eux. Il se comportait comme s'il meritait
une medaille simplement parce qu'ils avaient engage un membre de la
communaute armenienne lie a la Turquie par la citoyennete depuis les
temps de l'empire ottoman. Il est triste que le autorites politiques
soient tout juste courageux pour etre tolerantes envers la liberte de
parole. Elles s'enorgueillissent d'etre les descendants d'une nation
tolerante envers les Chretiens, les Armeniens, les Kurdes et les
homosexuels, mais ils ne se rendent pas compte que ce n'est qu'une
reaction a un complexe d'inferiorite. Elles mettent la nationalite
turque au-dessus de tout et se disent etre tolerante envers toutes
les autres ; ce dont nous avons besoin cependant, c'est un discours
d'egalite et de justice.
Nous nous plaignons que la proposition de loi francaise restreint la
liberte de parole, soutenant que l'histoire devrait etre laissee aux
historiens. Malheureusement, la politique se nourrit d'un certain
nombre d'autres sciences ; de telles mesures doivent etre prises en
consideration en politique etrangère et interieure. Il faudrait etre
naïf pour en etre surpris. Certains cercles devraient se rejouir de
ce qui se passe en Turquie ; les remarques sur Dersim pourraient
soulever des espoirs meme si l'on peut penser que cela repose sur
des considerations politiciennes.
La proposition de loi francaise va plus loin que la reconnaissance
d'un genocide ; elle en penalise la negation. Et c'est un projet que
les partisans de la liberte pourraient soutenir en lui donnant force
de loi. Mais qui, en termes ethiques, pourrait accepter la negation ?
En Turquie, la politique continuelle de negation ne se limite
pas a interdire l'ouverture et a empecher que les douleurs passees
soient evoquees. L'effet le plus visible de cette negation, c'est le
climat que l'assassinat de Hrant Dink a cree, et les criminels que
ce climat n'a pas permis de decouvrir. La France utilise l'histoire
a des fins politiques, mais que fait la Turquie ? Au lieu d'ecouter
la voix de la conscience pour resoudre une question qui pourrait
elever les emotions des Armeniens et des Turcs et etre utilisee par
suite ailleurs pour des raisons politiques, elle discute la decision
de parlements etrangers. Et la Turquie ne prend aucune mesure pour
identifier les assassins de Dink, l'homme qui aurait pu defier la
France par la raison et par le c~\ur, plutôt que par le Noah's Pudding.
*Alin Ozinian est une analyste independante.
http://www.todayszaman.com/news-267340-armenians-expect-justice-not-tolerance-by-alin-ozinian*.html
From: A. Papazian
Stephane
armenews.com
vendredi 13 avril 2012
La proposition de loi qui penalise la negation du "genocide reconnu"
adoptee la semaine passee par le parlement francais continue de
retenir l'attention et de provoquer la colère en Turquie.
A l'exception d'un petit groupe de gens raisonnables, presque tous
pensent que la proposition de loi francaise devrait en realite freiner
les progrès vers la verite de ce qui s'est passe entre 1915 et 1917.
Malheureusement, on ne voit pas pourquoi la France voudrait contribuer
a la deterioration des relations entre la Turquie et l'Armenie. Est-il
raisonnable de penser qu'une decision du Parlement francais concernant
le peuple francais pourrait avoir un impact sur la liberte d'expression
dans un autre pays ?
Ce serait avant tout aux citoyens francais de soulever des objections
a la proposition de loi, et s'ils y sont favorables, alors on ne peut
rien y faire. Qu'on le veuille ou non, le fondement principal de la
democratie est la suprematie du point de vue de la majorite. Meme
si c'est difficile a comprendre dans un pays comme le nôtre, où
la France a ete adoptee comme le modèle d'etat-nation sous Mustafa
Kemal, et où les principes suivis, pour l'etat et de la democratie,
sont ceux du Comite Union et Progrès (CUP), la democratie, c'est le
pouvoir du peuple de demander ce dont il a besoin. C'est different du
pouvoir du dictat d'un groupe elitiste auquel nous avons ete habitues.
Je pense que meme un homme politique en Turquie peut comprendre ce
que la France essaie de faire. Tout le monde sait que l'adoption de la
proposition de loi resulte de la perspective des elections francaises
et que cette initiative est celle du president Sarkozy pour reunir
contre le Socialistes le plus grand soutien de l'electorat. En outre,
le titre officiel de la proposition de loi n'est pas la proposition
de la negation du Genocide Armenien, c'est la negation de tous les cas
de genocide reconnus par la loi francaise qu'il est prevu de reprouver.
