La Croix, France
Vendredi 24 Janvier 2014
Ombres arméniennes. Tigran Hamasyan, jazzman
À 26 ans, le musicien aborde une grande tournée française tout en
préparant de nouveaux projets, à un an du centenaire du génocide
arménien
DANA Jean-Yves
Son album Shadow Theater (Verve/Universal), enregistré en quintet et
sorti fin août, reste une pièce majeure de la production jazz de
l'année. Lui-même fut confirmé à cette occasion dans son statut de
musicien surdoué, et de compositeur baroque, osant les terrains
vertigineux et rompant les digues entre les genres Sur scène, agile
comme le félin, Tigran ne joue pas « du » piano mais « avec » lui,
dompte ou caresse le clavier, ce « meilleur ami avec lequel je passe
des heures chaque jour », explique-t-il.
Shadow Theater, aux chants remplis de poésie arménienne, est d'abord
un disque qui le relie à ses racines. Né il y a 26 ans à Gyumri, près
de la frontière turque, avant de déménager à Erevan à 10 ans, ce fils
d'un bijoutier et d'une créatrice de vêtements entraîne son « petit
pays » dans une modernité où s'entremêlent poésie et rock, jazz et
tradition, folklore et sacré « Si nous y allions ensemble demain, je
vous emmènerais dans les églises où se ressentent l'énergie du pays et
son ancrage, et où j'aime jouer plus que partout ailleurs », confie
Tigran Hamasyan.
Le musicien devenu star internationale et admiré par les plus grands,
de Herbie Hancock à Chick Corea, se prépare à concrétiser un projet
qui le rapproche plus encore de ses origines: « En 2015, pour le
centenaire du génocide, je souhaite donner cent concerts dans des
églises arméniennes du monde entier. Ce sera forcément différent de ce
que j'ai fait jusqu'ici », promet-il.
Depuis que s'est installée sa notoriété, Tigran se sent « ambassadeur
» de son pays, prêt, le cas échéant, à évoquer la mémoire de ses aïeux
qui n'ont pas été épargnés en 1915. « En parler est encore nouveau
pour moi, je dois m'y préparer », admet-il en souriant.
Shadow Theater lui permet d'évoquer une autre facette du pays, le
thétre d'ombres, un art toujours populaire: « Ses images m'ont
inspiré dès l'enfance. Je reste fasciné en voyant que les spectateurs
paient cher pour assister à un spectacle d'illusions, qu'ils y
viennent avec ce besoin d'y croire. La musique me permet d'entretenir
la même relation, et d'invoquer les ombres parmi nous »
Les douze pièces de l'album constituent encore l'une des premières
pierres d'une oeuvre ébauchée dès 2006 année de son premier prix au
concours du Thelonious Monk Institute of Jazz. « J'avais presque 20
ans, je cessais d'être perçu comme un enfant prodige et je pouvais me
consacrer à ce que je voulais laisser. » Il fonde trois ans plus tard
un quintet, Aratta Rebirth, avec lequel il mêle jazz fusion, tradition
arménienne et metal. On le retrouve minimaliste sur A Fable en 2011,
en piano-voix, ajoutant à son arc la corde du chant, que l'on retrouve
sur Shadow Theater. Chantier en construction
Vendredi 24 Janvier 2014
Ombres arméniennes. Tigran Hamasyan, jazzman
À 26 ans, le musicien aborde une grande tournée française tout en
préparant de nouveaux projets, à un an du centenaire du génocide
arménien
DANA Jean-Yves
Son album Shadow Theater (Verve/Universal), enregistré en quintet et
sorti fin août, reste une pièce majeure de la production jazz de
l'année. Lui-même fut confirmé à cette occasion dans son statut de
musicien surdoué, et de compositeur baroque, osant les terrains
vertigineux et rompant les digues entre les genres Sur scène, agile
comme le félin, Tigran ne joue pas « du » piano mais « avec » lui,
dompte ou caresse le clavier, ce « meilleur ami avec lequel je passe
des heures chaque jour », explique-t-il.
Shadow Theater, aux chants remplis de poésie arménienne, est d'abord
un disque qui le relie à ses racines. Né il y a 26 ans à Gyumri, près
de la frontière turque, avant de déménager à Erevan à 10 ans, ce fils
d'un bijoutier et d'une créatrice de vêtements entraîne son « petit
pays » dans une modernité où s'entremêlent poésie et rock, jazz et
tradition, folklore et sacré « Si nous y allions ensemble demain, je
vous emmènerais dans les églises où se ressentent l'énergie du pays et
son ancrage, et où j'aime jouer plus que partout ailleurs », confie
Tigran Hamasyan.
Le musicien devenu star internationale et admiré par les plus grands,
de Herbie Hancock à Chick Corea, se prépare à concrétiser un projet
qui le rapproche plus encore de ses origines: « En 2015, pour le
centenaire du génocide, je souhaite donner cent concerts dans des
églises arméniennes du monde entier. Ce sera forcément différent de ce
que j'ai fait jusqu'ici », promet-il.
Depuis que s'est installée sa notoriété, Tigran se sent « ambassadeur
» de son pays, prêt, le cas échéant, à évoquer la mémoire de ses aïeux
qui n'ont pas été épargnés en 1915. « En parler est encore nouveau
pour moi, je dois m'y préparer », admet-il en souriant.
Shadow Theater lui permet d'évoquer une autre facette du pays, le
thétre d'ombres, un art toujours populaire: « Ses images m'ont
inspiré dès l'enfance. Je reste fasciné en voyant que les spectateurs
paient cher pour assister à un spectacle d'illusions, qu'ils y
viennent avec ce besoin d'y croire. La musique me permet d'entretenir
la même relation, et d'invoquer les ombres parmi nous »
Les douze pièces de l'album constituent encore l'une des premières
pierres d'une oeuvre ébauchée dès 2006 année de son premier prix au
concours du Thelonious Monk Institute of Jazz. « J'avais presque 20
ans, je cessais d'être perçu comme un enfant prodige et je pouvais me
consacrer à ce que je voulais laisser. » Il fonde trois ans plus tard
un quintet, Aratta Rebirth, avec lequel il mêle jazz fusion, tradition
arménienne et metal. On le retrouve minimaliste sur A Fable en 2011,
en piano-voix, ajoutant à son arc la corde du chant, que l'on retrouve
sur Shadow Theater. Chantier en construction