Ce qui inquiète le plus la Turquie, c'est le Genocide Armenien dont
la discussion c'est intensifiee a cette occasion. Tandis que les
media turc auraient dû considerer cette initiative francaise comme
superflue et inutile, comme quelque chose pouvant etre ignoree, meme
les journalistes sportifs se sont intensement focalises sur ce sujet.
Etait-il si difficile de publier commentaires et opinions sur la
proposition adoptee en France sans recourir a un discours de haine et
de discrimination ethnique ? J'ai beaucoup reflechi a cette question,
lisant des douzaines d'articles chaque jour. Les Francais y etaient
accuses d'hypocrisie et de malhonnetete. Il n'etait pas necessaire
cependant d'insulter l'ensemble de la nation francaise parce que
la majorite des Francais n'est probablement meme pas au courant de
cette proposition de loi. De grand efforts ont ete deployes pour en
venir a declarer que le père de Sarkozy etait d'origine hongroise. Des
considerations ethniques on ete faites, dans lesquelles on insistait
sur le fait que Valerie Boyer, qui a prepare la proposition de loi,
descendait d'une famille algerienne. Certains se sont meme demande
les raisons pour lesquelles une Algerienne pourrait faire une chose
pareille, alors que les gens considèrent aujourd'hui plus les positions
politiques des personnes plutôt que leur origine ethnique.
Questions-cliche au Patriarcat Armenien
Nos "intellectuels", qui ont accuse la France de prendre des mesures
antidemocratiques, ont rappele en le citant dans leurs critiques aux
francais qu'ils descendent de Voltaire, et en reprenant souvent leurs
cliches, tels "allegations armeniennes", "mensonges armeniens" et
"complot armenien". Ils ont meme insulte un groupe ethnique important
qui ne soutient nullement Sarkozy en France. Malheureusement,
Hrant Dink, qui a ete abattu en partie a cause de campagnes et de
provocations de ce genre, n'est plus parmi nous. Il manque aux media
turcs un homme courageux qui, en depit de ses origines armeniennes,
s'opposerait a de telles initiatives, pour le plus grand bien de la
lutte pour la democratie ; et de ce fait, les media se sont rabattus
sur quelques questions, toujours les memes, posees au Patriarcat
Armenien. Dans des declarations plates et timides, les ecclesiastiques
armeniens ont evoque les incidents de 1915, suggerant que c'etaient des
temps douloureux, et aussi concluant leur declarations en disant : "Il
n'y a aucun problème entre nous ; recemment, nous avons pris ensemble
notre Noah Pudding [pâtisserie turque symbolisant les liens entre le
Createur et les hommes, ndt] ; personne ne doit se mettre entre nous
". C'etaient des propos gentils. Ils se sont efforces d'apaiser la
reaction de certains cercles avec leurs titres : comme par exemple,
"La Patriarcat donne une claque a la France".
Au-dela des reactions de gens ordinaires et des representants des media
qui ignorent en general toute règle ethique, il est quelquefois encore
plus difficile de comprendre les reponses des figures politiques. La
Turquie, notant que la France n'est plus impartiale, est intervenue
au sein de l'Organisation pour la Securite et la Cooperation en
Europe (OSCE), pour obtenir que ce pays se retire du groupe de
Minsk. Selon elle la France devrait immediatement se retirer des
actions de mediation et des efforts faits sous les auspices du Groupe
de Minsk, constitue pour resoudre le conflit entre l'Azerbaïdjan et
l'Armenie, parce qu'elle a pris des positions qui ruinent sa position
impartiale et neutre. La Turquie fait partie du Groupe de Minsk,
et elle a tenu fermee la frontière avec l'Armenie pendant vingt ans
du fait du problème du Karabagh. Elle impose en outre un embargo sur
l'Armenie, mais en depit de cela, elle se considère elle-meme comme
etant impartiale.
Les remarques du premier ministre Erdogan d'annuler les reunions de
defense et economiques auraient pu etre prises en consideration par
les Francais, mais en meme temps, la Turquie ayant offert d'engager
une discussion ouverte basee sur les archives, les remarques selon
lesquelles "il n'y a pas de genocide dans mon histoire" peuvent ne pas
etre credibles a ceux qui ont sur la question une approche impartiale.
Lorsque j'ai entendu ces remarques pour la première fois, je me suis
souvenu du cycle de conferences "Discussions sur les relations entre
Turquie et Armenie", dans une universite du sud-ouest, organise par
la Fondation Turque d'Etudes Sociales et Economiques (TESEV) le mois
precedent. Dans le cadre de cette initiative, les experts voyageaient
dans un certain nombre de villes pour y faire des exposes et repondre
aux questions des etudiants. Les etudiants ont pose des questions
prometteuses a la plus recente des reunions auxquelles j'ai assiste.
Il etait très difficile de croire que c'etaient les memes etudiants
qui avaient assiste au cycle a son debut. L'un des professeurs
qui sont intervenus au cours de la conference dit : "Nous sommes
prets a faire des recherches sur le genocide armenien allegue, nos
archives sont ouvertes, et nos historiens sont prets". Pendant une
demi-heure, il a egalement mentionne les methodes a suivre pour la
recherche du genocide et il a finit en disant qu'il s'agissait d'un
genocide allegue. Cela m'est venu a l'esprit lorsque j'ai entendu
le premier ministre. Etant donne que nous ferons de la recherche
et que nous voulons la verite, pourquoi notre opinion sur ce point
n'a-t-elle pas change ? Comment pourrez-vous faire une recherche sur
quelque chose qui est qualifie d' "allegue" ? Pourquoi quelles raison
quelqu'un qui dit que ses ancetres n'ont pas fait une pareille chose
creerait-t-il une commission d'historiens ? Cela signifie que nous
ferons cette recherche pour trouver ce que l'on veut en realite,
pas pour la verite. C'est aussi simple que cela.
Etre "tolerant"
L'un des professeurs de la meme universite, au cours d'un dîner suivant
la conference, m'a dit d'eux qu'ils sont tolerants, capables de boire
de l'alcool, et que contrairement a "eux", ils n'etaient pas des
integristes, je pensai qu'il etait veritablement triste d'attribuer
la consommation d'alcool et d'autres habitudes banales a l'adoption
d'un mode de vie moderne, et a la liberte de conscience ; mais les
remarques d'un membre que me fit une autre universite etaient encore
plus tristes. Il parla de tolerance, me disant qu'ils avaient meme
un professeur armenien dans leur departement, et qu'il n'y avait pas
de discrimination parmi eux. Il se comportait comme s'il meritait
une medaille simplement parce qu'ils avaient engage un membre de la
communaute armenienne lie a la Turquie par la citoyennete depuis les
temps de l'empire ottoman. Il est triste que le autorites politiques
soient tout juste courageux pour etre tolerantes envers la liberte de
parole. Elles s'enorgueillissent d'etre les descendants d'une nation
tolerante envers les Chretiens, les Armeniens, les Kurdes et les
homosexuels, mais ils ne se rendent pas compte que ce n'est qu'une
reaction a un complexe d'inferiorite. Elles mettent la nationalite
turque au-dessus de tout et se disent etre tolerante envers toutes
les autres ; ce dont nous avons besoin cependant, c'est un discours
d'egalite et de justice.
Nous nous plaignons que la proposition de loi francaise restreint la
liberte de parole, soutenant que l'histoire devrait etre laissee aux
historiens. Malheureusement, la politique se nourrit d'un certain
nombre d'autres sciences ; de telles mesures doivent etre prises en
consideration en politique etrangère et interieure. Il faudrait etre
naïf pour en etre surpris. Certains cercles devraient se rejouir de
ce qui se passe en Turquie ; les remarques sur Dersim pourraient
soulever des espoirs meme si l'on peut penser que cela repose sur
des considerations politiciennes.
La proposition de loi francaise va plus loin que la reconnaissance
d'un genocide ; elle en penalise la negation. Et c'est un projet que
les partisans de la liberte pourraient soutenir en lui donnant force
de loi. Mais qui, en termes ethiques, pourrait accepter la negation ?
En Turquie, la politique continuelle de negation ne se limite
pas a interdire l'ouverture et a empecher que les douleurs passees
soient evoquees. L'effet le plus visible de cette negation, c'est le
climat que l'assassinat de Hrant Dink a cree, et les criminels que
ce climat n'a pas permis de decouvrir. La France utilise l'histoire
a des fins politiques, mais que fait la Turquie ? Au lieu d'ecouter
la voix de la conscience pour resoudre une question qui pourrait
elever les emotions des Armeniens et des Turcs et etre utilisee par
suite ailleurs pour des raisons politiques, elle discute la decision
de parlements etrangers. Et la Turquie ne prend aucune mesure pour
identifier les assassins de Dink, l'homme qui aurait pu defier la
France par la raison et par le c~\ur, plutôt que par le Noah's Pudding.
*Alin Ozinian est une analyste independante.
http://www.todayszaman.com/news-267340-armenians-expect-justice-not-tolerance-by-alin-ozinian*.html
From: A. Papazian